Il s'agit là en fait d'une excroissance pathologique et symptomatique de l'échec d'une «intégration forcée». Dix jours après la première étincelle, Paris continue de vivre des poches de turbulences extrêmement graves, et qui , si elles persistent, vont pousser les pouvoirs publics à décréter l'état d'urgence. Ce serait alors un cas unique en France depuis 1968 et même là, la comparaison n'est pas appropriée. Car si l'insurrection de 1968 a été menée par les étudiants et les intellectuels de gauche, aujourd'hui, c'est la révolte des exclus du système, de la piétaille, de la «racaille» et autres «voyous», selon les termes xénophobes de certains officiels français. Pourtant, depuis un peu plus de trois mois, Sarkozy, J-L. Bruguière et autres «agents» s'essoufflaient à mettre tout le monde en garde contre «une attaque imminente du Gspc». Rafles, mises en examen et restrictions politiques et civiques ont suivi cette stratégie mise en place par le ministre français de l'Intérieur, mais les risques étaient ailleurs que dans cette panique feinte ou potentiellement existante, mais exagérée, dans tous les cas. Selon la presse française, des responsables policiers français ont assuré qu´il n´y avait pas de «main invisible islamiste derrière les émeutes urbaines qui embrasent des banlieues proches de Paris à forte population d´origine immigrée, du Maghreb et d´Afrique depuis huit jours.» Les mêmes sources rapportent aussi qu'un responsable syndical de la police a estimé que ces violences étaient une «nouvelle forme de terrorisme urbain» d´une «minorité de caïds ayant un intérêt financier ou idéologique», notamment des «islamistes radicaux». Bruno Beschizza, secrétaire général du second syndicat de ce corps, Synergie, qui dit que «des islamistes radicaux connus» des Renseignements généraux (RG), une unité spécialisée de la police, avaient profité des troubles pour «attiser la haine» et avaient «entraîné et manipulé des jeunes». Plusieurs responsables policiers ont fait part vendredi de leur «scepticisme» et de leur «réserve» sur cette assertion que les ministères de la Justice et de l´Intérieur n´ont pas souhaité commenter. Un responsable de la Direction générale de la police nationale (Dgpn) s´est dit «formel». «Evoquer l´influence islamiste n´est pas fondé» et «il n´y a rien pour étayer l´existence d´une organisation des émeutes, qu´elle soit nationale, départementale, ou quoi que ce soit de ressemblant», a dit ce responsable qui a souhaité garder l´anonymat. Les RG n´ont recueilli aucun élément permettant pour l´heure d´accréditer la thèse selon laquelle des islamistes manipuleraient les groupes qui, s´ils peuvent être «organisés en leur sein», ne sont «pas coordonnés» entre eux, confirme un autre responsable policier. Des jeunes vêtus à la manière salafiste - des musulmans partisans d´un retour à l´islam originel - ont été vus à proximité des émeutes dans les cités déshéritées qui combinent échec scolaire, pauvreté, fort chômage et où les jeunes se sentent exclus de la société française. Mais leur rôle a surtout été de «tenter de calmer le jeu», assure un policier. «Qu´on le regrette ou non, cela fait longtemps que les associations musulmanes sont des interlocuteurs incontournables pour régler un tas de problèmes dans ces villes. Que cela ait été le cas à cette occasion n´a rien d´anormal», ajoute-t-il. «Il n´y a pas de main invisible islamiste" derrière ces émeutes, assure un autre responsable de la police. L´islam est la deuxième religion de France, où le nombre de musulmans, en l´absence de statistiques officielles, est estimé entre 4 et 5 millions. Jeudi, le ministre de l´Intérieur, Nicolas Sarkozy, a estimé que les émeutes en Seine-Saint-Denis, le département au nord de Paris le plus touché, n´avaient «rien de spontané», étaient «parfaitement organisées», sans donner d´autres détails. Vendredi, un de ses proches, le sénateur Roger Karoutchi, a exclu toute «coordination politique», mais a évoqué une «coordination technique» via notamment les téléphones portables. Si l'on compare la politique d'intégration francaise avec les autres modèles occidentaux en la matière , il en ressort clairement qu'elle est la plus restrictive, notamment en matière de liberté de culte. Il faut peut-être prendre en ligne de compte que la France, depuis les attentat du 11 septembre, a été entrainé politiquement par les Etats-Unis sur un terrain fait des mesures restrictives du tout-sécuritaire et dont elle fait, seule, les frais aujourd'hui, alors que jusqu´à une date récente, elle avait pu élaborer une politique arabe très réussie.