Ahmed Ouyahia avait pris les rênes de l'Exécutif dans les moments les plus cruciaux. Les deux principaux partis de l'alliance présidentielle, le FLN et le RND ne semblent pas faire bon ménage. Pour preuve, les messages codés adressés de part et d'autre, par la voix de Abdelaziz Belkhadem et Ahmed Ouyahia, à l'occasion de la campagne pour la charte pour la paix et la réconciliation nationale, cachent mal le malaise qui règne au sein du gouvernement. Des «escarmouches» qui laissent supposer que quelque chose se prépare au plus haut niveau, dont la nomination d'un nouveau chef de l'exécutif, apprend-on de sources sûres. Il convient de rappeler que depuis que la formation de Abdelaziz Belkhadem a décroché la majorité, aussi bien au Parlement qu'au niveau des assemblées locales, des voix ne cessent de s'élever pour demander la chefferie du gouvernement. Pourtant, Ahmed Ouyahia qui avait pris les rênes de l'exécutif dans les moments les plus cruciaux, à savoir en pleine crise au FLN, a su s'acquitter pleinement de sa «mission» tout en sachant qu'un jour ou l'autre, il serait appelé à rendre le tablier. Il a su, en un temps record, désamorcer la crise de Kabylie, qui a failli venir à bout de la cohésion nationale, et surtout mener un travail de fond en faveur de la réconciliation nationale. Même si le secrétaire général du RND était connu au milieu des années 90 pour être un partisan de l'éradication, avant de s'aligner à l'ère de la rahma sous Liamine Zeroual sur les thèses réconciliatrices, il reste qu'il a toujours accepté la responsabilité au moment où tout le monde se voilait la face. En parfait commis de l'Etat, il a toujours répondu présent à chaque fois que le pays était dans une situation cruciale. Il s'était d'ailleurs rendu «une demi-douzaine de fois» à la prison de Blida «en compagnie de généraux majors», pour prendre langue avec les leaders de l'ex-FIS, Abassi Madani et Ali Benhadj. C'est ce qu'a déclaré récemment le chef du gouvernement dans un entretien accordé à la chaîne Beur TV. C'est en cette même occasion qu'Ouyahia, tout en rappelant les objectifs de l'initiative présidentielle, n'a pas omis de préciser que la vigilance doit être de mise, puisqu'il reste encore quelques groupuscules terroristes qui possèdent un pouvoir de nuisance. Le chef du gouvernement avancera le chiffre de 1000 terroristes actifs. Cependant, dans une déclaration faite dimanche dernier au Complexe des véhicules industriels de Rouiba, le ministre de l'Intérieur a quelque peu atténué les déclarations d'Ahmed Ouyahia, en parlant d'une centaine d'éléments armés sur mille. Par ailleurs, à propos de l'éventualité de la dissolution des gardes communaux et des groupes de légitime défense après la mise en oeuvre de la charte pour la paix et la réconciliation nationale, Nouredine Yazid Zerhouni, s'exprimant «au nom du chef du gouvernement» a affirmé que ces corps ne seront pas dissous, tant que le terrorisme n'est pas totalement vaincu. Le dossier sécuritaire n'est pas le seul terrain sur lequel Ouyahia n'est pas contredit par les membres de son gouvernement. En effet, le secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem, a, dans une déclaration en marge du séminaire sur la pensée politique qui se tient à l'hôtel El-Aurassi, affirmé qu'il n'y a aucun engagement entre le gouvernement et les archs concernant l'officialisation de tamazight. Une déclaration qui serait beaucoup plus du ressort du chef du gouvernement que d'un membre du l'exécutif. Un autre indice qui ne trompe pas quant à l'ambition du patron du FLN de succéder à Ouyahia à la tête de l'Exécutif. On dit même que Belkhadem est la personnalité la plus indiquée pour gérer l'après-référendum du 29 septembre. Pourtant, toujours à propos de la reconnaissance de la dimension amazighe, le ministre de l'Intérieur, interrogé par la presse en marge du meeting du chef de l'Etat à Laghouat, a souligné que les négociations avec le mouvement citoyen sont l'affaire exclusive du chef du gouvernement. Tant de déclarations contradictoires au sein d'un même Exécutif, annonciateurs de nouveaux choix politiques et partant, de nouveaux responsables pour mener la réconciliation à bon port. Ceux, notamment qui seront en charge de la préparation des nouvelles échéances politiques.