la chaussée n'est pas occupée que par les automobilistes La route en Algérie n'est plus seulement une infrastructure vitale pour l'économie. Elle est devenue une économie à part entière. La route n'appartient pas qu'à ses usagers. Qui n'a pas remarqué, en sillonnant les routes algéroises, que la chaussée n'était pas occupée que par les automobilistes et autres motocyclistes? Certains s'invitent aux abords des voies, parfois même entre ces dernières, sans nulle intention d'aller où que ce soit. Mendiants, vendeurs ambulants, jusqu'à la mise en place d'un marché! Parfois on les trouve même entre les voies d'autoroute. Ces «squatteurs» des routes font aujourd'hui partie du paysage en Algérie, au vu et au su des autorités. On peut, aujourd'hui, se ravitailler en rentrant du travail. Fruits, légumes, tout y est, et parfois moins cher qu'au marché. Certains automobilistes semblent ne pas pouvoir résister à la tentation de joindre «l'utile à l'utile», puisque la route n'a rien d'agréable pendant les heures de pointe. Et voilà que les embouteillages se trouvent aggravés! À titre d'exemple, la sortie Est d'El Hamiz, déjà bien chargée, devient infernale. Les abords de la station multimodale de haï El Badr n'est pas mieux, un marché s'y étant installé également. Les forces de l'ordre tentent parfois d'y mettre fin, mais en vain. Les camionnettes sont omniprésentes. Les fruits et légumes ne sont pas les seules victuailles en vente en bord de route. Le nombre d'enfants vendant du pain traditionnel est impressionnant. Certains vendent même du thé aux abords des ralentisseurs. De là, il n'est pas difficile d'imaginer à quel point les arrêts incessants des automobilistes ralentissent la circulation. Le plus impressionnant reste la vente de grillades au bord des Routes nationales, et même sur certaines bretelles! Quand le commerce ralentit la circulation, l'inverse est vrai! Et pour preuve, là où il y a embouteillages, il y a commerce et mendicité. Pour preuve, le grand ralentissement causé par le barrage de gendarmerie non loin de l'hôpital Salim Zemirli est un haut lieu de la mendicité. Toutes les «catégories» de mendiants s'y succèdent. Les réfugiés syriens se faisant rares, ce sont les migrants subsahariens qui les ont supplantés. Et pour réussir à attendrir plus les automobilistes, ce sont presque systématiquement des femmes avec des enfants dans leurs bras qui font la manche. Il est pourtant avéré que certains des mendiants étaient en vérité exploités par des bandes de malfaiteurs. Une de ces dernières a été démantelée plus tôt dans l'année, et elle avait sévi pendant près de 3 ans. Concernant les enfants qui accompagnent les adultes qui mendient, les uns ne sont pas toujours la progéniture des autres. Ainsi, 60 enfants nigériens ont été pris en charge et arrachés aux bras de réseaux de traite humaine qui les exploitaient. Selon le ministère de l'Intérieur, près de 5000 mineurs non accompagnés mendieraient, presque exclusivement des migrants. Des bandes de jeunes, en gilets jaunes, se présentent parfois avec des cartons afin de collecter des fonds pour soigner des malades nécessiteux, à l'image des abords du barrage de gendarmerie de Tazmalt. Ainsi, la route en Algérie n'est plus seulement une infrastructure vitale pour l'économie. Elle est devenue une économie à part entière avec des commerçants, des clients, des mendiants et tout ce qui s'ensuit. Certains en tirent la totalité de leurs moyens de subsistance par nécessité, certains opportunistes profitent pour se faire de l'argent facile en exploitant une frange fragile de la société. Pour rappel, il est formellement interdit de s'adonner au commerce «sauvage» en bord de route, et la mendicité est punie par 1 à 6 mois d'emprisonnement. Exploiter des enfants qui, eux, n'ont rien demandé est une circonstance aggravante. Leur faire subir la chaleur et les gaz d'échappement à longueur de journée et à un si jeune âge peut engendrer des séquelles qu'ils traîneront tout au long de leur vie. La route est une infrastructure vitale à laquelle il faut rendre sa fonction fondamentale pour qu'elle puisse la remplir comme il se doit, c'est-à-dire permettre aux personnes de se déplacer dans les meilleurs délais et les meilleures conditions de sécurité.