Le tandem se prépare pour la fête du 12 mai Tout le tapage organisé autour de l'affaire, lundi dernier, n'a pas d'autre but que de conforter la stratégie du président américain, allié inconditionnel de l'Etat sioniste et partisan d'une Jérusalem dont les Israéliens seraient les seuls maîtres en dépit du droit international. Pressé d'offrir au président américain Donald Trump des arguments massues pour justifier la décision qu'il martèle depuis son élection sur le rejet de l'accord nucléaire avec l'Iran, Israël a entrepris dès lundi de communiquer aux capitales occidentales la masse d' «informations» soi-disant recueillies par son service d'espionnage en activité sur le sol iranien, si l'on en croît le Premier ministre de l'Etat hébreu. Il semble que cette initiative n'ait pas eu l'effet escompté car plusieurs capitales, et en particulier, Paris et Londres, ont accueilli avec circonspection les «preuves» israéliennes, rappelant leur attachement à l'accord conclu en 2015 et donc écartant le moindre doute quant à un changement de leurs positions respectives, comme l'espérait Netanyahu. En somme, la sortie théâtrale du chef du Likoud, habitué du genre, n'aura pas fait bouger les lignes qui opposent Américains et Européens sur le dossier, malgré le show télévisé auquel s'est livré Netanyahu à douze jours exactement de l'officialisation de la décision du président Trump, une officialisation dont tout indique qu'elle va peser lourdement sur le devenir de l'accord garantissant l'usage strictement civil du nucléaire iranien. D'ailleurs, la réaction lundi soir du président Trump est suffisamment éloquente: «Ce qui se passe aujourd'hui et ce qui s'est passé récemment et ce que nous avons appris montre vraiment que j'ai raison à 100%», a-t-il tenu à surenchérir, saisissant à point nommé l'opportunité offerte par son ami Benjamin Netanyahu qui, pour sa part, va au-delà de l'exigence d'un nouveau texte remédiant «aux terribles lacunes» du précédent et souhaite, ni plus ni moins, qu'une expédition punitive contre l'Iran de nature à détruire ses ambitions régionales. Tout le tapage organisé autour de l'affaire, lundi dernier, n'a pas d'autre but que de conforter la stratégie du président américain, allié inconditionnel de l'Etat sioniste et partisan d'une Jérusalem dont les Israéliens seraient les seuls maîtres en dépit du droit international et des accords antérieurs. Peu importe aussi bien pour Trump que pour Netanyahu que la France vienne considérer que la déclaration de Netanyahu renforce la «pertinence» de l'accord, au lieu de le compromettre comme le voudraient les deux ennemis jurés de l'Iran, désigné dès la fin 2017 comme le pays à abattre, après l'Irak et la Syrie à cause de sa rhétorique en faveur du droit inaliénable du peuple palestinien. Cet accord laborieusement conclu entre l'Iran et les grandes puissances (Etats-Unis, Russie, Chine, Grande-Bretagne, France, Allemagne) ouvrait la porte à une levée progressive et conditionnelle des sanctions internationales qui avaient été imposées au pays sous la condition d'une assurance qu'il ne se dotera pas de l'arme atomique. Arme que seul Israël, exempté d'une adhésion à l'Aiea et du moratoire sur la dénucléarisation, s'arroge le droit de posséder pour dominer le Moyen-Orient. Chargée de veiller au respect des engagements souscrits par l'Iran, l'Agence internationale de l'énergie atomique (Aiea) a constamment certifié le strict respect de l'accord par le gouvernement iranien. Et c'est pourquoi, réagissant à la pseudo révélation de Netanyahu, la cheffe de la diplomatie de l'Union européenne Federica Mogherini, a déclaré que les documents brandis par les Israéliens doivent être analysés en premier lieu par l'Aiea, non sans souligner au passage que le Premier ministre israélien n'a, à aucun moment, remis en question le respect de l'accord par Téhéran. L'Iran qui a multiplié, pendant des mois, les démentis face aux accusations israélo-américaines, devenues cycliques, a réagi en qualifiant Netanyahu de «menteur invétéré». Il faut dire que le show du Premier ministre sioniste rappelait singulièrement le cinéma de Colin Powell lorsque les Etats-Unis préparaient l'opinion internationale à l'invasion de l'Irak, avec des arguments tout aussi fallacieux dont on saura, quelques années plus tard, qu'ils étaient le fruit de mensonges délibérés et éhontés. En affichant lundi soir ses «preuves» comme autant de «prises exceptionnelles» obtenues par les espions israéliens à Téhéran même, et surtout en les affublant d'une crédibilité peu convaincante sur le prétendu plan secret mis en oeuvre par l'Iran afin de se doter de l'arme nucléaire, Netanyahu, tout droit sorti des castings de Hollywood, pouvait trôner devant des classeurs et des CD contenant, affirmait-il, une centaine de milliers de documents. Comme ce n'est pas la première fois qu'il se livre à de telles exhibitions, témoin la sortie avec un morceau de missile iranien censé avoir abattu le F15 israélien après une attaque en Syrie, on peut être parfaitement d'accord avec le journal israélien Maariv quand il le présente dans «le show de sa vie». Sauf que, comme en Irak, ce sont peut-être des centaines de milliers de vies qui peuvent être suspendues au résultat de ces sorties de saltimbanque que l'histoire retiendra comme autant d'actes inqualifiables, s'ajoutant aux exactions commises à l'encontre des Palestiniens. Israël a tout intérêt à faire prévaloir ses convictions en accusant l'Iran de poursuivre le développement de son dispositif nucléaire pour produire la bombe atomique dans le cadre du projet Amad. Celui-ci a été mis de côté au lendemain de l'accord de 2015, mais pour l'Etat sioniste, une organisation parallèle mais avec le même personnel serait en activité secrète en vue de sauvegarder l'expérience acquise et renforcer les capacités nucléaires de la République islamique. En fait, pour certains experts, Israël a ressorti opportunément les éléments concernant le projet Amad tel qu'il se trouvait en 2015, quitte à en surestimer certains paramètres pour mieux porter l'estocade en ce moment crucial. Le discours du Premier ministre sioniste obéit au vieil adage qui consiste à se demander «à qui profite le crime», le crime en l'occurrence étant cette tentative de manipulation de l'opinion internationale et principalement occidentale pour prendre date le 12 mai prochain, voire beaucoup plus tard. Le crime, c'est de prétendre qu'on ne doit pas faire confiance à l'Iran comme si Netanyahu était un modèle d'honnêteté, ne serait-ce que sur le plan des multiples affaires de corruption et d'autres casseroles qu'il traîne et dont il parvient à s'extraire en surenchérissant sur l'usage de la violence envers les Palestiniens et la poursuite de la colonisation sauvage de leurs terres. En affirmant que l'accord nucléaire de 2015 «repose sur des mensonges», il commet le plus gros de ses propres mensonges, mettant mal à l'aise certaines capitales occidentales qui ne sont pas aussi inconditionnelles que le président Trump vis-à-vis de sa politique. Et quand il tranche que c'est «un accord terrible qui n'aurait jamais dû être conclu», tout en se disant «confiant que Trump fera le bon choix», il n'a trouvé que le tout nouveau secrétaire d'Etat, directeur de la CIA, il y a juste un mois, Mike Pompeo, pour chanter avec lui la ritournelle. Quant à la Maison-Blanche, après avoir écrit que «l'Iran a un solide programme d'armes nucléaires clandestin», elle a vite corrigé son communiqué pour mettre le verbe avoir au passé.