Tlemcen est surtout connue par ses dizaines d'associations musicales dans le genre andalou, hawzi et medh (chants religieux). Voilà que l'association des enseignants de français de la wilaya de Tlemcen, présidée par le professeur Abdelhamid Bentabet, vient d'organiser, jeudi dernier, au lycée Ibn Tofaïl, un après-midi théâtral. Tout d'abord, une conférence fut donnée par Kamel Bendimered, critique de théâtre et ancien journaliste qui nous surprit en présentant quelques scènes de son oeuvre dramatique Le Patio ou Wast dar, jouée dans plusieurs festivals ou rencontres théâtrales dans plusieurs villes de France, dont Limoges (en 1995). L'orateur a réussi le tour de force, dans un auditorium «glacial» car non chauffé, à tenir en haleine les professeurs et les étudiants qui ont écouté religieusement les agencements d'extraits de textes et de poèmes puisés dans la littérature algérienne d'expression française de 1945 à nos jours. Dans cette plongée profonde dans la littérature algérienne, Kamel Bendimered a évoqué les problèmes de violence, d'identité, de culture, d'écriture de l'histoire à travers 40 bouquins dont: Nedjma de Kateb Yacine, L'incendie (la Grande maison de Mohamed Dib (sans oublier Mille houras pour une gueuse du même auteur, qui est une pièce de théâtre) La Colline oubliée de Mouloud Mammeri, Réda Houhou, Tahar Ouattar, Rachid Boudjedra, Assia Djebbar, Le fleuve détourné de Rachid Mimouni, etc. Autour de Hiba, personnage clé du Patio, les différents acteurs dans un pays « éperdu » viennent déclamer leurs souffrances et leurs douleurs depuis les événements du 8 mai 1945, la lutte de Libération nationale (1954-1962) et l'après-indépendance toujours avec les mêmes «violences» et, les mêmes discours et les mêmes erreurs. Kamel Bendimered a conseillé aux jeunes présents de lire ce «trésor» de la littérature algérienne, car toutes les oeuvres des écrivains cités renferment un pan de l'histoire du pays et peuvent constituer des pièces de théâtre où les problèmes d'identité, de culture, d'histoire sont posés crûment et sont toujours d'actualité. L'orateur évoqua une autre oeuvre dramatique en chantier puisée d'un récit, L'odyssée d'une religieuse au Sahara (1). Après cette conférence magistrale où notre collègue, Kamel Bendimered, a montré l'importance du texte dans toute son oeuvre théâtrale durable, Ali Abdoun, auteur et metteur en scène présenta la jeune troupe théâtrale dénommée : Compagnie du théâtre de l'Astuce de Tlemcen. Ces jeunes ont lu un montage ou « lecture théâtralisée » de l'oeuvre de Marcel Pagnol, Topaze, traduite en arabe par le collectif avec brio. Ces artistes en herbe qui ont un avenir certain dans l'art théâtral, ont posé crûment les problèmes de l'enseignement, à savoir les cours particuliers et leur coût, la situation sociale des enseignants, la notation et le système d'évaluation à la tête du client, des situations racontées par Pagnol qui ressemblent étrangement à celles que vit l'école algérienne à la croisée des chemins. Cette association de professeurs agréée depuis le 29 mars 2004 est très active et ambitionne, d'après son programme de 2006, de toucher les écoliers, les collégiens, les lycéens ainsi que les étudiants, les collègues en activité et ceux qui sont à la retraite. M.Bentabet, président, nous affirmera que «l'association qui a mis en place un groupe de travail sur le projet pédagogique des 1res années secondaires et ce, tout au long de l'année scolaire 2005-2006, lancera un journal, La Passerrelle, lien entre les professeurs de la discipline pour une école meilleure. Au niveau de la bibliothèque (Cinal), deux ateliers: l'atelier théâtre et l'atelier poésie permettront aux jeunes d'exprimer leur talent et leur savoir-faire . (1) L'odyssée d'une religieuse. Récit authentique écrit par Ziad Boufeldja qui relate son mariage raté avec une nonne (Editions Enal 1982 et Bouchène 1993).