Le président de la République a demandé jeudi à la France de reconnaître ses torts durant la colonisation. Désormais, le chef de l'Etat ne rate aucune tribune pour remettre les pendules à l'heure à propos des tentatives françaises visant à blanchir le passé colonial de ce pays. Surtout quand cette tribune n'est autre que celle du stade du 8-Mai 1945 de Sétif. Une date symbolique pour l'histoire nationale. Intervenant devant un large parterre à l'occasion de sa seconde sortie sur terrain, Abdelaziz Bouteflika a précisé qu'il n'y a pas d'autre choix pour la France que de reconnaître ses fautes. «Nous rappelons à nos amis en France, à ceux dont la conscience est encore vive, qu´ils n´ont pas d´autre choix que de reconnaître qu´ils ont commis des fautes à l´encontre du peuple algérien depuis 1830», a-t-il clamé. «Il était impératif pour l´ancien colonisateur de reconnaître ses erreurs et les massacres commis contre les populations algériennes» a souligné le chef de l'Etat. Pour le chef de l'Etat, ceux qui ont voulu anéantir l'identité algérienne dans sa triple dimension, doivent reconnaître qu'ils ont torturé, tué et exterminé le peuple algérien de 1830 à 1962, comme ils l'ont fait avec le peuple malgache, même si la souffrance du peuple malgache est de moindre proportion par rapport à ce qu'a enduré le peuple algérien. De ce fait, le peuple algérien mérite plus une repentance de la part de la France que les Malgaches, ajoute le président révélant qu'il y aurait «des initiatives de l´ancien Etat colonial visant à demander pardon aux populations de Madagascar». Ainsi Abdelaziz Bouteflika re-exige de la France officielle une reconnaissance de sa responsabilité dans les crimes commis lors de la colonisation, de 1830 à 1962, notamment les massacres du 8 mai 1945 perpétrés à Guelma, Sétif et Kherrata, et de demander pardon aux Algériens à l'approche de la signature d'un traité d'amitié entre les deux pays et dont la ratification devrait se faire avant la fin de l'année. Réagissant au discours du président, la France officielle tente de se voiler la face et adopte un profil bas. Le travail de mémoire sur la colonisation française de l´Algérie (1830-1962) «relève de la compétence des historiens», a déclaré hier, le ministère français des Affaires étrangères. De son côté, Jean-Baptiste Mattéi, porte-parole du Quai d'Orsay, a soutenu: «Nous considérons que le travail qui est relatif aux questions de mémoire relève de la compétence des historiens et des chercheurs qui doivent travailler ensemble sur ces questions en toute indépendance». Sans commenter les propos du président Bouteflika, le porte-parole du Quai d'Orsay a reconnu, néanmoins, que «ces questions seront abordées d'une façon ou d'une autre», avant de réaffirmer que «les discussions se poursuivent pour la signature d´un traité d´amitié avec l´Algérie dans les délais envisagés, c´est-à-dire d´ici la fin de l´année». Est-ce à dire que la France officielle n'attend que la reconnaissance des historiens de sa responsabilité dans les massacres perpétrés en Algérie pour se repentir et de reconnaître ses crimes de guerre pour laver sa conscience devant l'histoire? Tout porte à le croire à en juger les différentes déclarations des officiels français. Et comme le soulignait le maire de Paris, Bertrand Delanoë, lors de sa visite à Alger: «Et puis, parce que l'histoire est le courage de la vérité, c'est le seul moyen d'être debout ensemble». Apparemment, c'est ce qui manque le plus.