Hariri a été reçu par le président Aoun On sait que les blocages dans les tractations sont souvent dus non pas aux appartenances religieuses, mais bien plus aux liens des uns et aux hostilités des autres vis-à-vis de la Syrie, des critères plus acérés depuis 2011. Il aura fallu un peu plus de huit mois aux formations libanaises pour parvenir à une issue positive de leurs tractations en vue de constituer un gouvernement. Depuis jeudi dernier, c'est désormais chose faite et, comme prévu, la nouvelle équipe est conduite par le Premier ministre sortant Saad Hariri dont la présence nourrit une somme de divisions politiques et de craintes que la crise économique ne s'aggrave davantage. Tous les partis qui dominent la scène politique libanaise sont évidemment représentés dans ce gouvernement composé de 30 membres parmi lesquels il y a quatre femmes, présentes notamment aux ministères de l'Intérieur et de l'Energie. C'est une première dans ce pays traditionnellement donné en exemple par les puissances occidentales en matière de démocratie mais jamais soutenu quand il doit faire face aux nombreuses et permanentes agressions israéliennes. Au ministère des Affaires étrangères, on retrouve Gebran Bassil, le gendre du chef de l'Etat Michel Aoun, qui garde donc son poste dans une conjoncture délicate après les évènements de l'an dernier lorsque Saad Hariri a dû présenter sa démission à partir de Riyadh. Idem pour le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, dont la présence vise à rassurer les milieux d'affaires internationaux à un moment où le Liban doit faire face à une crise multidimensionnelle sur les plans économique, financier, sociaux et administratifs. Le pays souffre, en effet, de la guerre qui se déroule depuis 2011 dans la Syrie voisine avec son cortège de milliers de réfugiés et il lui faut en outre donner des gages aux investisseurs en mettant en oeuvre d'importantes réformes recommandées aussi bien par la Banque mondiale que par le FMI. En avril 2017, une conférence internationale avait été organisée pour venir en «aide» au Liban, sous l'égide de la puissance tutélaire française, mais cette rencontre baptisée CEDRE qui avait promis plusieurs dizaines de milliards de dollars d'investissements, tant sous la forme de dons que de prêts, tarde encore à se concrétiser. D'où la volonté du nouveau gouvernement de se lancer dans les réformes sans lesquelles il ne saurait y avoir de financements, selon le Premier ministre Hariri. Paris s'est aussitôt félicité de cette formation gouvernementale dont la France estime qu'elle a «réuni les conditions de sa désignation», tout en réaffirmant son attachement «à la stabilité et à la sécurité du Liban». En mai 2018, des élections législatives ont eu lieu qui ont conduit à la désignation de Saad Hariri comme futur Premier ministre chargé de la composition du nouveau gouvernement sur la base des dispositions constitutionnelles libanaises. A plusieurs reprises, il a dû revoir sa copie, notamment du fait des réserves émises par les différents courants. Multiconfessionnel, le Liban se fonde sur un dispositif politique complexe dont l'équilibre est toujours fragile puisque d'autres Premiers ministres ont dû mettre plus de dix mois pour parvenir à former une équipe satisfaisante. Cette fois, le litige concernait la présence gouvernementale de six députés sunnites alliés du Hezbollah et donc opposés à Saad Hariri, dont le parti Le courant du Futur détient cinq portefeuilles. Le Courant patriotique libre (CPL) du président Michel Aoun, et son grand allié, le Hezbollah, disposent d'une minorité de blocage, le CPL ayant onze ministères, le Hezbollah et le mouvement chiite Amal trois ministères chacun. On sait que les blocages dans les tractations sont souvent dus, non pas aux appartenances religieuses, mais bien plus aux liens des uns et aux hostilités des autres vis-à-vis de la Syrie, des critères plus acérés depuis 2011.Le nouveau gouvernement a devant lui 30 jours pour présenter sa déclaration de politique générale au Parlement.