De 1989 à nos jours, des milliards de centimes ont été gaspillés dans des AG de cette fédération. C'est aujourd'hui qu'aura lieu l´assemblée générale élective de la FAF. Une de plus dans l´histoire tourmentée de cette fédération décidément pas comme les autres. C´est qu´il y a le football au milieu, ce sport qui a transformé la société au point d´en devenir un phénomène. Tellement, d´ailleurs, qu´il bénéficie du pouvoir politique de nombreux pays d´une extrême attention. En Algérie particulièrement où le ministère de la Jeunesse et des Sports l´accompagne dans tous ses faits et gestes et le surveille comme le lait sur le feu. L´histoire retiendra que l´AG d'aujourd'hui intervient 4 années après la précédente , celle qui avait porté Mohamed Raouraoua et son équipe au poste de commandement de cette fédération. Depuis l´avènement du processus démocratique dans le sport en 1989, c´est bien la première fois qu´un président et son bureau fédéral allaient au terme de leur mandat. Il y a bien eu Omar Kezzal en 1992 mais en partant et en quittant la salle où elle se déroulait, il avait laissé l'AG se transformer en AG de la honte et du scandale. En dehors de cela, pas un président, pas un bureau fédéral n´a pu résister aux coups de boutoir de l´administration centrale qui réagissait le plus souvent dès qu'un mauvais résultat de l'EN était enregistré. On rappellera seulement qu´au lendemain des évènements d´octobre 1988, le pouvoir politique s´était servi du sport pour tester la démocratie avant de donner son feu vert pour la création de partis politiques. C´est par le renouvellement des structures dirigeantes des fédérations et des ligues sportives qu´il avait lancé la «mode» du choix par les urnes de ceux qui sont appelés à diriger. A ce titre, l´été 1989 avait été celui du grand chambardement au sein des fédérations dont les présidents et les bureaux fédéraux avaient été désignés au terme de scrutins pour lesquels plusieurs candidats pouvaient postuler. Le retour de Kezzal L´AG élective de la FAF avait eu lieu par une douce soirée du mois d´août à la Coupole du Complexe olympique. Elle avait débuté aux environs de 16h00 et elle s´était achevée aux environs de 1 h00 du matin. C´est qu´à l´époque il y avait du «peuple» dans cette AG. Près de 400 membres. L´AG s´était déroulée sous la direction d´une commission ministérielle chargée du suivi des élections de toutes les fédérations sportives et dirigée par Hamid Oussedik, un des cadres du MJS. A l´époque, le sport était régi par la loi 89-03 et ce processus électoral se déroulait, selon ses dispositions. L´AG avait été longue parce qu´il fallait, dans un premier temps, élire 32 membres du Conseil fédéral, une structure tampon entre le bureau fédéral et l´assemblée générale chargée de contrôler le travail du BF. Dans ce Conseil, le MJS devait désigner 16 personnes pour porter à 48 le nombre de ses membres. Ces 16 personnes étaient ce qu´on appelait le «tiers bloquant» du pouvoir, celui grâce auquel il avait mainmise sur tout ce qui se décidait à la FAF. La seconde étape du scrutin concernait le bureau fédéral pour lequel le Conseil fédéral devait élire 9 membres en son sein, le MJS en désignant 4 pour porter à 13 le nombre de personnes devant siéger au sein du BF. Enfin, dernière étape, les 13 membres du BF s´étaient réunis entre eux, assis autour d´une table, dans un coin de la Coupole, devant toute l´assistance, pour élire celui qui devait normalement diriger la FAF jusqu´en 1992, année des Jeux olympiques de Barcelone. L´élu avait été Omar Kezzal, celui-là même qui avait dirigé cette instance entre 1983 et 1984 avant d´être remercié par le MJS pour une histoire de match amical Suisse-Algérie qui n´avait jamais eu lieu, histoire pour laquelle il ne pouvait être associé vu qu´au moment des faits il était en France pour des soins. En tout cas, son retour à la FAF en 1989 s´était soldé par les meilleurs résultats sportifs de notre football depuis l´épopée de 1982 et de 1986. Omar Kezzal, reste à ce jour, le président de la FAF qui a obtenu le plus de trophées tant avec l´équipe nationale qu´ avec les clubs. Avec la première, il avait remporté la CAN 1990, organisée par notre pays et la Coupe afro-asiatique des Nations. Avec les clubs, il a eu avec la JSK la Coupe d´Afrique des champions en 1990 et la Coupe afro-asiatique des clubs avec l´ESS en 1989. Malheureusement pour lui, il y a eu la CAN 1992 au Sénégal avec une élimination de l´EN dès le premier tour. Cette sortie jugée humiliante par le pouvoir en place lui valut sa disgrâce en 1992 au terme d´une AG houleuse. La FAF était, alors, tombée dans le provisoire étant gérée par son secrétaire général, Reda Abdouche, alors que la gestion du championnat national relevait du CPGCN dirigé par feu Youcef Khalef. Des années d'errements Un provisoire qui devait durer jusqu´aux éliminatoires de la CAN 1994 et la fameuse affaire Karouf, du nom du joueur de la JSK, que l´on avait aligné dans un match officiel contre le Sénégal alors qu´il était suspendu. Résultat des comptes, l´EN, pourtant qualifiée pour la phase finale sur le terrain, avait été disqualifiée par la CAF et remplacée par celle du Sénégal. Nous étions en 1993 et le MJS, sous la direction de Sid Ali Lebib, avait, enfin, décidé de pourvoir la FAF d´un nouveau président. Il avait opté pour Mouldi Aïssaoui, un ex-joueur de l´USM Alger, retiré des affaires du football pour se consacrer à son métier de chirurgien dentiste. Et Aïssaoui avait été élu contre 3 adversaires qui se nommaient Ahmed Kraïmia, Abderahmane Bergui et Saïd Amara lors d´une AG qui avait eu lieu à l´amphithéâtre de l´ISTS. La mission première du nouvel élu avait consisté à se débarrasser de tous les membres qui ne lui convenaient pas et que le MJS avait désignés pour ramener ceux que lui avait choisis. Cette démarche lui avait valu l'animosité du ministre, qui dès lors avait cherché à le «dégommer». Aïssaoui, malgré de multiples pressions avait réussi à résister mais au bout du compte il avait fini par céder. Il n´était resté même pas un an à la tête de cette fédération. Septembre 1994 avait vu, feu Rachid Haraïgue, accéder à la tête de la FAF à l´issue d´une AG organisée par les services du MJS à la Coupole du Complexe olympique. Il l´avait emporté d´extrême justesse sur Larbi Brik, le président de la ligue régionale d´Oran. Malheureusement, la présidence de Haraïgue n´allait pas durer puisqu´en janvier 1995, il avait été assassiné, devant son domicile, par des terroristes. C´est Larbi Brik qui lui avait succédé en sa qualité de 1er vice-président. Ce dernier n´était resté en poste que jusqu´au mois de février 1996 alors qu´il restait, avec l´EN, sur un bon résultat: une qualification aux quarts de finale de la CAN 1996 qui s´était déroulée en Afrique du Sud. Il faut dire que fin 1995 avait vu Mouldi Aïssaoui accéder au poste de ministre de la Jeunesse et des Sports. Avec lui, il était certain que le BF allait être soumis à une terrible pression. De retour d´Afrique du Sud, Larbi Brik n´avait, d´ailleurs pas hésité, à stigmatiser cette pression. Suite à cela, il avait été prié de démissionner. Ce qu´il avait fait pour être remplacé par Saïd Amara. Même avec celui-ci, la pression n´avait pas cédé. Le point culminant avait été atteint en juin 1996, au soir de l´élimination de l´EN au stade du 5- Juillet de la Coupe du monde de 1998 par l´équipe du Kenya. Ce soir, alors que l´arbitre du match avait encore son sifflet dans la bouche pour signifier la fin du match, des responsables du MJS étaient venus à la tribune de presse distribuer aux journalistes un communiqué indiquant que des décisions importantes allaient être prises et qu´elles allaient être annoncées par le ministre en conférence de presse. Trois jours plus tard, Mouldi Aïssaoui annonçait la suspension du bureau fédéral, de son président et la dissolution de la LNF. C´est le secrétaire général de la FAF, Fawzi Boubaha, qui avait été chargé d´expédier les affaires courantes jusqu´à l´élection d´un président. Mais Saïd Amara ne s´était pas laissé faire. Sûr de son droit, il était allé frapper à toutes les portes, notamment celle du ministère des Moudjahidine en sa qualité de membre de l´équipe du FLN. Ne voyant rien venir, il s´était tourné vers la FIFA à laquelle il avait raconté tout ce qu´il avait subi. Entre-temps, l´administration avait organisé une AG ordinaire sans la participation des principaux concernés, à savoir les membres du bureau fédéral déchu. Ceux-ci avaient, bien sûr, été désavoués dans leur action. Cependant, le travail de Saïd Amara auprès de la FIFA devait porter ses fruits car l´AG élective de la FAF qui avait été, par la suite, organisée, toujours sous la conduite de l´administration centrale, l´avait été sous la supervision du secrétaire général de la FIFA, Michel Zen Rufinen. Ce dernier avait observé et s´était contenté de rassurer tous ceux qui l´avaient choyé et dorloté depuis son arrivée à Alger. «Ce fut une belle AG», avait-il dit pour amadouer ceux qui l´avaient reçu et celui qui avait été élu président de la FAF, à savoir Mohamed Laïb. De retour à Zurich, il s´était empressé de faire rédiger une lettre à Fawzi Boubaha pour lui faire savoir que la démarche suivie n´était pas la bonne et qu´il fallait, à tout prix, que Saïd Amara et son équipe viennent en AG défendre leurs bilans. L´AG ordinaire avait, donc, eu lieu à la Coupole avec tous les membres du BF déchu mais le jeu était fermé tant la pression de l´administration était forte. D´où le rejet des deux bilans. Mais la FIFA avait senti cela et avait exigé de refaire toute l´AG élective. En d´autres termes, Mohamed Laïb n´était plus président et devenait le président de la FAF le plus éphémère de 1 ´histoire de notre football. En se retirant, ce dernier avait laissé la place à un comité composé des présidents des 6 ligues régionales chargées de préparer la future AG élective. Une fois de plus, les manoeuvres et blocages allaient entrer dans le jeu. Le vote allait se bloquer sur une liste de 32 noms, une liste dressée par ceux qui voulaient à tout prix faire main basse sur le football pour de simples considérations clubardes. Ce soir-là, la tricherie avait été tellement manifeste qu´un groupe de membres de l´AG avait déposé un recours. Une vaste campagne médiatique avait, alors, dénoncé la tricherie. Trois jours plus tard, à l´amphithéâtre de l´ISTS, ceux qui avaient été élus dans le Conseil fédéral attendaient sagement de repasser au vote pour élire leur BF et son président. Cependant, au dernier moment, il y avait eu intervention du MJS qui avait décidé de suspendre le processus. Mouldi Aïssaoui parti, le portefeuille du MJS avait échu à Aziz Derouaz. Bénéficiant de la promulgation de l´ordonnance 95-09 sur le sport, il avait élaboré, en 1997, un nouveau décret sur les fédérations sportives par lequel il avait modifié les statuts de la FAF et réduit de moitié la composante de son AG. La FAF était dirigée par un cadre du secteur du sport, à savoir Saïd Bouamra et c´était lui qui avait procédé à la mise en conformité des statuts puis préparé et organisé l´AG élective qui devait porter l´ex-président du MOC, Mohamed Diabi, à la présidence de la FAF. Un Mohamed Diabi, dont le mandat avait été marqué par une participation catastrophique de l´EN à la CAN de 1998 (trois matches, trois défaites) mais que personne n´avait osé contester. La présidence de Diabi allait être, également celle des différends qui opposaient entre eux les membres du BF. Pourtant, lorsqu´il s´était agi de «démissionner» Mohamed Diabi, ils avaient su s´allier et voter une motion de défiance à l´égard de leur président. Mais le MJS n´avait pas accepté un tel procédé et mis tout ce monde sur la touche, Diabi y compris. La gestion de la FAF était, une nouvelle fois, revenue sous la coupe de l'administration centrale qui y avait délégué un de ses cadres, Hassen Chikh, pour gérer l´intérim. Un intérim qui devait durer près de 9 mois pour aboutir en 1999 à l´élection de Omar Kezzal contre celui dont on disait qu'il était le candidat du pouvoir, Rachid Mekhloufi. Kezzal devenait, ainsi, le seul président à avoir été élu pour trois mandats. Mais ce dernier devait être poursuivi par les mauvais résultats de l´EN, notamment avec une élimination de la Coupe du monde 2002. Sous la pression de l´administration centrale, des membres du bureau fédéral s´étaient, donc, mis en opposition par rapport à leur président et ce bras de fer devait tourner en leur faveur puisque l´AG qui avait suivi, avait désavoué Omar Kezzal qui avait dû quitter la scène. 2001 a été celle de la consécration de Mohamed Raouraoua. Ce dernier allait changer bien des choses, notamment en transformant totalement la FAF à laquelle il a rendu toute sa crédibilité. S´il est vrai que les échecs de l´EN se sont poursuivis (mais cela ne saurait être mis entièrement sur le dos de la fédération pour absoudre les pouvoirs publics dont la responsabilité dans ce désastre est engagée car la politique sportive et du football est de leur ressort) nul ne contestera le fait que c´est sous la conduite de Raouraoua que la FAF a été réhabilitée et que la gestion du championnat national est devenue plus crédible. Ces histoires d´AG de cette fédération depuis une quinzaine d´années font ressortir la gabegie qui s´était instaurée ainsi que l´incroyable gaspillage d´argent dans l´organisation de ces AG et dont certaines s´étaient avérées inutiles. Elles font ressortir surtout les cascades d´erreurs de l´administration centrale constamment à la recherche de l´oiseau rare et qu `elle n´a jamais pu trouver. Dans les années futures, on parlera de ces péripéties comme ayant été de grosses tâches noires dans l´histoire du sport algérien dues à cause de gens qui ont toujours cru détenir la vérité alors qu´ils étaient dans l´erreur. Parce qu'au lieu de chercher à structurer les clubs, véritable socle du système, puis de les doter de moyens pour leur permettre de se développer et de se lancer dans une grande politique de formation, on s'est focalisé sur la fédération, et à travers elle, aux résultats de l'équipe nationale. On s'est obstinément penché sur le sommet alors que la base était complètement déglinguée. Ce n´est pas servir le sport que d´agir de la sorte.