Au niveau de l'aéroport, un comité local de sûreté a été mis en place. Après la Chine, la grippe aviaire frappe de plein fouet la Turquie, la menace devient plus persistante pour notre pays. La vigilance et plus que jamais de mise. Istanbul constitue une destination de prédilection pour beaucoup d'Algériens. Les «trabendistes», en partie, mais aussi les hommes d'affaires, ou les simples touristes. 9 vols sont programmés par semaine, 3 sont assurés par Air Algérie et 6 par la compagnie Turkish Airlines. Ces donnes sont prises avec le sérieux exigé en Algérie. Au niveau de l'aéroport, un comité local de sûreté a été mis en place. Il est présidé par un Commissaire principal et composé de plusieurs secteurs, la santé, la douane, les représentants des compagnies étrangères et, bien sûr, Air Algérie. La cellule de crise travaille 24h/24 pour assurer la sécurité des passagers. 13h25 Le vol de Turkish Airlines en provenance d'Istanbul atterrit sur le tarmac de l'aéroport de Houari-Boumediene à Alger. L'ambiance est très tendue ici. Depuis quelque temps, la destination est classée à risque. La grippe aviaire a déjà tué 9 personnes en Turquie. Premier constat, le profil des voyageurs a changé. Hier, la majorité d'entre eux étaient des pèlerins. C'est loin d'être un hasard. «Depuis quelques semaines, nous assistons au même scénario. Pratiquement, il n'y a que les hadji qui prennent le vol de la Turquie», nous précise une source proche de la compagnie rencontrée au niveau de l'aéroport. Une grosse perte pour Turkish Airlines. La situation inquiète sérieusement les responsables qui parlent d'une baisse de 14% du chiffre global des voyageurs. Sur le terrain, nous avons constaté que l'ampleur de la perte est beaucoup plus importante. Turkish Airlines a en réalité perdu 70% des clients à cause de la maladie de la grippe aviaire. La compagnie, qui naturellement a refusé de confirmer cette information détenue de sources sûres, a reconnu qu'«un nombre important de clients se présentent quotidiennement pour annuler leur voyage». Nous avons rencontré l'un d'entre eux, il s'agit de Amine 40 ans, «trabendiste» de carrière. «Vraiment, je n'ai pas envie de risquer ma vie et celle de ma famille, je préfère jouer l'assurance, dans l'espoir que les choses vont s'améliorer dans les jours qui viennent.» Amine fait le voyage en moyenne 6 fois par an. La compagnie turque n'a d'autre choix à l'heure actuelle que de se plier à la situation d'urgence. «Nous ne pouvons pas convaincre les gens à faire ce voyage s'ils jugent qu'il est à risque, même si nous sommes une compagnie commerciale. La santé des voyageurs passe avant tout» affirme-t-il sur un ton presque abattu. Retour au vol de Turkish Airlines, qui vient d'atterrir. Après avoir passé le poste de contrôle de la police des frontières, Ergïjn Ozuenan, de nationalité turque récupère ses bagages. Dans d'autres circonstances, ce dernier aurait quitté l'aéroport en quelques minutes. Les donnes ont changé. Et la fouille est devenue de plus en plus approfondie. Le scanner a détecté un objet suspect. «Pouvez-vous ouvrir la valise s'il vous plaît?» l'apostrophe l'agent de contrôle, alerté par le signe «S» collé sur les bagages suspects. Ergïjn coopère. Mais ce n'est là qu'une fausse alerte. L'on ne trouvera ni volaille ni viande, ni aucune nourriture dans le bagage de cet ingénieur, en poste en Algérie depuis sept mois. L'agent de contrôle est soulagé. Nous aussi. La fouille ne semble pas gêner les voyageurs, qu'ils soient algériens ou étrangers, bien au contraire. Ergïjne pense que «ce dispositif est normal. Même en Turquie le contrôle est très rigoureux». Nous avons saisi cette opportunité pour interroger les Turcs sur le climat général dans leur pays. La réponse a été plus que rassurante. «Personnellement je n'ai pas paniqué, simplement je ne mange plus de volaille depuis trois semaines», précise un sexagénaire. Parmi les voyageurs repérés hier sur le vol de Turkish Airlines nous avons remarqué plusieurs Chinois, pratiquement avec les hadji, les seuls qui sont restés fidèles à la Turquie, de l'avis même de la compagnie. Et à l'aéroport d'Alger tous les bagages chinois passent systématiquement au contrôle approfondi, ce qui est tout à fait normal sachant que ce pays a déjà un antécédent avec la grippe aviaire. «C'est loin d'être une mesure discriminatoire mais nous sommes appelés à être très vigilants avec eux », nous précise notre interlocuteur. Sachant qu'il n'y a pas de vol charter vers la Chine, les voyageurs de ce pays résidents, ou de simple passage à Alger, n'ont d'autre choix que de transiter par la Turquie pour rejoindre leur pays. Et c'est la compagnie Turkish Airlines qui assure la correspondance. Malgré eux, les voyageurs venant de la Turquie deviennent des cibles suspectes. Et ils en ont conscience. «Après trois mois en Turquie, je pense qu'il sera plus prudent pour moi de passer une visite médicale à Alger», nous dit Salim qui n'a même pas les signes de la grippe ordinaire. «J'avoue que j'ai peur même si je n'ai pas touché à la volaille depuis des mois», ajoute Malika. Un autre vol, cette fois-ci, à destination de la Turquie, à partir de l'aéroport d'Alger, est programmé à 14h30. Beaucoup de Chinois y sont inscrits. Nous avons rencontré les quelques Algériens qui ont décidé de garder leurs billets. Redha, 45 ans, partira à Istanbul «pour affaires». Et pour lui, aucun risque d'être contaminé par le virus: «J'irai pour deux jours seulement, et bien sûr je ne toucherai pas à la viande». Au niveau de l'aéroport, des prospectus sont distribués aux voyageurs dans lesquels on peut lire: «Evitez tout contact avec les volailles. Evitez la consommation de produits carnés. A votre retour en Algérie, évitez d'introduire tout type d'oiseau de compagnie». Selon un responsable rencontré au niveau du poste de contrôle «zone sous douane», il n'a pas été procédé jusqu´à la date d'hier à la saisie de produits suspects. «Les voyageurs sont conscients du danger.» Les personnes suspectes passent par un contrôle médical. «Depuis le début de la crise nous avons procédé à la mise en quarantaine, pour quelques minutes, de près de cinq personnes seulement mais le contrôle a conclu qu'elles ne portaient pas le virus.»