Tout le monde est d'accord pour dire que la santé va mal. «Ni les citoyens et encore moins les malades et les professionnels de la santé et parmi eux les praticiens ne sont satisfaits du secteur.» Cette l'affirmation est de M.Abdelhamid Aberkane, ministre de la Santé, prononcée lors d'une émission à l'Entv, diffusée vendredi soir. Venant du premier responsable ce constat sous-tend des mesures à venir. Dans la régulation et l'assainissement du marché du médicament, dans la protection matérielle et l'amélioration des salaires du personnel de la santé, mais aussi dans l'éthique et la déontologie. De ce dernier point on ne parle pas assez. Pourtant les manquements et «coups de canif» ne manquent pas. Cela va des chirurgiens des hôpitaux qui exigent des malades des honoraires, aux décès dus à des erreurs médicales en passant par la main base sur le stock de médicaments et autres consommables. Cela sans compter les cas de comportements peu honorables signalés ici et là. D'emblée on serait tenté de se rappeler que le Conseil de l'ordre existe et que c'est à lui qu'échoit la moralisation. Or, que constate-t-on? Cette structure professionnelle s'est mise hors jeu en se laissant entraîner vers d'autres préoccupations. Il y est, malheureusement, ces temps-ci, plus question de délivrance de visa, de conflit entre le conseil national et les conseils régionaux que de tenue de conseil de discipline. Dieu sait que la matière à ce propos ne manque pas. Il n'est pas toujours aisé d'illustrer de tels propos tant la chape de plomb est lourde et le corporatisme tenace. Pourtant, et nous avons pu le vérifier, il arrive que des praticiens consciencieux «osent» braver l'omerta et signaler, dans les règles de l'art, des événements tragiques commis par des confrères. Ils méritent tout notre soutien et même, dans l'état actuel des choses, des distinctions. Malheureusement et si la hiérarchie à tous les échelons ne suit pas, l'impunité engendrée ne peut que garantir la prolifération des actes condamnables. En date du 2 octobre de l'an dernier, le chef de service anesthésie-réanimation de l'hôpital de Bologhine dresse un rapport sur une grave erreur commise par une assistante de chirurgie lors d'une intervention. «La patiente est décédée en postopératoire immédiat car le geste chirurgical était trop lourd pour son état», peut-on lire sur ce rapport adressé au chef de service de chirurgie générale, au président du Conseil médical, au directeur général de l'hôpital et à la Direction des structures sanitaires (DSS) au ministère. Plus d'une année après, la défunte enterrée, la chirurgienne opère toujours. Aucune suite, aucun écho n'a été donné au rapport. Loin d'être un cas isolé, cette affaire présente la singularité de l'authentification. Que d'autres affaires étouffées dans l'oeuf ou dont le déroulement est entravé! Comme l'enquête de police sur un accident de la route aux ramifications morales causé par le président du Conseil médical (pas moins !) et chef de service de pédiatrie au même hôpital. Une enquête qui tarde à cause de la disparition d'éléments constitutifs. Son aboutissement ne peut que servir la pratique médicale dans son aspect le plus noble. Pourtant... Deux affaires parmi d'autres dont bruissent les allées et couloirs d'hôpitaux. Un chemin de croix que devra prendre la santé avant tout autre mesure. Qu'elle soit technique, financière ou commerciale. L'éthique d'abord. L'éthique toujours. Quel salut sinon?