C'est au tour du tristement célèbre bagne de Tazmamart de dévoiler ses «secrets». Fès, Meknes, Casablanca...la liste des villes marocaines ayant été le théâtre dans les années 70 et au cours des années 80 de graves violations des droits de l'homme de la part du régime du Makhzen, continue de s'allonger. Ainsi, après la découverte à la fin du mois de novembre dernier, du lieu de l'enterrement de 106 personnes tuées par balles par les forces de sécurité marocaines, lors des violentes émeutes populaires de Fès en 1990, d'autres charniers viennent d'être exhumés. C'est ce qu'a annoncé vendredi l'instance Equité et réconciliation, créée en janvier 2003 par Mohammed VI pour «tourner la page des années de plomb au Maroc». Cette fois encore c'est au tour du tristement célèbre bagne de Tazmamart, qui a aussi tristement inspiré l'opposant marocain Abraham Serfaty, à dévoiler ses «secrets». Trente-deux tombes portant des épitaphes ont été découvertes à l'intérieur de ce bagne où avaient été internés de 1973 à 1991 des opposants au régime de Hassan II. Il s'agit de 30 militaires et de 2 civils. Cinquante-huit militaires impliqués dans les coups d'Etat manqués en 1971 et 1972 ont été incarcérés à Tazmamart dans des conditions effroyables, selon les témoignages de 28 rescapés de ce bagne. A noter que l'Instance a remis le 30 novembre au roi Mohammed VI son rapport final sur les violations des droits de l'homme lors des «années de plomb» au Maroc. La teneur du rapport doit être rendue publique après que le roi en aura pris connaissance. Ce n'est pas tout, puisque le lieu de l'enterrement de 77 personnes assassinées par balles par les forces de sécurité marocaines lors des violentes émeutes de 1981 à Casablanca a été retrouvé vendredi à l'intérieur d'une caserne de pompiers et les fouilles pour exhumer les corps ont été entamées, apprend-on samedi auprès d'une source proche de l'instance Equité et réconciliation. Les opérations d'exhumation des corps des victimes de la répression des émeutes populaires de 1981 à Casablanca se déroulent actuellement sous la supervision des autorités judiciaires et des services de sécurité de la ville. Selon plusieurs ONG marocaines des droits de l'homme, notamment l'Amdh, le travail de l'IER ne peut-être complet que si tous les dossiers liés aux disparitions forcées, notamment celui de Mehdi Ben Barka, sont traités, et que les responsables de ces graves violations des droits de l'homme soient nommément désignés et jugés. Les dernières découvertes interviennent au moment où des juges français séjournent dans le royaume chérifien dans le cadre d'une enquête sur l'assassinat de l'opposant marocain Mehdi Ben Barka. Des exactions commises sous le règne du roi Hassan II, et que son fils, voulant en finir avec cette période terne du royaume chérifien, compte définitivement classer. Serait-ce là une manière de charger les responsables de l'époque, notamment l'ancien homme fort du régime, à savoir Driss Basri, devenu ces derniers temps la bête noire et la cible à abattre pour les autorités marocaines? L'objectif est somme toute clair pour ces dernières: juger ses adversaires et tourner la page des atteintes aux droits de l'homme, qui ne viennent en réalité que dévoiler l'une des facettes les plus macabres des violations répétées des droits de l'homme sous Hassan II.