30.000 enfants, un toutes les trois secondes, meurent chaque jour à cause de la pauvreté. C'est le chiffre désastreux résultat de la pauvreté en Afrique, rappelé hier par Richard Bennett, président de Make Poverty Hystory. Une fatalité? Certes non! Mais l'Afrique, mal partie dès les indépendances, n'a cessé depuis de porter la croix, la situation ne faisant que se détériorer au fil des ans tant du fait de la gestion catastrophique des affaires par les dirigeants africains, (corruptions, mal gouvernance, gaspillage...) que du fait de la démographie galopante, conditions aggravées par l'accumulation des dettes, par la stagnation du développement que par un produit national brut qui demeurait collé au plancher. Aujourd'hui le monde entier se mobilise et veut faire quelque chose pour aider l'Afrique, un continent sinistré. Du secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan au pape Benoît XVI en passant par Live 8, chacun à sa manière tente de sensibiliser les décideurs internationaux à la veille du sommet du G8 (du 6 au 8 juillet) à Gleneagles en Ecosse. Ainsi, à partir d'Edimbourg où il y recevait un prix honorifique, Kofi Annan, réitéra à l'intention des puissants «les pauvres ont besoin de vous, ne les oubliez pas». M.Annan a appelé les pays les plus riches réunis au sein du G8 de ne pas «oublier» les pauvres, déclarant: «J'espère que l'attention portée actuellement à l'Afrique et sur le combat contre la pauvreté aidera à faire avancer les choses.» Le pape Benoît XVI a pour sa part délivré un message dans lequel il affirme: «Les peuples des pays riches doivent être prêts à accepter le poids de la réduction de la dette des pays pauvres très endettés et doivent exhorter leurs dirigeants à respecter l'engagement de réduire d'ici à 2015 la pauvreté dans le monde et surtout en Afrique». Toujours à Edimbourg, capitale de l'Ecosse, des milliers de manifestants - plus de 200.000 selon les estimations - se sont réunis pour faire pression sur le G8 et l'inciter à agir contre la pauvreté. Un fait «inacceptable» affirme Richard Bennett, président de Make Poverty Hystory, (MPH, Abolissons la pauvreté), organisateur du rassemblement d'Edimbourg. M.Bennett a rappelé devant les manifestants que «30.000 enfants, un toutes les trois secondes, meurent chaque jour à cause de la pauvreté», affirmant devant la presse que la pauvreté «(...) est totalement évitable et donc totalement inacceptable». Live 8 organisait de son côté hier à l'initiative du rocker irlandais Bob Geldof dix concerts géants dans de grandes métropoles dans le monde (huit dans les capitales ou villes du G8 à Tokyo, Londres, Berlin, Rome, Versailles - près de Paris -, Philadelphie -Etats-Unis -, Barrie - près de Toronto -, et Moscou, et deux autres à Johannesburg et en Cornouailles - sud-ouest de l'Angleterre. Dans une lettre ouverte publiée hier par le Time, Live 8 appelle le G8 à «ne pas décevoir les espoirs des pauvres» lors de son sommet en Ecosse. «Ne nous décevez pas. Ne créez pas une génération de cyniques. Ne trahissez pas les désirs de milliards de personnes et les rêves des plus pauvres de notre planète. Est-ce que ces 50.000 personnes sont autorisées à vivre ou non?», allusion au 50.000 personnes qui meurent chaque jour du fait de la pauvreté. «Live 8 a lieu pour que vous, nos dirigeants élus, dès maintenant en 2005, fassiez une percée réclamée, notamment par la Commission pour l'Afrique, dans la bataille pour éradiquer la pauvreté», indique encore la lettre. Reste seulement à souhaiter que cet espoir, suscité par la mobilisation mondiale, ne reste pas au niveau du voeu pieux. Car, l'éradication de la pauvreté dans le monde, et singulièrement en Afrique, outre une question de volonté politique, est toutefois avant tout le problème de l'organisation actuelle de l'économie et des finances internationales laquelle pénalise les pays pauvres et accentue le fossé entre les pays industrialisés et ceux en voie de développement. Les objectifs du Millenium de réduire la pauvreté dans le monde à l'horizon 2015, tel que présentés en 2000 par le sommet mondial extraordinaire au siège de l'ONU, ont ainsi de fortes chances de demeurer sans effet si, parallèlement, une révision du mécanisme monétaire issue de Brettons Wood, (réunis en 1945 à la fin de la Seconde Guerre mondiale qui organise le mode de gestion économique et financier dans le monde), n'est pas envisagée. S'attaquer à la pauvreté, conséquence d'un système monétaire inégalitaire dans son principe, sans remettre en question les causes de cette pandémie, comme le font aujourd'hui les pays riches, reste à tout le moins une vue de l'esprit et sera sans effet sur l'atténuation, a plus forte raison la suppression, de cette plaie. Ainsi, les Etats-Unis clament à qui veut les entendre, - comme le déclarait jeudi, Steve Hadley, conseiller pour la sécurité nationale de la présidence américaine-, que «les Etats-Unis sont les premiers en termes d'aides au développement et humanitaire, en donations du secteur privé et caritatives ainsi que pour le développement économique». Certes, en chiffres absolus, -l'APD (Aide publique au développement) américaine atteint 19 milliards de dollars par an- mais en réalité cela est tout à fait négligeable au regard du budget colossal américain et à la puissance économique des Etats-Unis qui demeurent loin, très loin même, -avec un pourcentage de seulement 0,16% du Produit intérieur brut-, face aux 0,87% pour des pays comme la Norvège. Certes, on peut faire dire ce que l'on veut aux chiffres, mais attention aux abus. Selon le PAM (Programme alimentaire mondial des Nations unies) qui déplore le manque de moyens pour aider l'Afrique, un Africain sur trois souffre de malnutrition et 852 millions de personnes dans le monde sont victimes de la faim, l'effort mondial restera vain et sans effet, s'il n'est pas coordonné et planifié pour le long terme et s'il ne bénéficie pas d'un suivi rigoureux. Car les dons ponctuels et bruyants resteront sans lendemain et constitueront, tout au plus, un cautère sur une jambe de bois.