Le chef d'état- major en première ligne face à la rue. L'incertitude sur la suite qui sera imprimée aux événements reste entière. Sen tenir à la Constitution et confier l'intérim et l'organisation de l'élection aux hommes incarnant le système est une démarche disqualifiée par les manifestants vendredi dernier. Malgré la démission mardi dernier du président Abdelaziz Bouteflika, la mobilisation n'a pas faibli. Au contraire, par sa démonstration de force de ce vendredi, le peuple rejette la proposition de la mise en oeuvre d'une transition, en recourant à l'application, du moins seule, de l'article 102 de la Constitution. Si les Algériens sont à nouveau descendus très nombreux dans la rue, cela signifie qu'ils sont déterminés à se débarrasser du système dans son ensemble. La preuve en est que les protestataires ont appelé au départ des «3B», Abdelkader Bensalah, Tayeb Belaïz et Noureddine Bedoui, trois hommes-clés du régime Bouteflika aux deux premiers, la Constitution confie le processus de l'intérim. Ainsi, la démarche qui consiste en la désignation du président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah, au poste de chef de l'Etat par intérim, avec pour mission d'organiser une élection présidentielle dans un délai maximum de 90 jours, sous le contrôle du gouvernement en place est totalement «disqualifiée». Pour le mouvement, la démission de Bouteflika n'a jamais été une fin en soi, mais une condition sine qua non pour le «démantèlement du système». Le message politique est on ne peut plus clair: «Le peuple algérien veut un changement radical et il continuera à manifester jusqu'à sa concrétisation». En ce qui apparaît comme une course contre la montre: la procédure de l'intérim semble être enclenchée depuis jeudi dernier. Les bureaux de l' APN et du Conseil de la nation se sont réunis dans le cadre de l'activation de l'article 102 de la Constitution. Dans son message diffusé vendredi dernier, le vice-ministre de la Défense, Gaïd Salah, persiste sur le fait que «la majorité de la population a adhéré à sa proposition», tout en fustigeant «des parties qui veulent porter atteinte à l'armée». Gaïd Salah sera dorénavant l'homme fort dans le pays, notamment après la récupération de la direction des services de renseignement(DSS) coordonnés depuis 2015 par Athmane Tartag, qui a été démis de ses fonctions». Autrement dit, il sera en première ligne face à la rue. Par conséquent, il doit prendre des décisions, d'autant plus que le peuple, mais aussi les partis de l'opposition, ont unanimement rejeté l'option de la transition dans le cadre formel des dispositions de la Constitution. Le mouvement, qui réclame une transition gérée par les instances du mouvement et accompagnée par l'armée, refuse également un scénario à l'égyptienne où, faut-il le rappeler, le maréchal Sissi avait confisqué la révolte des jeunes Egyptiens contre le président Morsi issu des Frères musulmans.