Le premier ministre est resté droit dans ses bottes, toujours égal à lui-même, il a dépeint sans détours la situation difficile que traverse le pays. Ahmed Ouyahia est assurément un phénomène unique de la classe politique. Comme seule l'Algérie sait enfanter. La langue de bois une des caractéristiques de bon nombre de responsables, lui est étrangère. C'est le franc-parler qui le caractérise. Il lui a forgé une stature de responsable rigoureux qui tranche lorsque la situation l'impose. Cela ne peut plaire à tout le monde évidemment. Même dans son propre camp. Ouyahia laisse passer l'orage dans pareil cas. Se met en réserve de la République. Comme un joker de luxe. Pour mieux revenir sans doute. On peut même dire qu'il a eu plusieurs vies dans sa longue carrière de serviteur de l'Etat. Une responsabilité sans laquelle il ne saurait exister. Servir son pays: c'est son ballon d'oxygène. Surtout lorsqu'il est en proie à des difficultés. Ahmed Ouyahia est l'homme des situations délicates. Il traîne en tout cas cette réputation qu'on lui a sans doute injustement collée à la peau. Paradoxalement, son franc-parler rassure au lieu de créer la panique. Il se retrouve en symbiose comme par magie avec ses compatriotes. Les Algériens ont horreur qu'on leur mente. Comme tous les peuples de la terre au demeurant. En plus qu'y a-t-il à cacher? L'Algérie affronte une crise financière parmi les plus féroces qu'elle ait eu à connaître. La cause est connue: les prix du pétrole ont lourdement chuté depuis la mi-juin 2014 et tardent à se redresser. Pas suffisamment en tout cas pour mettre fin à un déficit commercial qui menace les équilibres budgétaires tout en contrariant certains projets de développement. Tout cela est de notoriété publique. Alors pourquoi tourner autour du pot. Aller à la chasse à des sorcières qui n'en sont pas. Au contraire de ses prédécesseurs, le dernier en l'occurrence, le Premier ministre qui a présenté hier, à l'APN, le plan d'action de son gouvernement, est allé droit au but. Il est resté droit dans ses bottes, toujours égal à lui-même, il a dépeint sans détours la situation difficile que traverse le pays. Un discours de tribun hors pair dit avec franchise, avec un ton fort à la mesure de la crise qui a mis à mal les finances du pays. Les mesures qui doivent aider à franchir cette étape difficiles ont été arrêtées. Elles ne sont ni aventureuses ni prises à la légère. Ce n'est pas dans l'esprit de Ouyahia d'hypothéquer l'avenir de l'Algérie, lui qui était déjà aux affaires lorsqu'elle faisait face à un terrorisme sauvage et aveugle. Le chef de l'Exécutif ne s'en vante pas. Et c'est tout naturellement qu'il a expliqué comment relancer la machine pour que l'Algérie sorte victorieuse de ce nouveau défi. Le choix du financement conventionnel pour redynamiser l'économie évitera sans doute la prise de décisions douloureuses. Ouyahia en a fait son arme de prédilection pour préserver l'Algérie d'une éventuelle mésaventure qui la ferait passer sous les fourches Caudines du Fonds monétaire international. Une décision réfléchie qui répond aux voeux du président de la République. Bouteflika a exclu le recours à l'endettement extérieur et entend préserver la souveraineté financière du pays. En orateur de premier plan Ahmed Ouyahia a défendu avec brio cette option devant les élus du palais Zighoud-Youcef. Un discours solennel, mais apaisé sur lequel reposera la dynamique du gouvernement.