Sur fond de recrudescence de la violence à Ghaza, Israël poursuit son jeu ambigu autour du retrait et de ses relations avec l'Autorité palestinienne. Déjà fragile, la trêve entre les Palestiniens et Israël, qui tient depuis janvier dernier avec une baisse notable de la violence, risque d'être remise en cause par la poursuite des incursions et des assassinats de Palestiniens par l'armée israélienne. Hier, trois Palestiniens ont été tués, cinq autres blessés, par des tirs de soldats israéliens, dans la localité de Qabatyah, près de Jénine en Cisjordanie, alors que des incursions israéliennes se multiplient dans le secteur de Ghaza. Cela est paradoxal pour Israël qui dit se préparer à évacuer la bande de Ghaza à la mi-août, mais semble tout faire, par ses provocations, pour inciter à la rupture de la trêve et donner prétexte à Tel-Aviv de renvoyer l'évacuation des colons et de l'armée israélienne à une date ultérieure. La recrudescence des violences dans les territoires palestiniens occupés intervient au moment même où l'envoyé spécial du quartette, l'Américain, James Wolfensohn, ancien président de la Banque mondiale (BM) est arrivé au Proche-Orient pour discuter du retrait israélien avec les autorités israéliennes et palestiniennes. M.Wolfensohn, arrivé lundi en Israël, devait s'entretenir hier avec les dirigeants israéliens notamment avec le chef du gouvernement, Ariel Sharon, les ministres de la Défense et des Affaires étrangères, Shaoul Mofaz et Sylvan Shalom, respectivement, et le vice-Premier ministre le travailliste Shimon Peres. Il rencontrera aujourd'hui à Ramallah le président palestinien, Mahmoud Abbas et les responsables de l'Autorité palestinienne parmi lesquels, le Premier ministre Ahmed Qorei et le ministre des Affaires civiles Mohamed Dahlane. Chargé par le président américain, George W.Bush, de faire le point sur la situation, James Wolfensohn va, indique un communiqué de son porte-parole «discuter une série de problèmes concernant le désengagement israélien de la bande de Ghaza et des secteurs du nord de la Cisjordanie». Par ailleurs, le retrait israélien de Ghaza a fait l'objet de discussions entre Palestiniens et Israéliens en vue de la coordination de l'évacuation des colons israéliens des 21 colonies de la bande de Ghaza et des quatre colonies isolées au nord de la Cisjordanie. Dans cette optique, une rencontre de plannings a été organisée entre Palestiniens et Israéliens, rencontre qui s'est achevée sur un constat de désaccord entre les deux parties. Ce désaccord porte notamment sur le refus d'Israël de donner aux Palestiniens les données et les cartes concernant les secteurs civils et militaires retenus pour le désengagement israélien prévu l'été prochain. Le négociateur palestinien en chef, Saeb Erakat a déploré le fait que «les Israéliens devaient fournir à nos experts des cartes détaillées mais ils ne l'ont pas fait et nous insistons pour les obtenir». Pour sa part, le ministre travailliste israélien Haïm Ramon, dans une déclaration à la Radio militaire israélienne, a indiqué que «les Palestiniens ont voulu que nous leur remettions plus de données et ont refusé de recevoir celles que nous étions prêts à leur remettre. Je pense que c'est une erreur de leur part». En fait, Israël continue à faire cavalier seul et ne fournit aux Palestiniens que les informations qu'il veut bien lui donner alors que ces informations (AEP, électricité, télécommunications, entre autres) sont essentielles pour la gestion des régions évacuées par Israël. Tout en ne faisant rien pour faciliter le coordination entre Palestiniens et Israéliens en vue de la prochaine évacuation des 21 colonies israéliennes à Ghaza, Israël tente d'aggraver la tension entre l'Autorité palestinienne et les mouvements de résistance palestiniens, en sommant, quasiment, le président palestinien, Mahmoud Abbas, de réaliser, -alors que la création de l'Etat palestinien reste utopique-, ce que l'Etat hébreu a, lui, été incapable de faire ces dernières décennies: désarmer la résistance. Or, en essayant de pousser à une guerre fratricide entre Palestiniens, loin de conforter sa position, Israël, outre de compliquer les choses, fragilise davantage les chances de paix au Proche-Orient. De fait, Israël s'est engagé tout au long de ces années dans un poker menteur, promettant beaucoup mais faisant peu, ne semblant avoir pour programme, à court et long terme, que celui de gagner du temps. Ce que l'Etat Israël fait pratiquement depuis 1994 en concomitance avec la suspension, par le gouvernement israélien de droite de Benjamin Netanyahu, du processus d'Oslo, par le refus de mener à terme l'accord de paix de 1993. De fait, de dérobades en faux-fuyants, la politique israélienne s'est résumée à gérer la situation de l'immédiat, sans profit pour les deux communautés palestinienne et juive. Notons la visite aujourd'hui à Ramallah du chef de la diplomatie britannique, Jack Straw, qui aura des entretiens avec MM.Abbas, Qorei et son homologue palestinien Nasser Al-Qidwa. M.Straw s'est, par ailleurs, entretenu hier avec le chef du gouvernement israélien, Ariel Sharon, et son homologue israélien Sylvan Shalom.