Condamné par la section pénale, le directeur de L'Expression fait appel. Le parquet et la partie civile, non. Les avocats de Fattani jouent sur du velours. Il est 9h 50 lorsque Belkharchi, le juge, appelle les parties de l'affaire Fattani-Enps. Ahmed Fattani, directeur de L'Expression, est là. A ses côtés Mohamed Abdoun, journaliste, auteur de l'article incriminé. Me Mohamed Fatnassi et Me Med Mentalecheta, leurs conseils s'annoncent. Aux côtés de Me Mouloud Guerrouche, la partie civile est présente. Fattani explique pourquoi il a interjeté appel du verdict prononcé par le tribunal d'Hussein Dey. Belkharchi met son grain de sel: «Alors, parlez-nous pourquoi aviez-vous écrit ‘'criminels'' au sujet des maîtres d'oeuvre des glissières de sécurité.» «Elles ne vont pas avec les normes internationales. J'avais, à l'époque, tenté de joindre le P-DG de l'entreprise pour qu'il nous fournisse des explications sur la très mauvaise réalisation des glissières. En vain.» Le juge refuse le terme «coupables» en parlant des techniciens de l'Enps. Fattani persiste et signe: «Elles sont loin de répondre aux normes internationales, un point c'est tout.» Med Abdoun a la parole à son tour: «Je garde confiance en la justice.» Le représentant de l'Enps fixe les termes diffamatoires. «L'élément d'identification reste l'Enps selon le journal, alors que l'Enps n'a pas le monopole des livraisons des glissières», récite le P-DG qui décline un document désignant trois lots de glissières livrés par six entreprises différentes. Belkharchi revient sur les termes dits diffamatoires. «Criminels», répond la partie civile. Fattani revient à la barre et prend à témoin les conclusions d'expertises sur les causes des accidents des bretelles et routes. Ce n'est pas dans les habitudes des avocats de blesser une quelconque partie. Autorisé à effectuer des observations, Me Guerrouche, l'avocat de l'Enps, a parlé de corruption de la presse. Fattani s'insurge et proteste, Me Mentalecheta lève la main. Belkharchi prévient le défenseur. La chambre se comporte en gens de droit faites de même, Me, et évitez les dérives. L'avocat demande acte. Fattani parle depuis la barre: «C'est une grave accusation. Moi et la presse corrompus?» Le juge le rassure. «Nous sommes là. Nous ne permettrons à personne de toucher à la dignité de quelqu'un.» Fattani réajuste sa paire de lunettes et retrouve en cinq secondes sa sérénité. Le petit savon du juge l'a rassuré. Me Mentalecheta revient au procès: «Mon client a repris une conférence de presse où quarante journalistes étaient présents. Ould Houcine est responsable de ses propos. Là aussi, aucune diffamation», siffle l'immense avocat.