Bensalah insiste sur le maintien du Conseil de la nation, en cas de révision de la Constitution. Le chef de l'Exécutif persiste et signe : pas question d'augmentation des salaires, du moins dans l'immédiat. Au moment où le front social est en pleine ébullition, Ahmed Ouyahia prend ainsi tout le monde à contre-pied. Pire, le chef du gouvernement est allé, hier, en marge de la clôture de la session du Sénat, qualifier toute augmentation des salaires, d'«illégitime». A quelques encablures de la tripartite, dont la date n'a pas encore été fixée, M.Ouyahia se confine dans une approche purement «légaliste» mettant de côté une revendication pourtant, on ne peut plus légitime des travailleurs. Hier, le chef de l'Exécutif a apporté une réponse claire aux syndicalistes, en les incitant à relire les décisions prises lors d'un conseil des ministres de 2004 où il était question d'inflation et tutti quanti. Il a ainsi déclaré que «l'augmentation des salaires obéit aux normes du modèle mondial, à savoir la croissance, l'inflation et la rentabilité », ajoutant qu'on ne peut, à l'heure actuelle, «s'aventurer» quant à l'utilisation des recettes d'hydrocarbures. Cette sortie intervient alors que gouvernement, Ugta et patronat préparent la tenue de la tripartite où la question des salaires est considérée comme centrale par le partenaire social de l'Exécutif. A quelques semaines de son prochain congrès, l'organisation syndicale se voit ainsi affaiblie face à une base de plus en plus revendicative sur la question des salaires justement. La déclaration de Ahmed Ouyahia n'est donc pas, sans jeter un froid dans les relations pouvoir-syndicat au moment où tout le monde semble d'accord pour la conclusion du fameux pacte social, qui s'en trouve, de fait, compromis. Dans la logique du chef du gouvernement, la création d'emplois est nettement plus prioritaire que la revendication d'augmentation des salaires. A ce propos, il n'a pas manqué d'évoquer le démarrage des grands chantiers inscrits dans la loi de finances 2006, notamment dans le Grand Sud et les Hauts-Plateaux. A cet égard, il a souligné que «l'anarchie ne mène à rien» et que le «gouvernement est responsable de 32 millions d'Algériens» ajoutant que les préoccupations du gouvernement sont focalisées sur les 1,4 million de chômeurs. Ouyahia s'est attardé également sur la loi anticorruption, en invitant les journalistes à bien surveiller ce qui s'écrit sur le Journal Officiel parce qu'il se peut que des noms de personnes qui n'ont pas déposé leur déclaration sur le patrimoine soient relevés. Difficile de savoir s'il s'agit d'une plaisanterie puisqu'il rappelle qu'hormis l'article 7 qui n'est pas passé, les autres clauses de la même loi obligent tous les cadres de l'Etat à déposer leur déclaration dans un délai de deux mois. Mais il admet aussi que tout recours à la levée de l'immunité parlementaire relève des compétences du seul Parlement. Cela est spécifié dans la loi organique de 1997. En tout état de cause, la polémique autour de l'article 7 n'est qu'«une tempête dans un verre d'eau», conclut-il. De son côté, le président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah, a tenu un discours de clôture conciliant, même s'il ne voit aucune utilité à supprimer l'institution qu'il préside. Il a déclaré: «Sur le plan du principe, nous ne sommes pas contre l'amendement ou la mise en conformité des textes de loi, quelle que soit leur importance, mais nous disons aussi que l'écueil ne se situe pas dans la suppression de telle ou telle institution constitutionnelle mais dans la manière de réactiver ces institutions.» Il répond, de la sorte, aux sollicitations de partis et de personnalités politiques qui revendiquent la révision de la Constitution et la suppression du Sénat. Le président du Sénat a mis l'accent sur la nécessité de la révision du code de l'APC. «Cette démarche est soutenue par la réalité des changements dans tous les domaines, ainsi que la réalité des mutations au sein de la société qui exigent le changement de la philosophie même du pouvoir. Nonobstant le fait que la loi en vigueur reste jusqu'ici impuissante à trouver des solutions aux situations de blocage dans des APC et des APW», énonce-t-il. Cela semble constituer une priorité, dans l'allocution de Bensalah, à l'orée des élections locales qui auront lieu dans moins de deux ans, si ce n'est moins. Mettant en exergue les lois votées par son institution, il a dressé un bilan satisfaisant. Il a insisté également sur la création d'un Parlement arabe transitoire qui exprime, à ses yeux, une grande prouesse dans le sens où sa création a été annoncée au sommet arabe qui s'était tenu à Alger.