L'armée avance vers Idlib Daesh ayant été irrémédiablement vaincu et l'armée et le pouvoir syriens ayant réassuré leur légitimité, Moscou et Damas vont devoir s'atteler à une reconstruction politique de la Syrie avec les factions rebelles non extrémistes, de façon à permettre la reconstruction économique. Deux mois après la reprise de Deir Ezzor, l'Armée arabe syrienne est repartie à l'assaut d'une autre région où se sont regroupés les mouvements terroristes conduits par Fateh al Cham, ex Al Nosra, branche syrienne d'Al Qaïda, la région d'Idlib. Des combats féroces se poursuivent aux environs immédiats de cette ville du nord-ouest de la Syrie où le régime syrien avait autorisé, en mai 2017, l'évacuation des rebelles de la Ghouta, d'Alep et de diverses autres villes. Hier, ce sont 66 personnes dont 19 civils, sept étant des enfants, qui ont perdu la vie dans les affrontements entre les combattants islamistes et les soldats syriens, appuyés par l'aviation russe. L'avancée de l'armée syrienne dans cette zone revêt une importance capitale car il s'agit de la dernière région qui échappait encore au contrôle de Damas. Déjà, plusieurs localités et villages situés à l'extrême sud-est d'Idlib ont été récupérés par l'armée qui balaie, au fur et à mesure de sa progression, les combattants de Fateh al Cham. D'après l'Osdh qui se résume à son seul et unique animateur Rami Abderrahmane, il y aurait eu 27 soldats syriens et 20 «rebelles» terroristes tués au cours des dernières quarante-huit heures. Tout indique que cette offensive est appelée à prendre de l'ampleur au fur et à mesure de l'encerclement d'Idlib dont l'armée compte s'emparer. C'est devenu une tradition, le mouvement des troupes syriennes est précédé par d'intenses bombardements qui visent à affaiblir les positions ennemies tandis que des messages par haut-parleurs sont adressés à la population civile pour lui demander de se barricader pour éviter des tragédies. Rares sont ceux qui tentent, d'ailleurs, de rejoindre la province de Hama car il leur faut traverser toute la région d'Idlib, avec le risque de tomber sur des réduits extrémistes habitués à les garder comme otages ou comme boucliers humains. En avril-mai dernier, Fateh al Cham était entré en conflit avec ses ex-alliés des autres groupes terroristes qu'il a vite contraints à reconnaître sa suprématie et, depuis, il contrôle la quasi-totalité de la province d'Idlib, d'où il interdisait à toute la mouvance rebelle de «discuter avec le régime syrien». Il semble que le commencement de la fin est venu pour Fateh al Cham comme pour les autres factions de la nébuleuse terroriste en Syrie. Le président Vladimir Poutine a donc raison qui a fait ces jours derniers l'éloge du rôle de la Russie dans la défaite des groupes extrémistes, avec à leur tête Daesh. «La Russie a fourni une contribution cruciale dans la défaite des forces criminelles qui avaient défié toute la civilisation, en détruisant l'armée terroriste d'une dictature barbare», a ainsi déclaré le président Poutine, au début d'une cérémonie de remise de décorations aux militaires qui ont participé à l'opération en Syrie. Ces forces «semaient la mort et la destruction (...) et aspiraient à faire de la Syrie et de ses pays voisins un terrain propice au lancement d'une agression globale visant notre pays».Allant dans le détail, il ajoute que «les équipements des jihadistes, leurs états-majors, leurs infrastructures et des milliers de combattants ont été détruits» grâce à l'intervention russe qui a mobilisé «plus de 48.000 soldats et officiers». Chiffre qui comprend des pilotes et des marins, des unités de la police militaire, des agents de renseignements et de communication, ainsi que des conseillers militaires. «Vous comme personne d'autre comprenez, savez et sentez que l'armée a changé de manière radicale au cours de ces deux ans et quelque. Elle a changé parce que les gens ont senti qu'elle était à la hauteur», a souligné Vladimir Poutine, au grand dam des observateurs et de politiciens occidentaux, notamment européens qui revendiquent leur part «importante» dans l'anéantissement de Daesh, passant sous silence le véritable but recherché qui était celui de l'anéantissement du régime syrien. Fortement engagée dans le conflit à un moment crucial où les groupes terroristes menaçaient la base navale de Tartous, essentielle à la navigation de ses sous-marins en mer Méditerranée, la Russie a toute la légitimité pour promouvoir aujourd'hui un rôle qui a, de toute évidence, été déterminant dans le changement de la donne syrienne. Grâce à la décision de Moscou, non seulement le régime syrien a retrouvé toute sa légitimité, avec une armée capable de reconquérir le territoire perdu, mais les menaces que le groupe autoproclamé Etat islamique faisait peser sur l'Irak et d'autres pays de la région ainsi que sur la Libye ont été balayées en deux années, à peine. Cela, personne ne peut le nier quelle que soit, au demeurant, sa mauvaise foi! Le conflit entre Daesh et la coalition internationale était engagé depuis 2011 sans que les bombardements ininterrompus aient permis d'entrevoir son affaiblissement. C'est fin octobre 2015, avec la décision russe de voler au secours de Damas, qu'un changement déterminant a commencé à voir le jour et que Daesh subissait, enfin, des défaites majeures successives, rendant possible les offensives des armées irakienne et syrienne. Moscou a donné à la guerre en Syrie une tout autre dimension, ce qui lui a permis d'effacer enfin la triste image de la déroute en Afghanistan, trois décennies plus tard. Dans le même temps, le monde entier a pu prendre la mesure du nouvel armement dont dispose la Russie qui retrouve, sans tambour ni trompette, le prestige dont se paraît l'armée rouge d'antan. Reste désormais la grande inconnue, comment restaurer une paix durable et consensuelle à laquelle devront souscrire tous les Syriens. Sans elle, il ne peut y avoir de reconstruction économique et, cela, Damas le sait bien qui compte fortement sur ses alliés russe et iranien et sur la contribution attendue de la Chine. Daesh ayant été vaincu irrémédiablement et l'armée et le pouvoir syriens ayant réassuré leur légitimité, Moscou et Damas vont devoir s'atteler à une reconstruction politique de la Syrie avec les factions rebelles non extrémistes de façon à permettre au plus vite la reconstruction économique dont a cruellement besoin le peuple syrien sans exclusive. Il est absurde de croire que la partie ayant été gagnée, le terrain va être cédé à d'autres puissances, pour appliquer par la diplomatie ce qu'elles ont échoué à imposer par les armes...