Le médiateur américain, Anthony Zinni, tentait, hier, de trouver un consensus pour la mise en application du plan Tenet, alors que Tel-Aviv essayait d'exploiter l'affaire du bateau d'armes. La situation dans les territoires occupés, où la violence s'est progressivement réduite depuis la fin de l'année, demeure stable malgré les tentatives d'Israël d'embarrasser l'Autorité palestinienne avec une affaire de bateau d'armes qui tombe fort à propos surtout au moment de l'arrivée et du séjour du médiateur américain Anthony Zinni dans la région. Prié par l'émissaire américain de donner des «explications», Yasser Arafat, qui a, par ailleurs, démenti toute implication palestinienne dans cette affaire, a affirmé «ne rien savoir» promettant toutefois sa «pleine coopération». Ce que l'Etat hébreu, qui a entamé une campagne internationale d'information tous azimuts, veut faire passer pour l'affaire du siècle, semble entourée de trop de zones d'ombre pour, effectivement, être innocente. Surtout lorsque l'on sait que depuis sa prise de pouvoir en février dernier, le chef du gouvernement israélien, Ariel Sharon, a tout essayé pour disqualifier et délégitimer Yasser Arafat et l'Autorité autonome palestinienne. Aussi, la saisie par la marine israélienne du «Karine A» bateau chargé d'armes, ostensiblement dirigé, selon Tel-Aviv, par un responsable du Hezbollah libanais et dont le capitaine serait un officier supérieur de la police palestinienne, et l'équipage des policiers palestiniens, conforte par trop la thèse israélienne du «terrorisme» palestinien pour être réellement crédible. Notamment, lorsque les territoires palestiniens, occupés, sont bouclés par l'armée israélienne depuis quinze mois et que les Palestiniens subissent un contrôle draconien de la part des services de sécurité israéliens. Le moins qui puisse en être dit est que cette affaire, qui conforte la thèse israélienne, comporte beaucoup de non-dits d'autant que, placé sous le joug israélien, aucun Palestinien ne peut bouger, y compris le président Yasser Arafat encore une fois empêché, hier, de participer à la célébration à Bethléem du Noël orthodoxe. Sharon avait déjà interdit à Arafat de prendre part à la messe de minuit du rite latin. Comment des Palestiniens, qui ne peuvent pas se déplacer dans leur pays soumis à l'occupation israélienne, peuvent-ils importer une aussi grande quantité d'armes comme le soutiennent les Israéliens qui ont vite fait d'accuser l'Autorité palestinienne de se «diriger vers la guerre alors qu'Israël s'efforce d'obtenir un cessez-le-feu»? Et voici l'occupant israélien qui crie au loup, se transformant en victime d'un peuple palestinien qu'il opprime depuis un demi siècle. Cette affaire avait quelque peu éclipsé la visite d'Anthony Zinni, conseiller spécial pour le Moyen-Orient du président George W.Bush. De fait, le médiateur américain a rencontré, hier, successivement les principaux dirigeants israéliens et palestiniens pour tenter de réactiver le plan de cessez-le-feu du directeur de la CIA, George Tenet. A l'issue de ces entretiens, l'émissaire américain s'est déclaré «encouragé» confirmant la tenue, aujourd'hui, d'une «rencontre de sécurité israélo-palestinienne» qu'il présidera. Après une entrevue avec le ministre palestinien des Collectivités locales, Saêb Erakat, et le président du Conseil législatif palestinien Ahmed Qoreï, Anthony Zinni a indiqué à la presse qu' «il faudrait que les deux parties coopèrent et s'engagent sérieusement pour parvenir à un cessez-le-feu véritable et remettre sur les rails le processus (de paix)». Le médiateur américain quittera, selon Ahmed Qoreï, la région demain pour y revenir dans une douzaine de jours.