Revoir à la hausse le taux de productivité dépend des mesures et des efforts de l'Etat pour accélérer et soutenir les réformes et l'investissement privé. La revalorisation salariale n'est pas une équation aussi simple à résoudre qu'on le pensait. Il n'y a pas longtemps, le Fonds monétaire international (FMI), censé accompagner théoriquement la transition économique dans les pays en voie de développement, a recommandé «une politique des salaires qui préserve la compétitivité». Peu avant le verdict de cette institution internationale, le chef du gouvernement a déjà qualifié l'augmentation des salaires, revendiquée à cor et à cri par les travailleurs, d'illégale, s'appuyant sur le faible taux de productivité. Par ailleurs, cette question dépend décidément des mesures et des efforts de l'Etat tendant à accélérer et soutenir les réformes et l'investissement privé. Le rapport du FMI peut être qualifié de double-langage, plein de contradictions. Sinon, comment peut-on reconnaître les efforts macroéconomiques fournis par l'Algérie, tout en indiquant que beaucoup reste à faire en matière de réformes de fond, à commencer par le système bancaire et l'amélioration du climat d'affaires en général. Une question s'impose. Ce rapport du FMI est-il fait sur la base de données réelles? En référence à cette même étude, l'on comprend que l'augmentation doit se faire sur la base de données économiques crédibles. C'est là déjà une première contradiction, car, rappelons-le, le rapport 2005 du FMI considère «encourageantes» les perspectives économiques en Algérie et que beaucoup de choses ont été faites. La productivité dépend aussi de la croissance du secteur privé, appelé à devenir la locomotive de l'économie. Or, le secteur peine toujours à réussir son envol, compte-tenu des obstacles institutionnels et réglementaires freinant l'investissement. En d'autres termes, la productivité doit être soutenue par des mesures concrètes, entre autres, l'accompagnement de l'entreprise, appelée à constituer désormais le moteur de l'économie à la faveur de la nouvelle orientation. Le bien-fondé, macroéconomique du moins, de l'argumentaire d'Ouyahia, développé par le chef de l'Etat, lors de son discours à la Maison du peuple, est valable. Mais, si l'accompagnement de l'entreprise fait défaut, ainsi que le soutien à l'investissement, c'est donc à l'Etat qu'incombe cette responsabilité. La croissance du PIB réel est quelque peu modérée en 2004-2005 (à plus de 5%) ; même constat pour ce qui est du taux d'inflation et celui de la croissance économique en général, situation qui met les feux au vert. Il n'en demeure pas moins que la revalorisation salariale est encore un sujet qui fâche. «La situation économique algérienne reste solide» et se trouve consolidée par «le niveau élevé des cours du pétrole et l'accroissement de la production pétrolière» du pays, lit-on dans le rapport du FMI, ainsi que dans les thèses des autorités publiques. Mais, en référence au plan de soutien à la croissance, appuyé financièrement par les recettes pétrolières, l'éducation, à titre indicatif, la plus touchée par la grogne sociale, se trouve en troisième position parmi les secteurs à développer. Or, peut-on développer l'éducation sans prendre en charge effectivement les enseignants. C'est, en fait, la question que pose la famille des enseignants, que ce soit dans le supérieur, le primaire ou le secondaire. Chez les enseignants, en guerre depuis quelque temps pour faire valoir leurs droits, la colère monte de plus en plus. Contacté hier par nos soins, Meziane Meriane, l'ex-SG du Cnapest, prévoit une amplification de la grogne sociale si le gouvernement ne répond pas à la secousse sociale. Une façon de dire que le dossier des salaires demeure toujours négociable, du moins pour les enseignants. Même si, d'après lui, les prévisions montrent que la grogne pourrait dépasser le secteur de l'éducation, car la question des salaires n'a pas été discutée depuis 14 ans. A en croire Meziane Meriane, il existe bel et bien d'autres manières de revoir à la hausse le salaire des travailleurs, notamment des enseignants, en ayant recours au système des heures supplémentaires. Du côté de l'Unpef, son président Mohamed Ider s'est réjoui du fait que la question des salaires soit renvoyée à la tripartite. D'après lui, c'est une manière de responsabiliser l'Ugta et le gouvernement qui doivent trouver une solution urgente à ce casse-tête des salaires. Le débat va reprendre donc autour de la table de la tripartite, mais, cette fois-ci, l'Ugta n'a pas droit à l'erreur, disent les autres syndicats, à l'instar de l'Unpef.