Quelques milliers de personnes, venues essentiellement des localités montagneuses et des régions ayant enregistré des interpellations, ont pris part à la marche de la coordination intercommunale organisée hier au chef-lieu de Béjaïa. Prévue à 11 heures, la marche ne s'est ébranlée que vers midi en direction du tribunal de Béjaïa en grossissant au fur et à mesure qu'elle avançait. La procession humaine scandait des slogans hostiles au pouvoir et favorables à la libération des détenus avant la fête de l'Aïd. Sous le regard surpris des riverains, visiblement pas informés de cette marche, les participants scandaient «Adefghan nagh atsaroui» (libérez-les ou ça va barder). Au premier carré, on constate l'emblème national précédé d'une large banderole noire. Arrivée à hauteur du tribunal, les marcheurs prennent position en face d'un cordon de sécurité stationné dans la cour du bâtiment. Quelques jeunes tentent d'enflammer la situation en lançant des projectiles en direction des policiers imperturbables. Une délégation établit un contact avec le procureur par l'intermédiaire d'un officier de police qui réapparaît dix minutes plus tard avec la réponse que tout le monde attendait: «Je ne reçois pas le vendredi.» Pour la demande de libération provisoire, «les parents des détenus peuvent la faire». Du coup, c'est la colère qui s'installe. Des attroupements se forment pour se concerter entre partisans du déclenchement des émeutes sur place et les sages qui tentent de calmer les esprits en multipliant les arguments de la nécessité «d'éviter l'hostilité à la veille de l'Aïd qui ne profiterait qu'au pouvoir». Pour Farès Oudjedi, «le mouvement ne doit pas se réduire à libérer les détenus. Il y a plus important: la plate-forme d'El-Kseur» Et d'ajouter: «Nous avons marqué notre point. La balle est dans le camp de la justice.» Ali Gherbi, pour sa part, avertit: «Le pouvoir doit assumer ses responsabilités» et exige «la libération des détenus sans conditions». L'orateur visiblement déçu par la réponse du procureur, «dont l'attitude pousse au pourrissement», déclare: «L'affaire est entre les mains de la population.» Une heure après, la foule humaine se disperse sans pour autant attendre l'objectif escompté devant l'intransigeance des pouvoirs publics.