La liste parrainée par Saâd Hariri a remporté la quatrième et dernière étape d'un scrutin marathon qui s'est achevé dimanche dans le Nord. Le renouvellement du Parlement libanais s'est achevé dimanche par le déroulement de la quatrième et dernière étape d'une élection étalée sur quatre dimanches dans les principales régions du Liban. Ainsi, après Beyrouth, le Sud et le Mont Liban, le Nord a voté à son tour dimanche dernier consacrant la suprématie des listes parrainées par le fils de l'ancien Premier ministre, Rafic Hariri, assassiné le 14 février dernier. De fait, le martyr de Hariri a porté, comme une onde de choc, l'opposition rassemblée derrière Saâd Hariri qui a trusté la plupart des sièges dans la capitale, au Sud et dimanche dans le Nord. Cela va assurer, sous réserve de confirmation des résultats du Nord, la majorité absolue au Parlement pour l'opposition drivée par le jeune Saâd Hariri, 35 ans, grand vainqueur des premières législatives organisées sans la présence syrienne, depuis 29 ans. Saâd Hariri et ses alliés ont tout raflé sauf dans le Mont Liban, où il butta sur le bastion de Michel Aoun, qui semble, d'ores et déjà, assuré du leadership chrétien au Liban. Toutefois, si l'on analyse les résultats cumulés des quatre scrutins législatifs libanais, on s'aperçoit qu'il ont a contrario conforté le confessionnalisme par une division nette des régions sous obédience ethnique et religieuse. Ainsi, les sunnites restent maîtres dans la capitale et dans le Nord, les chiites, alliance Amal-Hezbollah, affirment leur ascendant sur le Sud, les chrétiens se maintiennent dans le Mont Liban, alors que les druzes de Walid Joumblatt affirment leur présence dans le Chouf. Cette répartition ethnique accentue en fait la division confessionnelle du Liban alors que d'aucuns affirmaient lutter pour un Liban «déconfessionnalisé» ou seuls les idées et les programmes politiques départageraient le champ politique libanais, à l'exclusion de toute autre vision notamment fondée sur la religion. Ce qu'il y a aussi à retenir de ce long scrutin reste l'élimination de la vieille garde sunnite quasiment balayée par le jeune et flamboyant Saâd Hariri qui promet d'apporter le changement aux Libanais. De fait, les caciques du pouvoir, ayant longuement frayé avec la Syrie, y compris les chrétiens, tel Soleiman Frangié, qui d'ailleurs a reconnu hier la défaite de sa liste dans le Nord, face à la liste (chrétiens et sunnites) parrainée par M.Hariri Jr. M.Frangié, réputé pro-syrien, s'est allié pour la circonstance avec Michel Aoun, grand vainqueur du précédent scrutin au Mont Liban. De fait, M Aoun, opposant atypique, a averti dès dimanche qu'il ne s'alliera pas avec la nouvelle majorité parlementaire affirmant: «Il y a un problème de confiance entre eux et moi, entre le peuple libanais et eux. Il y a des divergences fondamentales sur les valeurs», se considérant comme le représentant du camp des «réformistes contre les traditionalistes». M.Aoun souligna d'autre part: «Les corrompus ne peuvent être des réformistes. Toutes leurs méthodes sont illégales», imprimant déjà la marque de ce que sera sa politique dans la future assemblée. Reste toutefois à voir si, à terme, Michel Aoun aura la capacité de leader des chrétiens à laquelle il semble aspirer, et plus largement le chef de l'opposition dans le nouveau Parlement, espérant ainsi faire ainsi contrepoids au charisme incontestable des leaders sunnite, Saad Hariri, druze, Walid Joumblatt, chiites Nabih Berri (Amal) et Hassan Nasrallah (Hezbollah). 28 sièges étaient dimanche en jeu dans le Nord (région de Tripoli) remportés, en totalité, selon des résultats officieux, par la liste parrainée par M.Hariri. Dans ce cas de figure, l'opposition menée par Saâd Hariri se retrouverait à la tête de 72 sièges sur les 128 sièges du Parlement (44 ayant été déjà engrangés lors des trois précédents scrutins) l'alliance Amal-Hezbollah avec 35 sièges et le groupe de Michel Aoun détenant 21 sièges. Il faudrait sans doute, toutefois, attendre l'installation de la nouvelle assemblée et la décantation qui doit s'ensuivre, en tenant compte de la coalition de fait entre les listes Hariri-Joumblatt et les Forces libanaises, pour réellement dire ce qu'il va y avoir de nouveau, et propice au changement, au Liban, d'autant plus que les listes de Saâd Hariri et de Michel Aoun comptent nombre de ralliés de dernière minute, dont certains étaient hier encore des piliers du régime pro-syrien décrié. En sus du fait que les listes Amal-Hezbollah, des pro-syriens qui ne s'en cachent pas, reconduisent, peu ou prou, les mêmes députés du Parlement sortant. Aussi, les législatives libanaises n'ont pas réellement clarifié la donne politique locale, si ce n'est le fait qu'outre d'avoir conforté le confessionnalisme, elles semblent avoir approfondi le clivage politico-religieux.