Alors que les syndicats avancent un taux de suivi de plus 85%, le ministère parle de son côté de 24% seulement. Jugée «illégale», par la chambre administrative du tribunal d'Alger, la grève de trois jours à laquelle a appelé la Coordination de l'intersyndicale de l'éducation a été massivement suivie, et ce, à l'échelle nationale, à en croire les syndicalistes. En effet, en dépit de quelques régions où le suivi s'est fait dans le désordre, la grande majorité des établissements scolaires, a connu dans la journée d'hier, une paralysie presque totale. Les portes des lycées, des collèges et même des écoles primaires étaient fermées dès les premières heures de la journée. Cet état de fait a été, en tout cas, perceptible dans la capitale. Lors de notre tournée dans quelques établissements scolaires d'Alger, nous avons constaté que les enseignants et les travailleurs de l'éducation étaient largement favorables au mot d'ordre lancé par les syndicats. Du lycée El Idrissi, au lycée Emir Abdelkader, en passant par le lycée Barberousse à Alger-Centre et le lycée Hassiba Ben Bouali à Kouba, la grève a été assez bien suivie. Au lycée El Idrissi, au Champ de manoeuvres, le taux de suivi était, selon les travailleurs rencontrés sur place, de 85%. Dans une déclaration à L'Expression, le chargé de l'information au Cnapest, M. Lemdani, a estimé que le mot d'ordre de grève a été largement suivi. «Sur la totalité de 112 lycées que compte la capitale, je peux vous vous dire qu'environ 85% des établissements ont été paralysés», a-t-il estimé. Son collègue du CLA (Conseil des lycées d'Alger), M.Boukhetta Mohamed, confirme les propos de M.Lemdani. «Le taux de suivi est massif dans tous les établissements du pays», a-t-il déclaré, tout en estimant que la participation sera encore plus forte aujourd'hui et demain. Concernant les autres wilayas du pays, le même climat a caractérisé la première journée d'hier. Cela à l'exception d'Oran, où le suivi a été mitigé. Dans la wilaya de Tizi Ouzou, les élèves des communes de Maâtkas, des Ouadhias, de Draâ El Mizan, et de Aïn El Hammam, sont rentrés également tôt chez eux. Le même scénario a été observé dans la wilaya de Bouira où le taux de suivi avoisine les 80%. Cependant, les écoles primaires de Bouira n'ont pas suivi le mot d'ordre de grève. Globalement, l'adhésion des travailleurs et enseignants à la grève qui a débuté hier, est jugé très élevé par rapport à celle des 15 et 16 janvier dernier. Le constat s'applique largement à Béjaïa, où la paralysie était totale. L'ensemble des établissements scolaires de la wilaya n'ont pas ouvert hier. Les enseignants, en total accord avec leurs syndicats, semblent très déterminés. Dans cette wilaya, au même titre que Tizi Ouzou, même les sections syndicales affiliées à l'Ugta ont adhéré à la grève. Pis, à Béjaïa, ce syndicat a appelé ses adhérents à une journée de protestation le jeudi prochain, suivie d'une marche dans le centre-ville. Une marche à laquelle a appelé le syndicat local, le Sete, est programmée pour aujourd'hui. Les enseignants de Constantine n'ont pas manqué à l'appel. Le mot d'ordre de grève a trouvé un grand écho, aussi bien dans les collèges, les écoles primaires que dans les lycées. A El Khroub, par exemple, l'action était suivie massivement. Idem pour El Hamma. Dans le centre-ville, par contre la grève était suivie dans le désordre. En effet, à l'exception du lycée Yougurtha, les autres ont assuré les cours le plus normalement du monde. A Chlef, le taux de participation a dépassé les 95%, apprend-on de source locale. La grande majorité des 706 établissements que compte la wilaya, entres lycées, collèges et écoles primaires, ont répondu à l'appel de l'intersyndicale. Cette première journée de débrayage est qualifiée par les syndicalistes de double victoire. «Cette forte participation» est en effet le meilleur moyen de pression sur la tutelle «pour ouvrir les portes du dialogue», d'une part, et «confirme l'attachement de la base au travail du syndicat d'autre part.» De son côté, après avoir rompu le silence sur ce sujet, le ministère de l'Education nationale a avancé quelques estimations concernant le taux de suivi. Pour la tutelle, la participation n'a pas dépassé les 24%, au niveau national, tous cycles confondus. Dans un communiqué transmis à notre rédaction, la tutelle explique que ce «faible taux de participation dénote le degré de conscience et de responsabilité de la grande majorité des enseignants qui ont rejeté l'appel à la grève». Par ailleurs, le ministre de l'Education nationale, M.Boubekeur Benbouzid, a déclaré, lors de son intervention à l'occasion de la cérémonie d'installation des nouveaux directeurs de l'éducation d'Alger, que son secteur est en train de se rétablir peu à peu grâce à la réforme de l'éducation. Pour réussir cette réforme, le ministre, estime que tout le monde, (enseignants, élèves, travailleurs), est appelé à contribuer, chacun en ce qui le concerne, à régler tous les problèmes du secteur. «Il nous faut du temps pour combler les lacunes du secteur», a affirmé le ministre. Cette déclaration est interprétée par les observateurs comme un message aux grévistes. En effet, selon ces mêmes observateurs, le ministre a indirectement demandé aux enseignants de patienter pour qu'il puisse répondre à leurs doléances. Selon eux, cette déclaration confirme la bonne volonté de l'Etat de quant à régler les problèmes des travailleurs de l'éducation, mais relève que les priorités de l'Etat et celles des enseignants ne sont manifestement pas les mêmes.