L'Algérie n'a pas attendu, le moindre sou, ni aucun conseil de l'UE pour se prendre en charge et assumer son rôle de puissance régionale stabilisatrice L'Algérie a accordé 100 millions de dollars aux pays du Sahel, au moment où les 28 pays de l'UE promettent la moitié de cette somme... Le Premier ministre a répondu avec le sens de la formule qu'on lui connaît au discours «donneurs de leçons» des Européens qui, d'une manière ou d'une autre, ont fait étalage au Sommet UA-UE de leurs «soucis» d'aider l'Afrique à se débarrasser du terrorisme et enclencher le processus de son développement économique. Sur le premier sujet, Ahmed Ouyahia a rappelé, dans un point de presse en marge de la rencontre, que l'Algérie qui est africaine a déjà dépensé à elle seule plus de 100 millions de dollars d'aides directes au profit des cinq pays de la sous-région du Sahel. Le Tchad, le Mali, la Mauritanie, Niger et la Libye ont donc bénéficié d'un soutien direct de l'Algérie, à l'effet de «former une dizaine de compagnies de forces spéciales et leur donner d'énormes équipements», a déclaré le Premier ministre. Un acte concret, vérifiable et reconnu par les gouvernements des Etats concernés. Et à Ouyahia de rappeler que «l'implication solidaire de l'Algérie dans la lutte antiterroriste, dans la sous-région sahélienne, est organisée depuis plus de 10 ans à travers le Comité d'état-major opérationnel des armées (Cemoc) et d'autres mécanismes de coopération». Cela pour dire que les Européens qui disent vouloir régler un problème qu'ils ont eux-mêmes aggravé en détruisant la Libye doivent savoir que les Africains du Sahel ne les ont pas attendus pour organiser la riposte antiterroriste. D'ailleurs, le Premier ministre révèle, dans sa déclaration à la presse un chiffre parlant du soi-disant engagement de l'UE dans la lutte antiterroriste dans cette région. Prenant le soin d'affirmer que son propos est seulement «à titre comparatif et sans polémique aucune», Ouyahia note que l'Union européenne a annoncé une aide de 50 millions de dollars pour la force G5 Afrique. Retenons donc la différence. Un seul pays africain a accordé 100 millions de dollars, au moment où pas moins de 28 pays de l'UE ont déboursé la moitié de la somme. Et ce n'est pas fini. A savoir, comme le souligne le Premier ministre, «sans être sûr si elle est débloquée ou non». Ces deux chiffres illustrent parfaitement la différence entre l'action et le discours. L'Algérie n'est pas dans la phraséologie et n'a pas attendu, le moindre sou, ni aucun conseil de l'UE pour se prendre en charge et assumer son rôle de puissance régionale stabilisatrice. C'est dire que la stabilité relative de la région a un coût et l'Algérie l'a payé. Et ce n'est pas un hasard que «le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, (...) a été chargé par ses pairs africains de prendre en charge le thème de la lutte contre le terrorisme et là, nous avons partagé avec la famille africaine et le reste du monde notre expérience, non seulement de lutte contre le terrorisme avec la Kalachnikov à la main, mais aussi notre expérience de dé-radicalisation», a souligné le Premier ministre. L'apport de l'Algérie à la lutte antiterroriste en Afrique ne se mesure pas au nombre de soldats sur le terrain des opérations au Mali ou au Niger, mais à son sens politique de la nécessité de solutions inclusives à tout conflit dans n'importe quel pays. Le chaos libyen est une conséquence directe du rejet de l'approche algérienne. Sur le sujet, justement, Ouyahia a condamné les pratiques esclavagistes dans ce pays, estimant «qu'il faut avoir la justesse de vue de ne pas en accuser nos frères libyens qui ont vu leur pays détruit et qui sont en train d'essayer de recoller les morceaux». Concernant la décision euro-africaine de procéder au rapatriement des migrants clandestins, le Premier ministre met en garde contre «une opération ponctuelle» et insiste pour «faire aboutir une solution politique regroupant nos frères libyens, lesquels arriveront à recentrer un nouveau gouvernement dans l'unité nationale et la préservation de la souveraineté de ce pays frère et voisin». Les «petites» mises au point du Premier ministre viennent remettre les choses à l'endroit dans la grande messe euro-africaine où 86 chefs d'Etat et de gouvernement n'ont rien fait d'autre que de confirmer la difficulté de la situation et se promettre une meilleure lutte contre le terrorisme, ainsi qu'un engament économique européen plus efficient en Afrique. Aucune échéance, ni mécanisme concret n'ont été sérieusement élaborés lors de ce sommet, qui se contentera de ce qui a été effectivement réalisé avec le concours de l'Algérie.