Il se considère toujours «en guerre» et n'entend pas dialoguer et encore moins faire une trêve. Première réaction officielle du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc), l'entretien accordé par le responsable de la commission de l'information du Gspc à la revue El Feth est instructif à plus d'un titre. Sur une vingtaine de pages, Abou Amar Abdelbar maintient le cap sur l'option du djihad, qu'il considère être un choix définitif du Gspc, et qui n'a aucune considération pour l'évolution de la politique du pays. Tout comme il considère que les échecs successifs n'auront aucune prise sur l'organisation: «Celui qui pense que notre guerre est faite de victoires et de razzias se trompe, car cela ressemble à une image très loin de la réalité. Le djihad est perte de vies, de frères, d'armes, de victoires et d'échecs. C'est notre quotidien et on y a pris goût. Notre combat en Algérie n'est pas attaché à la mort de nos chefs, mais bien à une conviction, et qui est intemporelle.» Autre motif d'intérêt: c'est bien la première fois que le Gspc reconnaît officiellement la mort de son chef, Nabil Sahraoui, abattu par un contingent militaire vers la fin de l'été dernier, et jamais reconnu, depuis, par la direction de l'organisation. Après un long panégyrique, il reconnaît que la mort de Nabil Sahraoui avait fortement secoué les troupes, mais que cela avait fortifié l'organisation dans son choix de «continuer le combat». Abou Amar Abdelbar dément ce qu'il qualifie d'«allégations de la presse», en faisant allusion aux scissions qui auraient surgi dans la direction du Gspc: «Toutes ces calomnies ont pour objet de perturber le moral des troupes, alors qu'en fait, le refus du pouvoir et des responsabilités est le signe de tous les frères.» Dans la foulée, il réaffirme que Hassan Hattab a bel et bien démissionné et que c'est Abou Mossaâb Abdelwadoud (de son vrai nom Abdelmalek Deroukdel, Ndlr) qui a remplacé Nabil Sahraoui à la tête du Gspc. Une grande partie de l'entretien est consacrée à critiquer l'attitude «ambiguë» des leaders islamistes modérés, qui, non seulement se démarquent du salafisme djihadiste, mais aussi se distinguent par des prises de position carrément hostiles au djihad: «Pourquoi vous trouvez-vous mal à l'aise face à ce combat que vous ne menez pas? Si on vainc, c'est un plus pour l'islam, et si on meurt, c'est une profession de foi pour nous...» Evidemment, sont encensés en long et en large les référents doctrinaux du salafisme pur et dur: Abou Mohamed El Maqdissi, Ayman Az-Zawahiri, Abou Qatada, Abou Bacir, Youcef El Aeiri, etc., qui se sont toujours caractérisés par un activisme à toute épreuve et un discours radical à outrance. La «guerre totale» émaille l'entretien, et à aucun moment, il n'est question de faire machine arrière. Ni trêve, ni dialogue, ni réconciliation, les trois «ni» du GIA, repris à son compte par le Gspc restent de rigueur: «Ce qui nous importe le plus, c'est que le djihad se fortifie partout, car nous désapprouvons le fait d'arrêter de combattre, de se suffire dans l'inaction et la misère.» Et de finir sur ce constat qui résume toute la douleur des groupes armés: «En fait, on voit bien que les peuples musulmans ne sont pas prêts à se sacrifier et préfèrent garder une attitude de spectateurs comme s'ils vivaient sur une autre planète que nous, ou comme si les djihadistes, qui acceptent le feu au-dessus de leur tête, font partie d'un autre univers...»