Ils sont là plus nombreux que n'importe quelle autre année. Nos compatriotes sont arrivés en force cette année. Le retour de la sérénité aidant, nos compatriotes émigrés sont rentrés au pays, leur pays, qui, pour voir ses parents et amis qui, pour passer un séjour de vacances loin du vacarme des villes européennes. Du coup tout change et prend d'autres couleurs aussi bien dans les villages que dans les villes, un bouleversement total s'est produit dans les moeurs et les habitudes donnant lieu à une animation nouvelle qui diffère manifestement de celle de tous les jours. Les rues s'animent. Les échanges commerciaux s'amplifient. De ce fait, il y a encombrement partout, dans les marchés, dans les boutiques et bien sûr, dans les rues et sur les routes. Les plages ne désemplissent pas non plus. Ils sont reconnaissables à leur démarche, leur tenue vestimentaire, l'immatriculation de leurs véhicules et surtout leur façon de parler. Le français devient première langue depuis le début juillet. Même les gens d'ici s'amusent à user de la langue de Molière. C'est véritablement la ruée cette année. Une ruée qui n'est pas sans conséquence sur le quotidien des citoyens de Basse Kabylie. De la gêne pour certains si l'on considère les répercussions sur le quotidien. Ne comptant pas ses sous, comme il le fait si bien en France ou ailleurs, l'émigré ne marchande pas et prend tout à n'importe quel prix. Une aubaine pour les commerçants locaux qui n'hésitent pas à gonfler les prix allant jusqu'à changer de comportement. On devient plus souriants et surtout plus attractifs. Partant c'est toute une activité économique qui prend son envol. La valeur de l'euro est telle que les émigrés se trouvent dans des situations des plus confortables. L'émigré d'aujourd'hui ne ressemble en rien à celui des années 70-80. Les habitudes ont bien changé. Si par le passé l'émigré était cet homme qui se privait tout au long de l'année pour économiser en vue de construire une maison au village, de rafistoler l'ancienne, de nos jours, il arrive en touriste pour dépenser, visiter et surtout profiter de la mer et du soleil qui lui manquaient tant en Europe. Du coup, il est là à dépenser sans compter et bouger sans arrêt bouleversant ainsi à bien des égards le quotidien des locaux. «C'est un peu normal! ils sont en manque et ils ont les moyens», notait hier un citoyen de la ville de Béjaïa. Farid est arrivée de Lyon, deuxième ville française. Cela fait longtemps qu'il n'est pas venu en raison de la situation sécuritaire. Il est si heureux d'être là qu'il ne tient plus en place. A la joie de retrouver les siens, ses anciens camarades de classe, s'ajoutent cette aisance financière et surtout une grande disponibilité de produits. Alors il devient le riche d'un mois. Chaque jour, il va à la mer. Il fait profiter les petits villageois de sa famille. Pour lui, rien n'est cher ; ici avec ses 1000 euros, il obtient jusqu'à 12 millions de centimes algériens, alors se faire plaisir, il ne s'en prive pas. Sa voiture n'a jamais roulé aussi longtemps que depuis qu'elle est là. Normal, avec un euro, il a le plein de gasoil. Comme Farid, ils sont des milliers à profiter de vacances royales. Les commerçants locaux ne peuvent que se satisfaire de cette ruée. «Depuis le début juillet, j'ai triplé mon chiffre d'affaires», affirme ce boucher de la rue de la Liberté. En face, c'est le marchand d'électroménager qui affiche un sourire qui en dit long sur la bonne santé de ses affaires. Il vend beaucoup d'articles et sans crédit. «Le commerce marche bien depuis que les émigrés sont là», soutient-il avec un large sourire. Partout la joie se lit sur les visages des marchands. L'émigré d'aujourd'hui a changé ses habitudes, il est devenu un grand consommateur. Les véhicules qu'il ramène de France ne repartent jamais vide. Il s'approvisionne d'ici en produits de tous genres. «C'est moins cher ici!» explique ce jeune émigré, rencontré avec sa fiancée dans un magasin spécialisé dans le matériel de réception satellitaire. «Je cherche un démodulateur pour réceptionner gratuitement TPS en France». Il s'est bien imprégné des habitudes locales. L'engouement pour ces appareils était tel l'an passé que la direction de TPS avait changé plusieurs fois les codes de réception. Dans les villages la vie s'anime. Les filles émigrées sont toutes convoitées plus que jamais. Pouvait-il en être autrement lorsqu'on sait qu'elles peuvent offrir une résidence permanente en France. Court-vêtues, elles suscitent désapprobation mais aussi la joie, c'est selon. Elles sont là à flâner sans complexe dans les rues de la ville et les ruelles des villages. Du coup, les jeunes du village se font plus beaux, plus gentils. Les tabous se cassent un par un. Le tout dans une ambiance festive. Bref, en l'espace de deux mois, la Basse Kabylie aura vécu des journées intenses et riches en animation. Les émigrés sont là, tout le monde se retrouve. Des liens se tissent. Il se trouvera toujours des jeunes à qui sourira la vie. Bonnes vacances à tous et à toutes, c'est là notre souhait. Quant au reste, c'est la vie qui évolue pourvu que ça aille dans le bon sens.