En réaction à l'emprisonnement de la sage- femme de Djelfa, le syndicat se montre solidaire «Le nombre des sages- femmes à l'échelle nationale était de 9000 en 2016», a avancé la secrétaire générale du Syndicat national des sages-femmes algériennes. C'est la goutte qui a fait déborder le vase. L'affaire du décès de la femme enceinte à Djelfa a levé le voile sur la situation catastrophique de nos hôpitaux, en particulier le service de maternité. Le Syndicat national des sages femmes algériennes (Snsfa) monte au créneau pour éplucher quelques vérités amères sur les problèmes de la profession. En réaction à l'emprisonnement de la sage- femme de Djelfa, le syndicat se montre solidaire et défend ce membre de la corporation. Loin de justifier l'acte, la secrétaire générale du syndicat, Mme Chetti, estime que la responsabilité n'incombe pas à une partie, mais à tout le système de santé qu'elle qualifie de défaillant. «Les conditions socioprofessionnelles des sages-femmes sont épouvantables», a-t-elle martelé. Contactée par nos soins, cette responsable qui a une longue expérience dans la profession témoigne de la charge qui pèse au quotidien sur les sages-femmes. Elle cite comme premier élément le manque flagrant de personnel. «Le nombre des sages-femmes à l'échelle nationale était de 9000 en 2016», a-t-elle avancé, un chiffre qui reste insignifiant devant l'évolution démographique et la croissance du taux de natalité qui dépasse un million par an. C'est effarant, voire scandaleux! Avec les départs en force en retraite anticipée, leur nombre a sensiblement baissé, créant un vide énorme au sein de nos établissements sanitaires. Ce qui explique le malaise qui ronge le secteur de la santé. Notre interlocutrice rappelle que la norme fixée par l'Organisation internationale de la santé (ONS) est de 73 accouchements par an pour chaque sage-femme, en Algérie elles se retrouvent à faire 40 ou 50 accouchements en 24 heures. «Nos sages-femmes sont des tireuses de tête, même les machines tombent en panne», a-t-elle déploré en guise de justification. Mme Chetti soutient que la profession est le parent pauvre de la santé. «Les sages-femmes n'ont ni statut ni un code de déontologie ni un Conseil de l'ordre comme les différents corps de la santé», a-t-elle regretté avant d'ajouter: «On vous fait naître, faites-nous reconnaître.» Celle-ci s'est également interrogée sur la nouvelle loi de la santé qui tarde à venir et qui devait assurer une couverture juridique à la sage-femme. Mme Chetti a appelé à l'amélioration des conditions socioprofessionnelles en urgence pour éviter une démission de l'effectif, tout en mettant l'accent sur une formation de qualité. «Les critères fixés pour la formation des sages-femmes (bac plus 5) n'ont pas amélioré la situation», a-t-elle soutenu. Dans son communiqué, le Snfa a «réitéré son soutien à l'ensemble des sages-femmes dont il puise sa force pour la réalisation de la justice sociale dans le cadre des lois en vigueur, réitère son opposition à toute tentative d'arbitraire,veille sans aucun doute à l'amélioration des conditions de travail et rappelle à chaque occasion la tutelle à y veiller, puisque la qualité des prestations est étroitement liée aux problèmes socioprofessionnels». Le syndicat a demandé à ses adhérentes sur tout le territoire national de rester vigilantes et solidaires afin de préserver les consoeurs et les droits, en précisant qu' «il est temps de dire STOP, la sage-femme ne sera plus jamais le souffre-douleur ou bouc émissaire d'un système de santé défaillant». L'affaire de la sage-femme de Djelfa fait craindre sérieusement le pire. Alors que l'enquête menée par le ministère de la Santé est toujours en cours, la contestation s'élargit au sein de la base. Des démissions en cascade ont été annoncées par le personnel médical au niveau de l'établissement hospitalier de Aïn Ouessara. «Nous refusons que la sage-femme soit le bouc émissaire», crie le personnel de l'établissement qui organise des sit-in au quotidien. Le syndicat a mené plusieurs actions à travers les wilayas. La section du syndicat à Annaba a apporté son soutien en observant dimanche dernier un sit-in. De son côté, le Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (Snpssp) soutient que la responsabilité dans cette affaire est partagée. «Il y a un manque flagrant de sages-femmes dans certaines régions où l'on retrouve une sage-femme pour une population qui dépasse les 100 000 habitants». Selon Lyes Merabet, 70% des médecins spécialistes en gynécologie travaillent chez le privé. Le représentant du Snpssp a également reconnu que les départs en retraite anticipée ont vidé le secteur de la santé. Cette situation interpelle davantage le ministère de la Santé qui doit prendre les choses en main pour en finir avec les maux qui rongent le secteur.