Une vue de la rencontre On rebat les cartes et la politique n'est qu'une série de bluffs, de concessions et au besoin, de trahisons. Enjambant les cadavres, le parti de Makri passe. Le FFS a reçu, dans l'après- midi d'hier, à son siège national à Alger, une délégation du MSP, à la demande de ce dernier. Cette rencontre intervient à la veille d'une autre programmée avec le FLN, toujours à la demande du MSP. Dans un communiqué très lapidaire, le FFS a «exposé et réaffirmé son projet de reconstruction du consensus national, seule alternative afin d'éviter au pays une crise majeure pouvant porter atteinte à son unité et à sa sécurité». En filigrane, il fait comprendre à son hôte du jour que la partialité de l'initiative revient au FFS lui rappellant son enracinement nationaliste. «L'initiative du FFS s'inspire de la guerre de Libération nationale qui a triomphé du colonialisme grâce à un consensus national et populaire contre l'adversité, construit par les dirigeants du Mouvement national.» Le plus vieux parti d'opposition termine son communiqué par un message sibyllin qui en dit long: «Le FFS a réaffirmé que le processus qui a été entamé en 2014 et qui s'est confronté à l'absence de volonté politique du pouvoir (...)». Il affirme bien que son action s'est heurtée à un niet des autorités. On se rappelle en effet, du refus que lui a opposé le FLN de Saâdani, alors secrétaire général du parti, arguant du fait que «le FLN doit être la locomotive et non un wagon». Qu'est-ce qui a changé depuis, pour que le pouvoir accepte aujourd'hui l'initiative du MSP? Pourtant, c'est-ce même parti qui a ostensiblement rejeté une offre du Premier ministre pour participer au gouvernement en 2017. Quelle interprétation crédible donner à ces rencontres croisées et qui se multiplient entre les partis de l'opposition et de la majorité présidentielle? L'on est en droit de nous interroger alors si le MSP n'est qu'une pièce d'un puzzle qui se déroule lentement mais sûrement. Connaissant la dextérité et l'art avec lesquels les partis islamistes pratiquent l'entrisme, on peut bien supposer que le refus du MPS de participer au gouvernement procèderait tout simplement d'une tactique politique concertée. Comme au jeu de poker, on rebat les cartes et la politique n'est qu'une série de bluffs de l'adversaire, de concessions et au besoin de trahisons. Enjambant les cadavres, le parti de Makri passe. Il carbure à plein régime et semble décidé à donner corps à son initiative en s'appuyant sur un vieux classique de la négociation politique: placer très haut la barre pour espérer un strict minimum. C'est de bonne guerre tant que le jeu politique le lui permet et surtout que l'enjeu est noble. Il consiste en la quête d'un contenu national. Makri qui s'est succédé à lui-même, prône le consensus national autour d'une transition politique et économique en prévision de la présidentielle de 2019. Lors de ses récentes sorties, il avait souligné que «le candidat du MSP en 2019 ne jouera pas le rôle d'un candidat-lièvre». Il refuse aussi «de faire de la figuration dans le gouvernement et de servir de faire-valoir...». Pour rappel, il a accédé, en 2013, à la présidence du MSP, soit dans une période marquée par le vrombissement des révoltes populaires dans les pays arabes. Ayant acquis une certaine expérience dans l'opposition, Makri ne cache pas sa grande sympathie pour l' AKP et le président turc, Tayyip Erdogan qu'il considère comme modèle. Une sérieuse piste... voire même une grande vague sur laquelle surfe Makri.