Ils se risquent dans la rue. Ils tentent de gagner leur vie en quémandant des sous auprès des citoyens qui marquent de plus en plus de l'indifférence à leur égard. Eux, ce sont des migrants venus de la région subsaharienne. Ils sont présents en force dans la ville de Béjaïa et ses quatre coins. Nous les avons suivis dans leur quotidien. Leurs conditions de vie laissent à désirer. Sous un soleil de plomb, ces migrants accostent les automobilistes au moindre bouchon qui se forme, tant au niveau des carrefours de la ville, que sur les routes nationales où ils le font de plus en plus d'une manière agressive, cela irrite les usagers qui affichent leur mécontentement. Ils sont nombreux sur les routes à s'allonger par terre, mendier auprès des passants, courir derrière les voitures ou pis encore parcourir tous les quartiers de la wilaya de Béjaïa en quête d'argent. On observe de plus en plus ces derniers temps, des femmes enceintes, des hommes, des enfants et des vieillards exposés à la chaleur dans des lieux stratégiques comme Aâmriw, Edimco, la wilaya et les Quatre Chemins. Ces réfugiés subsahariens ont quitté en masse leur terre d'origine à cause de la sécheresse et des conflits internes. Ces derniers ont marché longtemps avant de rallier l'Algérie et retrouver plus de sécurité. Cependant, leur pari est loin d'être réussi puisque leurs conditions de vie sont alarmantes, voire même inquiétantes. A l'Edimco, on rencontre Salissou un jeune adolescent de 15 ans originaire du Niger, assis seul sous un arbre pour se protéger de la chaleur étouffante. Près de lui une petite boîte qu'il utilise pour faire l'aumône. Salissou raconte les larmes aux yeux, qu'il aime son pays et compte rentrer chez lui dans un mois, mais d'abord il souhaite gagner un peu d'argent. Ce jeune garçon espère qu'un jour il fréquentera une école pour apprendre à lire et à écrire. Un rêve que l'Algérie ne peut certainement pas lui offrir. En face, les citoyens qui ont suffisamment donné ces dernières années sont devenus aujourd'hui méfiants, et mettent rarement la main à la poche. Parfois, on les voit fermer les vitres de leurs véhicules à l'approche d'un migrant de peur d'une réaction violente lorsqu'ils refusent de leur donner de l'argent. «A ma sortie du stade Ben Allouche pour rentrer à la maison, j'ai rencontré un groupe de migrants qui m'ont demandé de l'argent et j'ai refusé. L'un d'entre eux a commencé à dire des choses dans son dialecte que je ne comprenais pas, puis un autre a tenté de me frapper. Heureusement pour moi, mes amis n'avaient pas encore quitté les lieux, ce jour-là j'ai cru que j'allais mourir», confie Tanina une étudiante à l'université Abderrahmane Mira. Dihya, une citoyenne de Béjaïa, raconte que leur comportement est parfois inquiétant. «Je suis allée chez eux aux Quatre Chemins pour leur donner des vêtements, mais ils ont refusé de les prendre, ils veulent de l'argent, j'ai été étonné.» Ces deux témoignages illustrent les rapports tendus entre la population et ces migrants. Des rapports qui virent parfois à la bagarre. Face à cette situation,la société civile composée d'organisations politiques et associatives n'est pas restée inactive. Depuis l'apparition de ce phénomène d'immigration la société civile a manifesté devant le siège de la wilaya de Béjaïa pour pousser les pouvoirs publics à agir pour prendre leurs parts de responsabilité vis-à-vis de la situation effrayante des migrants. Les cris des militants ont porté leurs fruits, les migrants avaient été regroupés et transportés à Tamanrasset, par contre l'opération n'a pas changé la donne. Quelques jours après ils étaient déjà de retour. Pour cette année, il y eut une grande polémique entretenue par des grandes personnalités de l'Etat autour de la présence des migrants dans notre pays. Fallait-il les renvoyer chez eux ou bien leur accorder les moyens à même de leur garantir une vie décente?Le racisme, le doute, la peur, ces trois facteurs ont largement circulé sur la Toile et dans les discours politiques. Chacun y est allé de son point de vue sur la question. Les avis sont divers. Le gouvernement et la population ne sont pas sur la même longueur d'onde, ce qui est vu par le gouvernement comme un soutien aux subsahariens, le citoyen le perçoit comme un risque sanitaire, car ils ne sont pas protégés. La wilaya de Béjaïa déjà menacée par les déchets que l'on voit dans ses quartiers, notamment ceux occupés par les migrants, affiche un état de désolation. A cela s'ajoute l'insécurité. Désormais, tout peut basculer à cause de la violence, oeuvre de certains migrants, enregistrée ces derniers jours et qui a fait l'objet d'un débat entre les Algériens et les autorités. Annaba et El Harrach étaient les premières villes à être touchées par cette violence. Ces faits ont contraint les autorités à prendre des décisions claires sur le sort des migrants en Algérie. Le gouvernement ne peut plus faire comme si de ne rien n'était. Avant, la population s'interrogeait sur le statut, mais actuellement le débat est orienté sur le degré de la violence des migrants. Cette violence n'est pas propre à tous les migrants, mais elle risque de se généraliser. Il est impératif, selon les citoyens, que ces migrants soient placés dans des centres d'accueil ou renvoyés chez eux. Les pouvoirs publics ont opté pour la deuxième solution Dans le respect de la dignité humaine et à la demande de leurs gouvernements respectifs, les opérations de rapatriement ont débuté depuis le 1er août, cette démarche vise à lutter contre le phénomène. Pour rappel, des opérations similaires ont eu lieu en 2014 lorsqu'un grand nombre de migrants soit 19 116 personnes ont été rapatriées vers leurs pays d'origine sans pour autant que le problème soit réglé définitivement. Selon la présidente du Croissant-Rouge algérien Saïda Benhabylès, ces opérations ont coûté au Trésor public 80 milliards de centimes en 2014. La présence des migrants sur l'ensemble de territoire national rend l'opération de rapatriement plus difficile et nécessite une forte mobilisation et un énorme budget. Le rapatriement se déroule dans des conditions humaines.