Adapté du livre de Madeleine Bourdouxhe, par le réalisateur Frédéric Fontegne, le film traduit l'image de la femme moderne qui va jusqu'au bout de son amour au prix de la souffrance. Année 1930, dans un milieu ouvrier. Une femme, Elisa, travaille dans les hauts-fourneaux, parfois le jour, parfois la nuit. Elle s'occupe des enfants, de la maison et vit chaque jour dans l'attente du retour de son mari Gilles. Victorine est la soeur d'Elisa, elle travaille depuis peu dans un magasin en ville et vient souvent rendre visite à sa soeur pour jouer avec les enfants et donner un coup de main. Elisa attend un enfant. Et puis un jour, un pressentiment devient obsession, il se passe quelque chose entre son mari (Clovis Cornillac) et sa soeur (Laura Smet). Commence alors pour Elisa (Emmanuelle Devos) la descente aux enfers. Le coeur déchiré, elle se taira cependant, la mort dans l'âme, attendant que l'orage de sa vie passe. Réalisé par Frédéric Fontegne La Femme de Gilles est une merveilleuse adaptation du livre portant le même nom et signé Madeleine Bourdouxhe. Le film est porté par l'excellent jeu des acteurs dont Emmanuelle Devos qui incarne à l'écran ce modèle de femme moderne qui va jusqu'au bout de sa passion amoureuse même au prix de la douleur et de la souffrance intérieure. «Je voulais faire un film très simple, très brut. Qu' il y ait cette simplicité. Le roman parle d'une femme qui vit à cette époque-là. J'ai été très touché par ce personnage qui reste moderne car elle n'est pas soumise et opte pour une forme de liberté dans ses choix.» Connaissant bien le roman, Nadia Benzekri, la petite-fille de l'auteur, présente, elle aussi, samedi dernier, lors de la projection en avant- première du film, grâce à l'association Chrysalide, abondera dans le même sens d'idées, faisant remarquer que cette femme qui «n'est pas du tout soumise, accepte que son mari la trompe car c'est une personne libre, convaincue de ses sentiments. C'est ce qui peut être dérangeant.» A l'image de Madeleine Bourdouxhe, le personnage féminin ici, qui découle de sa plume, paraît certes, en avance sur son temps, d'où ce halo de mystère qui continuera à envelopper l'existence de cette femme, Elisa, même à la fin du film... Une fragilité des sentiments traduits avec force grâce à ce silence strident, finalement, qui émane de l'état expressif d'Emmanuelle Devos, remarquable et vraie, dans la peau d'Elisa. Ceci est ainsi de l'ordre de l'importance quand on voit et constate que cette histoire d'amour est vue à travers le regard de la victime qui le devient notamment à partir du moment où son mari cesse d'aimer sa soeur. Détruits de l'intérieur avec ce poids du vide qui les submerge, l'un finit dans la colère et le désespoir, l'autre par se suicider... Une tragique histoire intime qui se nourrit d'amour et d'illusion. On comprend le succès phénoménal de ce film et surtout pourquoi il n' y en a pas eu d'autres après. Comment faire un livre plus fort après? Un des moments sublimes de ce Festival du film Européen, La femme de Gilles sera projeté une seconde fois le jeudi 26 janvier à 16h30, à la salle Ibn Zeydoun.