La question se pose en effet, si l'on excipe de la prétention des Etats-Unis de gérer le monde selon leurs normes et, certes, à leur convenance et bénéfice. Cela est encore plus évident avec l'accession à la présidence des Etats-Unis du milliardaire de l'immobilier, Donald Trump, dont le programme de politique internationale se réduit à retirer les Etats-Unis des accords qui, selon lui, ne font pas, ou ne feraient pas, la part belle aux prétentions des Etats-Unis, ou n'obéissent pas à la vision que Washington se fait des rapports entre les nations, marquée par la soumission à la puissance états-unienne. C'est dans ce contexte que le président Trump retira successivement son pays de l'accord de Paris sur le climat - consensus mondial emblématique pour lutter contre le réchauffement climatique [dont l'un des responsables n'est autre que les Etats-Unis] - de celui commercial transpacifique, et menace d'en faire de même avec l'accord sur le nucléaire iranien, présentant, selon lui, de «terribles lacunes». Dès lors, la question se pose: «Y a-t-il une vie sans Washington?» La réponse est venue de Santiago du Chili, où onze pays du Pacifique se préparent à signer l'accord transpacifique (TPP) qu'ils ont repris à leur compte, sans les Etats-Unis. Aussi, sans les Etats-Unis, la terre continue à tourner, le monde à travailler et les Etats à agir. C'est ce qui ressort du nouvel accord transpacifique qui sera signé aujourd'hui par onze pays de cette immense région du sud de notre planète. En effet, après le retrait des Etats-Unis de l'accord de libre-échange transpacifique (TPP), celui-ci a été donné pour mort. Or, voilà que cet ensemble économique ressuscite à l'initiative des pays asiatiques, océaniens et américains, membres du précédent accord, blackboulé par Trump. En fait, ce n'est pas seulement dans le secteur commercial que le président Trump fait tout faux, mais également en diplomatie et en politique internationale où les Etats-Unis perdent de plus en plus pied, restant sur une vision hégémoniste du monde, hors de raison. Il en est ainsi de la guerre de Syrie, où Washington a perdu une occasion inespérée de montrer son souci de travailler pour la paix, en écourtant les souffrances du peuple syrien par leur participation à l'initiative initiée par la Russie, la Turquie et l'Iran. Ces trois pays ont créé le «processus d'Astana» (Kazakhstan) qui doit à terme mettre face à face les belligérants syriens. Même les plus sceptiques, qui n'y croyaient pas, admettent désormais que la question syrienne se clarifie peu à peu en sus du fait que depuis une année les combats ont baissé d'intensité depuis la création de «zones de désescalade». Washington n'a pas su saisir cette opportunité, dès lors que son objectif était, et reste, celui d'écarter l'actuel régime à Damas pour y installer un pouvoir à sa dévotion, du moins qui lui soit proche. Ainsi, à Astana, la preuve est faite que le monde peut se passer des Etats-Unis dans les grands dossiers géopolitiques, Washington étant de fait marginalisé dans le conflit syrien, discréditant en outre une rébellion qui attend de l'Occident qu'il l'installe au pouvoir à Damas. Alors que des pays font des grands efforts pour rapprocher les positions des parties syriennes, afin de trouver une solution équitable à la crise, les Etats-Unis exigent le départ du président syrien, Bachar al-Assad, décidant ainsi à la place du peuple syrien de qui doit diriger la Syrie. Dans le même ordre d'idées, le même Trump qui promettait de régler le conflit israélo-palestinien durant «son mandat» présidentiel, a de fait exclu les Etats-Unis de tout processus de paix à venir dans le dossier palestinien. De fait, les Palestiniens, longtemps dupes, n'acceptent plus le parrainage de Washington, qui a clairement montré son parti pris pour Israël, par la décision de transfert de l'ambassade des Etats-Unis à El Qods occupée. Plutôt que de mettre fin au conflit qui dure depuis 70 ans, Trump l'a bloqué pour un temps encore indéterminé. Ce que ses prédécesseurs ont accompli avec plus ou moins d'habilité- faire garder l'initiative aux Etats-Unis sur ce dossier - Trump l'a rendu caduc en voulant d'emblée imposer sa «solution» - de fait la «solution» préconisée par Israël - comme seule alternative. Alors que ses maladresses mettent les Etats-Unis en porte-à-faux, Trump ouvre un nouveau front, celui du commerce international, mettant frontalement au défi ses alliés européens et ses partenaires étrangers - la Chine en particulier - en décidant de taxer l'acier et l'aluminium. Nous ne mentionnons même pas le «dégel» inter-coréen sans l'intervention des Etats-Unis. Il est patent que le monde se porterait mieux sans (le diktat des) les Etats-Unis.