Nous nous sommes rapprochés de Benmansour et Farès Oudjedi pour aborder avec eux la situation. L'Expression: Quel sens donnez-vous à l'événement historique de la marche du 14 juin 2001? Bezza Benmansour: Quatre ans après, la marche historique du 14 juin revêt une portée particulière en ce sens que c'est pour la première fois dans l'histoire de l'Algérie post-indépendance, que des millions de citoyennes et citoyens sont sortis dans les rues de la capitale levant l'étendard de la lutte pour l'exercice plein de la citoyenneté. Cette imposante manifestation nous livre au moins deux messages: d'abord cette extraordinaire volonté foncièrement populaire de changement pour plus de démocratie et de justice sociale, puis la manière dont elle s'est exprimée en adoptant le dialogue comme vertu universelle de règlement de crise. Les encadreurs de la marche devaient remettre la plate-forme au président de la République. Malheureusement, la répression en a décidé autrement... Farès Oudjedi: La marche du 14 juin démontre encore une fois que le peuple algérien se bat vigoureusement et pacifiquement pour la liberté, la démocratie et la citoyenneté. Comme il l'a fait durant la guerre de Libération, il a montré en ce 14 juin qu'il n'est pas près de lâcher prise quant au recouvrement de ses droits à plus de justice sociale. Quatre ans après, comment appréhendez-vous la situation? Bezza Benmansour: Le mouvement citoyen, anticorps que la société avait produit parce qu'elle traversait une crise inédite, s'est imposé comme force incontournable sur l'échiquier politique du pays. Le pouvoir a fini par répondre à l'exigence du MC, à savoir l'engagement à satisfaire la plate-forme d'El Kseur. C'est pourquoi l'esprit de responsabilité nous a imposé le devoir de passer de la phase de contestation à celle du dialogue et donc du partenariat pour la mise en oeuvre de la plate forme d'El Kseur. Les rumeurs de bas étage et les agitations stériles des tenants du pourrissement, qui ont trahi l'esprit de la marche du 14 juin, n'altéreront en rien notre détermination à honorer la mémoire de nos martyrs. Farès Oudjedi: Les citoyennes et les citoyens qui ont pris part à cette glorieuse manifestation, et ils étaient des millions, demeurent toujours fidèles à l'esprit qui avait animé cette manifestation en soutenant l'option de dialogue pour la mise en oeuvre de la plate-forme d'El Kseur. Tout comme ces citoyens, nous restons fidèles et plus que jamais déterminés, en tant que délégués, à concrétiser les revendications citoyennes justes et légitimes contenues dans le document produit à El Kseur un certain 11 juin 2001. Cinq mois après le début du dialogue, quel bilan faites-vous? Bezza Benmansour: Beaucoup d'acquis ont été arrachés: accord global pour la mise en oeuvre de la plate-forme, statut approprié pour les martyrs, plan d'urgence socio-économique, jugement des assassins par les tribunaux civils etc. La population suit avec intérêt l'évolution de ce dialogue et attend un rythme plus accéléré dans l'application des engagements pris. Farès Oudjedi: Les sacrifices consentis ont fini par payer. Nous sommes présentement en partenariat avec les représentants de l'Etat pour répondre concrètement aux aspirations de larges pans de la population. Il est de notre devoir de demeurer responsables et vigilants. La population n'est pas dupe, elle a fait son choix en fonction de ses intérêts.