La Grande-Bretagne risque d'être désormais fermée pour le Premier ministre et plusieurs officiers supérieurs israéliens. En effet, plusieurs officiers israéliens ayant prit part directement, ou indirectement, aux assassinats ciblés de Palestiniens, ces dernières années, se trouvent sous la menace de poursuites internationales pour «crimes de guerre» alors qu'ils n'ont jamais eu à devoir rendre des comptes à des tribunaux en Israël. Ainsi, l'ancien chef d'état-major israélien, Moshé Yaalon, a dû renoncer à son voyage en Grande-Bretagne, de crainte de poursuites pour «crimes de guerre», rapporte jeudi la radio publique israélienne. Un autre officier supérieur israélien, le général de réserve Doron Almog, a, quant à lui, dû rebrousser chemin alors qu'il devait prendre part, sur invitation d'une association d'aide aux soldats israéliens, à une campagne d'appel de fonds. Et pour cause, un juge britannique a délivré au début de la semaine dernière un mandat à la demande d'un cabinet juridique de Londres saisi par le Centre palestinien des droits de l'homme, contre le général de réserve israélien Doron Almog. Sous la menace d'une éventuelle arrestation, le général Almog, arrivé dimanche dernier à Londres, dans un avion de la compagnie israélienne El-Al, a préféré ne pas descendre sur le sol britannique s'en retournant en Israël par l'avion qui l'avait amené à l'aéroport international de Heathrow, près de Londres. Au même titre que ses officiers, le Premier ministre israélien, le général Ariel Sharon, chef suprême des forces armées, qui donna le feu vert pour l'assassinat ciblé des dirigeants politiques et militaires palestiniens, (une cinquantaine de responsables palestiniens ont été abattus par l'armée israélienne, parmi lesquels le secrétaires général du Fdlp, Abou Moustapha Ali, le chef spirituel de Hamas, Ahmed Yassine, le chef de Hamas pour Ghaza, Ali Al Rantissi et le chef de la branche armée de Hamas, Salah Chéhadé, ce dernier assassiné en même temps que son épouse et huit enfants) se trouve également sous la menace d'être accusé de crimes de guerre en territoires palestiniens. Ainsi, Sharon redoute à nouveau d'être arrêté et jugé à l'étranger, jugement qu'il a évité de justesse en 2002 à Bruxelles lorsqu'il devait comparaître devant le tribunal de Bruxelles sur plaintes de rescapés Palestiniens des massacres de Sabra et Chatila au Liban, en septembre 1982. En effet, la Belgique -dont la loi permet de tels jugements-, a dû, sur pression des Etats-Unis, renoncer à appliquer sa loi sur les crimes de guerre à Sharon, commanditaire du massacre des Palestiniens au Liban. Le Premier ministre israélien s'en est ouvert, à New York, où se tient le sommet de l'ONU, à son homologue britannique, Tony Blair, auquel il a affirmé, rapporte la presse israélienne: «J'aimerais vraiment me rendre en visite en Grande-Bretagne, mais le problème est que, tout comme le général Almog, j'ai moi aussi servi de nombreuses années dans l'armée israélienne. Je suis aussi un général et j'ai entendu dire que les prisons en Grande-Bretagne sont très dures, et je n'aimerais pas m'y retrouver». Selon la radio publique israélienne, Tony Blair, «embarrassé» lui aurait affirmé: «Je n'ai pas entendu parler de cette histoire, mais je vous promets de m'en occuper même si, pour le moment, je ne sais pas comment je vais faire». C'est l'accusation contre le général de réserve Almog de son éventuelle implication dans l'assassinat de Salah Chéhadé qui a déclenché cette affaire. Après que le général Almog eut pu regagner Israël, le Centre palestinien des droits de l'homme a demandé mardi aux autorités britanniques d'ouvrir une enquête sur les «circonstances qui ont permis au général Almog d'échapper à des poursuites judiciaires». Le directeur du Centre, Raji Sourani a déclaré à propos de cette affaire: «Nous représentons des centaines de victimes palestiniennes et nous n'avons pas l'intention de nous en tenir au seul général Almog, dans des recours à des instances internationales, vu que la justice israélienne n'a pas tenu compte de nos appels». Une organisation israélienne ‘'Il y a une limite'' (‘'Yesh Gvoul'') a soutenu l'ouverture d'une procédure judiciaire internationale à l'encontre de l'actuel chef d'état-major Dan Haloutz, commandant de l'armée de l'air en 2002, et son prédécesseur, l'ex-chef d'état-major Moshé Yaalon. «Comme tous nos appels à la justice israélienne pour poursuivre les deux généraux se sont avérés vains -les tribunaux usant de manoeuvres dilatoires- nous soutenons des recours à l'étranger», a déclaré un responsable, Yoav Hess. La Cour suprême d'Israël s'était bornée à enregistrer en 2004 les explications du général Dan Haloutz, sur le fait qu'il avait déclaré que le bilan du bombardement «ne l'empêchait pas de dormir». Une autre organisation, le Comité contre la torture, réclame en vain à la justice israélienne depuis quatre ans de mettre hors la loi la pratique de «liquidations ciblées» d'activistes palestiniens et de les considérer comme «crimes de guerre». «Des recours à l'étranger sont certes déplorables, mais la justice israélienne doit s'en prendre à elle-même, si des requérants s'adressent ailleurs, dans la mesure où elle a refusé de trancher», a estimé le chroniqueur juridique de la radio publique israélienne Moshé Negbi. La justice israélienne s'était refusé à engager la moindre poursuite contre les officiers impliqués dans l'élimination de Salah Chéhadé. Une affaire à suivre.