Un week-end difficile va commencer samedi en Egypte où a lieu le deuxième tour de la seconde phase des élections législatives. Tous les regards se tournent ces derniers jours vers ce que vont faire les Frères musulmans - interdits, mais tolérés par les pouvoirs publics - qui ont fait une percée électorale spectaculaire lors des deux tours d'un scrutin législatif à rallonge. Les Frères musulmans qui ont engrangé 13 sièges lors de la deuxième phase du scrutin, qui a eu lieu en début de semaine à Alexandrie et dans les importants ports du nord de Port Saïd, de Suez et d'Ismaïlia -gain qui s'ajoute aux 34 sièges déjà gagnés lors de la première phase - consolident ainsi leur quota au Parlement qui s'élève désormais à 47 sièges, triplant ainsi leurs sièges qui étaient au nombre de 15 dans la législature sortante. De fait, l'objectif primordial des Frères musulmans dans cette phase de leur retour dans le champ politique égyptien - quoiqu'il leur soit toujours interdit de se constituer en parti politique - est d'atteindre les 5% de représentation au Parlement qui leur permettront de présenter un candidat à la présidentielle de 2011 comme le stipule la Constitution amendée. Devant une opposition désunie et dispersée, les Frères musulmans se présentent désormais comme la seule alternative crédible au pouvoir hégémonique du PND (Parti national démocratique - au pouvoir - du président Hosni Moubarak lequel domine depuis des lustres l'Assemblée du peuple -Parlement égyptien). C'est cette perspective, qui vient en filigrane d'un scrutin important par ailleurs, qui a fait que la seconde phase a été marquée par de nombreux incidents dans plusieurs gouvernorats et notamment à Alexandrie où il y eut la mort d'un homme et plusieurs blessés, en sus de l'arrestation de plus de 500 militants des Frères musulmans par les forces de l'ordre. Aussi, ce sont les scènes de violence et les intimidations des partisans du PND - qui ont usé de tous les moyens pour empêcher les militants islamistes de voter - qui ont marqué la deuxième phase dont le second tour, qui a lieu samedi et dimanche, est considéré comme à hauts risques et pouvant engendrer d'autres affrontements entre partisans du PND et des Frères musulmans. Ainsi, hier PND et Frères musulmans se disputaient hier dans une âpre campagne électorale les 122 sièges en ballottage, dont 41 pour les islamistes qui se présentent sous l'étiquette d' «indépendants». De fait, les Frères musulmans se trouvant en position favorable veulent confirmer leur percée historique et leur grand retour sur la scène politique égyptienne. En fait, les islamistes égyptiens, en cette phase de «re-légalisation», ne cherchent pas à disputer la suprématie au PBD - encore confortablement installé, quoique ayant connu un important recul électoral - mais bien de prendre date pour les futures joutes politiques en Egypte. C'est dans ce contexte assez particulier - marqué par la tension qui monte à Alexandrie et dans les gouvernorats concernés par le vote - que le syndicat des juges égyptiens - chargés du contrôle du scrutin - a fait hier appel à l'armée, comme l'y autorisent les textes constitutionnels égyptiens. «Les agressions dont ont été victimes de nombreux magistrats lors de la deuxième phase des élections ont démontré l'impuissance de la police, sinon son laxisme prémédité pour permettre aux gros bras de pénétrer dans les bureaux de vote, d'agresser les juges, de briser et incendier les urnes et de terroriser les électeurs», indique le Club des magistrats égyptiens dans un écrit publié hier. Outre les juges, qui doutent de la neutralité de la police qu'ils accusent de laxisme, de nombreuses ONG égyptiennes ont souligné ces derniers jours le climat de terreur et d'intimidation, qui règne en Egypte, accusant des hommes de main du parti au pouvoir, le PND, d'avoir fomenté ces troubles et incidents, qui ont marqué le scrutin, avant, pendant et après son déroulement (lors de la deuxième phase qui s'est tenue samedi et dimanche derniers. Ainsi, l'organisation égyptienne de défense des droits de l'homme n'a pas manqué de dénoncer le fait que dimanche (dernier) «Les violences ont été préférées aux fraudes» dans les gouvernorats de Port Saïd (nord), Alexandrie, Suez (nord) et Ismaïliya (nord), Commencées le 9 novembre, les législatives qui se déroulent en trois phases doivent s'achever le 7 décembre, avec dimanche le déroulement du deuxième tour de la seconde phase qui s'annonce délicat. De fait, en filigrane de tout ce remue-ménage, c'est encore le positionnement pour l'important rendez-vous présidentiel de 2011 qui se joue aujourd'hui lors du renouvellement de l'Assemblée du peuple, du fait que la Constitution, amendée au printemps derniers stipule que seuls les partis politiques disposant d'au moins 5% des sièges au Parlement (444 députés) peuvent présenter des candidats à la prochaine présidentielle d'où l'acharnement du PND d'empêcher d'autres formations politiques susceptibles de concurrencer son candidat (vraisemblablement le fils de Hosni Moubarak, actuel numéro 2 du PND) d'atteindre le taux fatidique des 5% que les Frères musulmans sont en phase d'atteindre soit lors du deuxième tour, qui a lieu samedi, soit lors de la troisième phase du scrutin prévue le 7 décembre prochain. Donc l'enjeu de ces législatives n'est plus de savoir si le PND continue d'écraser le Parlement égyptien, mais si sa marge de manoeuvre ne sera pas bousculée avec l'arrivée des islamistes avec lesquels le pouvoir en place devra désormais compter.