Aux portes sud-ouest de l'Algérie se déroulent des événements, qui, le moins qu'on puisse dire, dégagent de forts relents de «complotite» mâtinée aux intrigues politico-religieuses. La libération de plusieurs leaders islamistes mauritaniens commencent à faire remonter à la surface les traces des complots passés et à venir. Plusieurs activistes des «Cavaliers du changement», vaste mouvement constitué de militaires et de salafistes djihadistes , et des mouvements islamistes locaux accusent aujourd'hui ouvertement le régime Mouawiya Ould Sid Ahmed Taya de les avoir mis en prison, torturés et obligés de faire des aveux qui confirmeraient leurs liens avec le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc), puis leur connexion, via le groupe islamiste algérien, avec l'organisation Al Qaîda. Selon les aveux de Mokhtar Ould Mohamed Moussa, une des figures islamistes les plus importantes en Mauritanie, et qui a été libéré au lendemain du putsch3/8 «le régime Mouawiya Ould Taya a torturé les imams et les oulémas et réprimé sauvagement les islamistes qui n'ont jamais appelé au djihad, et qui ont toujours dénoncé la violence». Moussa, qui était notamment l'ambassadeur de Mauritanie aux Emirats arabes unis, a également confirmé que tous les islamistes qui avaient été accusés d'appartenir au mouvement salafiste ont été brutalement et sauvagement torturés et contraints de dire qu'ils appartenaient à une organisation djihadiste activant hors de la Mauritanie, allusion faite au Gspc algérien. De son côté, le leader islamiste Mohamed Al-Hacène Ould Deddou, qui a été lui aussi élargi par le nouveau régime de Mohamed Vall, confirme cette thèse: «L'ancien régime a accusé tous les opposants de faire du terrorisme (...) et c'est justement ce genre de procédés injustes et totalitaires qui créé le terrorisme et engendre une jeunesse prête à se faire exploser». Ould Deddou précise aussi que «la chute du régime Ould Taya tombe à pic, et qu'il est temps pour les islamistes modérés de participer à une véritable transition démocratique susceptible de faire pièce aux extrémismes et de créer un climat propice à la réconciliation». Revenant sur les événements liés au Gspc, il ajoute: «La Mauritanie n'a pas vécu des attentats suicide mais cela n'a pas empêché le régime Ould Taya d'accuser certains opposants d'héberger et d'entraîner des hommes liés à Al Qaïda en Algérie (...). En fait, il existe dans les prisons mauritaniennes plusieurs islamistes accusés de constituer des réseaux terroristes locaux en liaison avec les salafistes». Le putsch de Vall a permis la libération de 21 islamistes considérés comme modérés, et qui croupissaient dans des cellules mauritaniennes depuis le 25 avril 2005 aux chefs de complot contre l'autorité de l'Etat, actes de subversion et terrorisme. Des sources locales estiment le nombre d'islamistes encore en détention à 50, tous accusés de complot, dans un pays où la «complotite» est le maître-mot dans les cercles de décision. L'attaque meurtrière lancée contre une caserne militaire de Lemgheity, à 400 km de Zouérate, aux frontières algéro-mauritaniennes avait été imputée au Gspc, et le gouvernement Ould Taya avait parlé de 150 hommes qui auraient perpétré l'attaque sanglante du début juin 2005, et qui a fait 18 morts et 20 blessés parmi les soldats mauritaniens. L'Algérie avait été directement visée d'être le couloir de transit de ces 150 hommes, équivalent d'une compagnie et demie. La confirmation par le Gspc de l'attaque sur son site internet ajouta foi aux allégations officielles, alors que tout le monde sait qu'il était devenu de l'ordre de l'invraisemblance de parler de 150 hommes se déplaçant dans le Sahara algérien vers Zouérate. Tout cela faisait un peu gros, car s'il y a réellement - de l'avis même des experts militaires américains - des frontières bien gardées dans le vaste univers constitué du no man's land sécuritaire sahélo-saharien, ce sont bel et bien celles de l'Algérie. Ensuite, tous les connaisseurs vous diront que les groupes armés se déplacent au sud par groupes de 15-20 personnes, jamais plus. Enfin, il y a à dire que le régime de Nouakchott possède ses islamistes, ses radicaux, ses djihadistes et ses salafistes sans lesquels rien n'est possible à l'intérieur de la Mauritanie. L'Algérie, tout autant que le Maroc ou l'Egypte, reconnaît l'existence de radicaux sur son sol, les combat et les défait, sans qu'il lui soit permis de les nier ou de les connecter au Niger ou au Mali, car la gestion d'un pays passe aussi par la gestion de ses crises.