L'absence de consensus sur le projet de réforme du Conseil de sécurité remet aux calendes grecques l'accès du continent noir à l'organe exécutif de l'ONU. Aujourd'hui s'ouvre au siège de l'ONU à New York une assemblée mondiale de laquelle était beaucoup attendu, pour redonner aux Nations unies le label d'organe représentatif de l'ensemble des communautés de la planète. Il semble, à en croire les échos qui parviennent du siège de l'ONU, que ce n'est pas encore demain que cette institution deviendra l'organisme stabilisateur de la communauté mondiale sachant aussi se faire entendre par ses Etats membres. Les ambitions des uns, le monopole des autres, semblent en avoir décidé autrement. La réunion qui s'ouvre aujourd'hui, à laquelle sont annoncés quelque 150 chefs d'Etat et de gouvernement - dont le président de la République Abdelaziz Bouteflika - s'ouvre sous des auspices incertains devant la persistance des divergences sur de nombreux points de négociations entre les diplomates présents depuis trois semaines à New York. Ceux-ci tentaient, hier encore, de trouver des points d'accord permettant de dépasser les litiges sur certaines des questions soumises à l'examen - celles relatives à la réforme du Conseil de sécurité, de l'administration du secrétariat général, la définition du terrorisme, les droits de l'homme et le développent notamment - sur lesquelles achoppent les négociations entamées depuis trois semaines. On tentait donc hier de sauver le sommet mondial de l'échec annoncé. Pour Washington, l'échec est d'ores et déjà consommé sur des points clés en discussion, tels les droits de l'homme et la réforme de l'administration du secrétariat général de l'ONU sur lesquels il n'y aurait pas eu d'accord. Par ailleurs, les Etats-Unis accusaient les pays du tiers-monde et le groupe des 77 notamment, d'être à l'origine du blocage, mais de nombreuses délégations mettaient à leur tour en cause le diktat des Etats-Unis qui ont imposé une méthode de travail consistant à négocier point par point le document final, ouvrant ainsi la voie, accusent ces délégations, à toutes les surenchères. De fait, un document remanié, où plusieurs articles se trouvent entre parenthèses (c'est-à-dire sur lesquels un accord n'a pu se faire), doit être présenté pour adoption aà plus de 150 chefs d'Etat et de gouvernement lors du sommet de trois jours qui s'ouvre aujourd'hui. De fait, les soucis des diplomates étaient hier d'arriver à présenter un texte suffisamment consistant et qui ne soit pas trop en décalage par rapport à l'ambitieux projet du secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, tel qu'il l'exprimait lors de la conférence du Millénium en septembre 2000. Dans cette situation de blocage général, et de quasi-remise aux calendes grecques du projet de réforme du Conseil de sécurité, ce sont encore les Africains qui vont devoir payer les pots cassés en étant condamnés à patienter encore avant de voir le continent noir remis dans ses droits en accédant à un ou des siège(s) permanent(s) au Conseil de sécurité. L'Afrique, faut-il le souligner, est le seul continent à n'avoir pas de représentants au niveau de l'instance exécutive des Nations unies. Dans cette affaire, c'est encore l'Afrique qui est pénalisée, du fait que de nombreux pays africains en privilégiant des intérêts nationaux étroits, ont faussé la stratégie de l'Union africaine laquelle revendiquait des sièges au nom de l'Afrique, alors que nombre de pays (exactement neuf, dont le Nigeria, l'Afrique du Sud et l'Egypte) se sont portés candidats aux éventuels sièges qui auraient été octroyés au continent noir. L'Union africaine demandait notamment deux sièges pou l'Afrique dotés du droit de veto, mais des pays faisant passer leur intérêt particulier avant celui de l'Afrique étaient prêts à abandonner l'exigence du droit de veto tel que demandé par l'UA et à composer avec le G4 (Allemagne, Brésil, Inde et Japon), également candidat aux sièges permanents, dont les membres renonçaient au droit de veto. Aussi, il était devenu patent qu'aucune avancée ne pouvait se faire, lors de ce sommet, sur l'élargissement du Conseil de sécurité, quand le promoteur de l'augmentation du nombre de membres du Conseil, Kofi Annan, s'est fait une raison en «espérant» un accord «d'ici la fin de l'année», reconnaissant toutefois que le projet risque aussi d'être reporté de «plusieurs années». C'est dire que l'Afrique a bel et bien raté le coche d'être enfin représentée dans l'organe de décision de l'ONU, lequel reste dominé par les cinq pays membres permanents disposant du droit de veto (Chine, Etats-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie). L'Afrique a perdu son rendez-vous avec son destin à un moment qui semblait pourtant le plus propice pour réparer une injustice commise envers le continent noir. Hélas!