Ce qui sépare les trois partis est de loin plus profond que ce qui les lie. La crise au sein de l'Alliance présidentielle est devenue par la force des choses le sujet politique qui passionne les politiciens comme les citoyens ordinaires. Pourtant, suite au dernier remaniement gouvernemental opéré par le chef de l'Etat, on pensait que tout allait rentrer dans l'ordre au sein de l'Alliance présidentielle d'autant que l'actuel gouvernement d'Ahmed Ouyahia est caractérisé par la présence en force des trois partis formant la troïka présidentielle, le FLN, le MSP et le RND. Cependant, la réalité est tout autre puisqu'une guerre des tranchées semble battre son plein au sein de l'alliance et les divergences quant à la prise de pouvoir sont remontées à la surface. Pour preuve, le secrétaire général du FLN, Abdelaziz Belkhadem, vient de faire des remontrances à l'administration centrale, en filigrane au chef du gouvernement qui a lancé l'opération «mains propres» dans le but de «moraliser la vie politique» nationale. Pour les élus du FLN, cette campagne n'est autre qu'une cabale visant à déstabiliser le parti majoritaire. Chose à laquelle les élus du FLN refusent de se soumettre et qu'ils dénoncent même avec véhémence. «Nous sommes dans l'Alliance présidentielle mais nous n'acceptons nullement la concurrence déloyale», a souligné, jeudi, Abdelaziz Belkhadem. Clair et sans équivoque. Quant aux élus locaux, le secrétaire général du FLN a appelé à «la réhabilitation de l'élu à travers l'amendement des codes communal et de wilaya et en lui conférant aussi toutes les prérogatives lui permettant d'accomplir sa mission dans l'intérêt général». Il est du droit des partis «d'être en concurrence pour gagner la confiance du peuple à travers les idées et les programmes à même de promouvoir le développement», a précisé M.Belkhadem. Les divergences avec Ahmed Ouyahia semblent ainsi prendre de nouvelles proportions. Abdelaziz Belkhadem n'est cependant pas le seul à émettre des critiques envers Ahmed Ouyahia. «Il n'est pas question d'une dissolution de notre parti au sein de l'Alliance» mais d'«affirmer notre indépendance en conformité avec le document de l'Alliance que nous avons signé», a affirmé Boudjerra Soltani, président du Mouvement de la société pour la paix ( MSP). Par ailleurs, le parti islamiste ne semble pas décidé à mettre l'arme au pied. Pourtant, les observateurs avaient parié sur le fait que ce parti, membre de l'Alliance présidentielle, allait rentrer dans les rangs. Mais c'est mal connaître le parti spécialiste des revirements politiques. En plus de la levée de l'état d'urgence revendiquée depuis longtemps, la formation de Boudjerra Soltani, même si elle fait partie intégrante du gouvernement, n'en demeure pas moins fidèle à ses sorties contredisant la politique gouvernementale. En abordant récemment la question du Bac islamique, M.Soltani a appelé les pouvoirs publics à prendre en charge l'éducation de l'islam à défaut d'être prise en charge par la rue. Car, a-t-il averti, la nature a horreur du vide et il y a un risque de retour à la situation que nous avons combattue durant une décennie. «C'est une décision irréversible de l'Etat», a rétorqué Ahmed Ouyahia, lors de son passage devant les députés, soutenant du coup son ministre de l'Education nationale, Boubekeur Benbouzid. Ainsi, passé le temps des conciliabules, une nouvelle «fronde» au sein de l'alliance surgit alors que, dans les différentes sphères politiques on évoque avec insistance le double référendum devant consacrer l'amnistie générale et la nouvelle Constitution. Aujourd'hui, la réalité des faits est là. Le torchon brûle réellement entre les différents membres de l'Alliance présidentielle. De ce fait, à part le fait d'avoir servi de tremplin à la réélection pour un second mandat au président de la République, tout semble éloigner ces trois formations politiques aussi bien dans le fond que dans la forme. Ainsi, ce qui sépare les trois partis est de loin plus profond que ce qui les lie. Et une crise n'est pas à écarter à l'orée de la prochaine réunion de l'Alliance présidentielle prévue dans les jours qui viennent.