Le sport de haut niveau se prête aujourd'hui à tous les excès. L'usage massif et généralisé de substances interdites conjugué à une foule de pratiques illégales polluant l'ensemble des disciplines à tous les degrés de la compétition rendent la problématique ardue. Les scandales, qui ont émaillé le fonctionnement de nombre d'institutions sportives nationales et internationales au cours de ces dernières années, témoignent de l'ampleur de la crise. Beaucoup de choses ont été dites à propos de l'utilisation de produits anabolisants dans le sillage de l'affaire Saïdi Sief. La recherche effrénée de la performance a conduit des champions en quête de promotion sociale à hypothéquer leur santé et leur avenir. Maladies suspectes et morts précoces sont le lot des héros du stade. Les succès sportifs, à de rares exceptions, nous renvoient au revers de la médaille: le sport spectacle avec ses exigences et ses dérives. L'influence des milieux maffieux dans le sport a été amplement établie par les enquêtes journalistiques et policières. Les autorités sportives ont longtemps adopté la position de l'autruche mais aculées par les révélations et scandales à répétition, elles se mettent à réagir. L'argent du sport brasserait, selon une étude un chiffre d'affaires de 2.500 milliards de francs. C'est pourquoi, il attire toute une faune d'affairistes. Le sport excite à présent la convoitise du crime organisé. Russes, Italiens, Polonais, Américains... se taillent la part du lion. Le trafic de produits dopants est devenu une véritable industrie dont les revenus annuels atteindraient 50 milliards de francs français. La sérieuse revue Capital estime, pour sa part, à plus de 35 milliards de francs les sommes générées par les quatre produits stars du dopage: EPO, anabolisants, hormones de croissance et compléments nutritionnels, vendus librement dans de nombreuses officines sur simple ordonnance médicale. Sandro Sonati, le grand spécialistes italien de la lutte antidopage, remarquait dans un rapport que la production d'hormones de croissance sur le marché mondial était supérieur à la demande «justifiée». Certains sites Internet basés aux Bahamas, Panama ou Trinidad, des paradis fiscaux, proposent toute une panoplie de produits dopants envoyés par colis. S'agissant des compléments alimentaires fabriqués ou commercialisés en France, une récente enquête a démontré que plus de 3.800 d'entre eux présentaient des anomalies d'étiquetage et contenaient des ingrédients non autorisés, c'est de cette façon que Saïdi Sief s'est fait piéger. Les apprentis-sorciers de la biochimie ont même trouvé la parade pour compenser la «détectabilité» de l'EPO: la RSR 13 utilisée en chimiothérapie. Le sport de haut niveau en butte au phénomène pernicieux du dopage affronte un autre ennemi qui est bien tapi au sein des structures sportives internationales: la corruption. Le CIO et les fédérations affiliées dont notamment la FIFA n'ont pas résisté à l'appel des sirènes de la finance. Des hiérarques du sport international comme Samaranch, le président du CIO, Sepp Blatter, le patron de la FIFA ou Hein Verbruggen le numéro 1 de l'Union cycliste international sont suspectés de mauvaise conduite. Les rumeurs de corruption, qui ont couru au sujet de la désignation de Salt Lake City pour l'organisation des Jeux olympiques d'hiver, l'incapacité de l'UCI à juguler le fléau du dopage dans le milieu du cyclisme et la faillite de la boîte ISL (International sport et Leisure), un des piliers du sport business et principal agent marketing des coupes du monde depuis 1982, ont jeté le discrédit sur ces instances. La bataille autour des droits de retransmission pour les télés constitue un autre versant des pratiques occultes qui agitent la sphère sportive mondiale. Les sponsors passés maîtres dans l'art de la séduction font dans la surenchère pour doper audience et recettes. Leur cible: les dirigeants et les athlètes. C'est ainsi que le sport de haut niveau, mêlé à toutes les sauces de la magouille, est en train de perdre son âme. Une âme que le père de l'olympisme moderne, le baron Pierre de Coubertin a voulu préserver des tentations matérielles.