Le ministre algérien des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum, s'est rendu, hier matin, à l'aéroport de Benina, dans la ville libyenne de Benghazi, pour une visite surprise en vue de rencontrer le général à la retraite Khalifa Haftar. C'est ce qui ressort du communiqué rendu public, hier, par le ministère des Affaires étrangères du gouvernement de l'Est, qui n'est pas reconnu par la Communauté internationale. L'objet de cette visite n'a pas été révélé mais une source libyenne, proche des autorités de l'Est a indiqué que le ministre algérien des AE a eu des entretiens avec plusieurs responsables dont Khalifa Haftar qu'il a rencontré dans la base d'al Rajmah, à quelques dizaines de km de Benghazi. Entre-temps, Boukadoum a été reçu par le chef du gouvernement intérimaire, non reconnu par la Communauté internationale, Abdullah al-Thani, dont les quartiers sont toujours à Tobrouk. De toute évidence, il apparaît que ce déplacement du ministre algérien des Affaires étrangères s'inscrit dans le cadre des efforts de médiation que l'Algérie déploie afin de relancer le processus de dialogue politique, seul à même de résoudre la crise libyenne. Cette démarche découle, en outre, des décisions importantes qui ont caractérisé la Conférence internationale sur la Libye, le 19 janvier dernier, à Berlin ( Allemagne ) à laquelle ont participé 12 pays et 4 organisations internationales et régionales (Nations unies, Union africaine, Ligue arabe et Union européenne). Boukadoum a été accueilli à l'aéroport de Benina par le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale du gouvernement de Benghazi, Abdelhadi Haouidj, et par le chef d'état-major des Forces aériennes, Sekker El Djerrouchi. Cette visite intervient, en outre, après la rencontre à Alger des ministres des Affaires étrangères des pays voisins de la Libye qui ont réaffirmé le rejet de l'intervention étrangère en Libye et appelé à une solution politique entre les parties libyennes au conflit et elles seules. Ainsi faut-il rappeler la venue d'une délégation du général à la retraite Khalifa Haftar, conduite par Abdeslem Al-Badri, vice-président du Conseil des ministres, le 11 janvier dernier, à Alger. L'Algérie qui a redéployé une intense activité diplomatique et politique autour de la crise libyenne, allant de la Conférence de Berlin à celle de Brazzaville, convoquée par le président du Comité de haut niveau de l'Union africaine, a mené d'intenses consultations, tant auprès du groupe des pays voisins dont la Tunisie, voici à peine quelques jours, qu'au niveau du Conseil de sécurité de l'ONU pour remettre à l'ordre du jour la feuille de route onusienne dont le médiateur onusien Ghassan Salamé est porteur. Si l'on s'en tient aux signes prometteurs que constituent les pourparlers actuels sous l'égide de l'ONU, à Genève, entre les chefs militaires des deux principaux protagonistes de la crise, en vue de transformer la trêve arrachée à Moscou en cessez-le-feu durable et de valider celui-ci par une commission de surveillance commune, il apparaît que les initiatives de la diplomatie algérienne soient en train de porter leurs fruits. Alger active dans une totale discrétion et, fidèle à sa doctrine, travaille, sans tambour ni trompette, à apaiser la situation pour le plus grand bien de la région et dans l'unique souci de préserver les intérêts du peuple frère libyen, son intégrité et sa souveraineté. La déclaration finale de Berlin, avec ses 55 points et 7 rubriques, fixe le cadre du processus politique tel que défendu avec constance par l'Algérie, un processus qui demeure primordial dès lors que le rapport final de la Conférence de Berlin était destiné à satisfaire tous les participants, sans proposition solide de solution pour la fin de la crise en Libye. Le fait que de nombreux acteurs interfèrent dans ce conflit et ont la capacité d'influencer ledit processus, dans un sens plutôt qu'un autre, montre à quel point le défi est complexe. Cela, la diplomatie algérienne le sait et le prend en considération, dans la mesure où ses recommandations sont conformes à la légalité internationale qui, dans les résolutions du Conseil de sécurité, réaffirme l'indépendance, la souveraineté, l'intégrité territoriale et l'unité nationale de la Libye. C'est-à-dire, comme elle l'a sans cesse rappelé, que la solution de la crise ne relève nullement des enjeux militaires mais qu'elle dépend, totalement, du processus politique engageant tous les Libyens, sans exclusive.