C'est à un débat chaud qu'a eu droit l'assistance venue écouter les interventions du ministre des Participations Abdelhamid Temmar et Abdelatif Benchenhou, l'ex-ministre des Finances. Ce dernier qui a présenté une communication ayant pour thème «La croissance économique en Algérie: ressources et politiques», a profité de la tribune de l'université d'été du FLN ouverte depuis hier à Boumerdès, pour revenir sur ses dernières fonctions au sein du gouvernement. Un tantinet critique envers ses collègues, voire virulent pour ses détracteurs, il est s'est expliqué sur les décisions qu'il a prises durant son précédent mandat ministériel. «On m'a accusé d'être un ministre d'épargne et non de production», a-t-il ironisé. «Je suis pour les dépenses publiques et non pour la gabegie et le gaspillage.» L'ex-ministre est également revenu sur le Fonds de régulation qui a atteint plus de 600 millions de dollars. «Je tiens, a-t-il martelé, à préciser que ce fonds doit être maintenu». Et d'ajouter: «Je ne critique pas pour critiquer mais il faut être franc et honnête. L'Algérie, a-t-il indiqué, a besoin d'une croissance plus forte pour des raisons économiques, démographiques, sociales et de sécurité. Pourtant le débat sur la croissance est faible» Pour l'orateur, la situation est paradoxale: «Le débat public, a-t-il insisté, est foncièrement politique. Le débat économique est marginal et souvent superficiel en raison de son caractère nécessairement technique et parfois difficile.» Cependant, il l'explique par «la crise sociale majeure des années 90 qui a imposé une approche d'abord politique dans la solution à la crise et qui explique en particulier la démarche actuelle en faveur de la réconciliation nationale». Abdelatif Benachenhou estime que rien n'est perdu «car la situation n'est pas durable en raison de l'ouverture de l'économie algérienne qui appelle des mesures de réorganisation et de régulation nouvelles en rupture importante avec le passé aussi bien dans la sphère publique que dans le monde des entreprises». Concernant les ressources financières disponibles pour financer l'investissement, le ministre a affirmé que «l'épargne privée est croissante et concerne les ménages et les entreprises, en particulier privées, ce qui est important pour une croissance stable. Quant à l'épargne publique, elle est importante essentiellement en raison de l'évolution des prix du pétrole et moins en raison de la maîtrise de la dépense publique». Sur le registre de l'investissement étranger, l'ex-ministre a vivement critiqué le flou qui entoure ce volet à cause «des signaux contradictoires. On ne peut pas freiner et en même temps appuyer sur l'accélérateur», a-t-il dit d'un air moqueur. Pour sa part, Abdelhamid Temmar a fait un exposé des plus dogmatiques avec un retour sur l'historique des réformes et les privatisations arguant du fait que «la stabilité économique est tributaire de la stabilité du pays», référence à la réconciliation nationale que le FLN défend bec et ongles. Les interventions des participants étaient très intéressantes, notamment celle du ministre de la Santé Amar Tou, qui a posé un certain nombre de questionnements allant jusqu'à titiller les nerfs de ces collègues. Il évoqua la gestion des carrières, le retard dans les réformes. Des flèches qu'il décocha non sans susciter une gêne. «On connaissait Temmar plus courageux mais aujourd'hui, il est peureux», lança Amar Tou à l'adresse de Temmar. L'autre intervention encore plus pertinente est celle du Dr Nacereddine Sadi, expert en économie appliquée invité par la direction du parti pour apporter un avis contradictoire. Il a assailli de questions le ministre des Participations qui a éludé ces tirs groupés. «Après 17 ans de réformes, la situation économique est au statu quo. L'Algérie compte près de 12 millions d'Algériens qui vivent en dessous du seuil officiel de pauvreté, dont plus de 2 millions vivent une pauvreté extrême (avec toutes les dérives socio-psychologiques et d'informalisation de l'économie qui nourrit la famille. La transformation des droits de propriété reste à l'état de théorie et d'annonces irréalistes sans lendemain», a critiqué l'économiste. Belkhadem en intervenant a estimé que le débat restait ouvert.