Nouakchott sera exclue du sommet d'Adis Abeba. Le coup d'Etat perpétré, hier contre le président mauritanien Mouaouya Ould Sid Ahmed Taya, relance le débat sur la notion de gouvernance dans le continent africain. Même si le régime du président déchu ne cadre pas avec l'idéal démocratique, il reste que sa destitution par la force est une méthode bannie par 42 chefs d'Etat du continent africain, à l'occasion du sommet de l'OUA, tenu à Alger en juillet 1999. Dans un communiqué rendu public, hier le président de la commission africaine, Alpha Omar Konaré a réaffirmé «le rejet total par l'UA de tout changement anticonstitutionnel de gouvernement et son attachement au respect de l'ordre constitutionnel». Ainsi, Nouakchott qui est de fait exclue de tout sommet de l'Union africaine, dont un sommet extraordinaire est prévu aujourd'hui dans la capitale éthiopienne, serait conformément au code de conduite de l'organisation panafricaine, évincée de ce rendez-vous. Or, depuis cette date, plusieurs pays du continent, au moins cinq ont connu des coups d'Etat, à l'image du Burkina Faso, de la Côte d'Ivoire, du Congo... et du Rwanda secoués par des coups d'Etat sanglants. Une pratique générée, non seulement par la nature des moeurs politiques de ces pays, qui depuis des décennies sont gouvernés par des régimes militaires, mais surtout de manipulations extérieures. Selon des sources concordantes ces «putschs» sont fomentés avec la complicité de certaines capitales africaines. Et là, le journal ivoirien Le Temps n'a pas hésité dans l'une de ses précédentes éditions à imputer la responsabilité des coups d'Etat perpétrés en Côte d'Ivoire, au Congo, au Burkina Faso, à l'actuel président gabonais Omar Bongo. Citant une «source de la présidence gabonaise» le tabloïd évoque le rôle «déterminant» du président gabonais à «faire descendre son homologue ivoirien comme il l'a fait avec succès, au Burkina Faso, au Congo, au Rwanda et en Côte d'Ivoire depuis décembre 1999 jusqu'à la rébellion armée du 19 septembre 2002.» Pis, le président Bongo -et cela est à prendre avec des pincettes- est présenté comme le «missionnaire mandaté de la France dans le continent africain». Il convient de rappeler que l'exemple le plus concret impliquant le président gabonais dans un coup d'Etat, c'est la prise du pouvoir au CongoBrazzaville par Denis Sassou N'Guesso, beau-frère d'Omar Bongo. Et ce, après avoir été aidé par Lissouba qui a demandé à son ethnie de voter pour Omar Bongo au Gabon. Il est clair que le continent africain riche par ses potentialités minières et énergétiques attire des convoitises tous azimuts de la part de l'étranger, qui à travers la mise en place du régime démocratique, ne cherchent en réalité qu'à faire main basse sur ces richesses. Il est même question de pots-de-vin que percevrait le président Gabonais de la part de ses «parrains». Par ailleurs, l'actuel président burkinabé, Blaise Compaoré, qui est venu à bout de son prédécesseur, Thomas Sankara il y a une dizaine d'années, a été présenté comme le relais d'Omar Bongo en Afrique de l'Ouest. Cependant, le cas Bongo n'est pas unique sur le continent, puisque plusieurs autres chefs d'Etat ont été accusés, à l'image du dirigeant libyen, d'être derrière plusieurs tentatives de coups d'Etat. Kadhafi a en effet été accusé par le président mauritanien déchu d'être derrière ces tentatives de putschs, notamment d'avoir soutenu les auteurs de ces tentatives. En somme, même si une conspiration n'est pas à écarter dans les coups d'Etat successifs, il reste que le continent africain est prisonnier d'une situation sociale et politique des plus désastreuses. Rappelons enfin que le continent en a connu une vingtaine depuis 1993, dont sept depuis 2003.