L'Expression: Comment réagissez-vous à la décision de l'Arpt? Hassan Kabbani: Notre réponse est simple. Nous demandons l'application de la loi qui est claire à ce sujet. Afin que le consommateur puisse bénéficier des meilleurs tarifs, le législateur a imposé dans le décret 02-156 aux opérateurs de ne se facturer entre eux les prestations d'interconnexion qu'aux coûts pertinents de cette activité, c'est-à-dire sans même prendre en compte les autres frais comme ceux du marketing et de distribution. Aussi nous demandons à Algérie Télécom (AT) de justifier leurs prix. A notre niveau nous croyons que rien ne justifie ces augmentations surtout comparées au catalogue des autres opérateurs. Nous avons le droit de contester les tarifs d'AT, parce que la facture de l'interconnexion est plus chère que les coûts et cela risque de se répercuter sur le consommateur,Cependant, il est désolant que l'Arpt ait pris sa décision avec une telle rapidité sans pour autant consulter les autres opérateurs. Ce qui est en soi une erreur. Nous les avons saisis afin qu'ils puissent revoir leur décision en parallèle et pour protéger nos droits, nous avons déposé une plainte au niveau du Conseil d'Etat en date du 1er octobre. Nous ne demandons pas une faveur mais juste la stricte application de la loi. L'Arpt est une autorité de régulation, de ce fait elle doit être neutre alors pourquoi cette précipitation? Nous n'avons jamais eu de problèmes auparavant avec l'Arpt de par sa neutralité, sa compétence et son professionnalisme. Cette fois-ci l'Arpt a rendu sa décision sans pour autant avoir en main tous les éléments nécessaires. Aussi nous espérons voir l'Arpt corriger ses erreurs. Quelque part j'ai le net sentiment qu'il y a confusion. D'ailleurs même avec AT nous sommes tenus de coopérer. En venant en Algérie vous avez pris connaissance du cahier des charges. Les décisions d'AT sont-elles en conformité avec ce cahier? Quand nous avons répondu à l'avis d'appel d'offres, les conditions étaient claires et c'est en se basant sur ces mêmes conditions que nous nous sommes positionnés. Depuis nous avons fait nos preuves. La preuve, nous avons 6 millions d'abonnés qui nous font confiance. Aussi le plus grave avec cette décision, c'est qu'il y a un changement dans l'environnement des affaires. Ce qui aura à coup sûr, et c'est malheureux de le dire, des répercussions négatives sur l'investissement en Algérie. Aussi nous sommes en droit de nous poser la question ; sommes-nous victimes de notre succès ? Nous sommes quelque part persuadés qu'il existe des gens qui veulent limiter les ambitions de OTA. Trois années après votre installation en Algérie, ne pensez-vous pas que vous êtes victimes d'un marché de dupes? AT se présente comme l'autorité de régulation et non comme simple opérateur économique public. Aussi il ne devrait pas y avoir de différence entre privé et public. A la suite de mon intervention au forum d'Algérie Entreprise, AT s'est comporté comme l'autorité suprême en nous menaçant de retrait de licence. De quel droit et sur quelle base? Ne pensez-vous pas que c'est une affaire de gros sous qui oppose AT, qui a trouvé en l'Arpt un allié, à Djezzy puisque le déséquilibre se fait aux dépens d'AT? Il faut reconnaître que l'Arpt a toujours démontré son objectivité et sa neutralité. Je le répète, l'Arpt a rendu sa décision sans avoir tous les éléments mais maintenant que ces éléments sont en leur possession nous espérons qu'un correctif sera apporté. Car toute cette affaire a eu un impact négatif sur notre opération au même titre que Watanya et Mobilis même si ce dernier en tant que filiale d'AT ne s'est pas manifesté. De ce fait, y a-t-il volonté délibérée de nous pousser à augmenter nos tarifs à la consommation ? Chose que nous refusons. Le vrai problème est commercial. Quant au différend financier, depuis janvier 2005, AT doit 10 milliards de dinars à OTA. Si l'Arpt maintenait sa décision, allez-vous augmenter les tarifs? La loi du marché est claire à ce sujet. Plus il y a d'activité, plus les tarifs diminuent Quelle est la réaction de M.Sawiris après que la presse ait rendu public ce différend? M.Sawiris regrette cette situation. Il pense qu'on peut régler ce petit problème avec AT avec qui nous devons coopérer dans un cadre de partenariat. C'est dommage d'en arriver à cette situation. Nous ne perdons pas espoir de revenir à une situation de normalité. Les gens doivent savoir qu'OTA est une entreprise de droit algérien. Elle a les mêmes droits et devoirs que toutes les entreprises algériennes même si l'actionnaire majoritaire est égyptien. M.Sawaris regrette que les conditions initiales changent artificiellement en raison de personnes inconscientes de l'impact de leur décision. Y a-t-il un tel précédent dans le monde arabe? Nous reconnaissons qu'on ne peut pas s'entendre tout le temps sur tous les points. Nous sommes conscients que nous sommes dans un pays de droit où la loi est claire. Nous sommes persuadés que la loi sera appliquée dans son intégralité. C'est ce qui fait la différence ente l'Algérie et d'autres pays où la loi est appliquée différemment entre le secteur privé et public. Par ailleurs, ce différend étalé sur la scène médiatique est un mauvais message envoyé aux autres investisseurs étrangers. Il ne devrait pas y avoir de différence entre l'investisseur privé et public et encore moins entre nationaux et étrangers. Il faut que l'investisseur étranger se sente protégé par la loi. Ne sentez-vous pas que vous êtes trahis et que toute cette intrigue remette en question vos projets? Tout cela dépendra de la réponse que rendra l'Arpt ou le Conseil d'Etat même si c'est prématuré de se prononcer. Sawiris a déclaré qu'il est prêt à investir dans la cimenterie, le bâtiment etc., cela pourrait-il le faire changer d'avis? Ce dossier a longtemps traîné, nous espérons que ce problème sera réglé dans les plus brefs délais et j'espère qu'il n' y aura pas le moindre changement dans nos projets, notamment de téléphonie, de câble sous-marin devant relier l'Afrique à l'Europe à travers l'Algérie, la 2e licence de téléphonie fixe en consortium avec Egypt Telecom. De ce fait OTA est un investisseur sérieux qui veut s'impliquer davantage en Algérie. Nous espérons que ce dossier n'aura pas de répercussions sur nos futurs projets. Il semble que les autorités nationales ignorent tout de ce dossier jusqu'à ce que la presse en fasse écho? Il y a une autorité de régulation qui gère ce dossier et dans le cas contraire nous avons le droit de recourir au Conseil de l'Etat. En fin de compte nous espérons que c'est juste un malentendu qui sera dissipé incessamment. Quel sera la manque à gagner pour OTA dans le cas où l'Arpt aurait rendu une décision n'allant pas dans votre sens? Ce serait une perte sèche et nous serions obligés de payer des prix exorbitants alors que nous ne pourrons pas récupérer nos tarifs à l'interconnexion. Quels sont vos futurs projets?. Nous comptons investir encore 450 millions de dollars pour notre développement. Comment évaluez-vous le marché algérien de la téléphonie mobile? Avant notre arrivée, il n' y avait que 200.000 mobiles en Algérie pour 30 millions d'habitants. Aujourd'hui, il y a 11 millions d'abonnés . Selon nos estimations, ce chiffre sera de 15 à 17 millions en 2007/2008 avec une part de marché de 60% pour OTA. Le marché algérien est notre 2e marché africain après l'Afrique du Sud en termes de proportionnalité population/mobile.