19 mars 1962: Une date majeure dans la jeune histoire de l'Algérie indépendante. Elle marque la fin d'une guerre, d'une colonisation sauvage qui a réduit les Algériens au rang d'indigènes. Elle vient nous rappeler le dur combat et le long chemin qui ont conduit l'Algérie à l'Indépendance dans le sillage d'une autre bataille à livrer, aujourd'hui, sanitaire cette fois-ci, contre le coronavirus, un ennemi sans visage qui menace l'humanité. C'est dans ce contexte particulier que l'Algérie célèbrera le 58ème anniversaire des accords d'Evian. Un legs, un héritage précieux dont le prix n'a d'égal que les sacrifices, le don de soi de femmes et d'hommes, jeunes, d'exception pour une patrie martyrisée. Un modèle pour ceux qui ambitionnent, aujourd'hui, de construire cette Algérie nouvelle, celle dont la trajectoire a été déviée. Le nom de Krim Belkacem demeure à ce titre une référence et reste intimement lié à cette Algérie une et indivisible dont ont rêvé lui et ses compagnons d'armes. Retour sur des tractations qui auront duré près d'une année. Elles auront lieu aux Rousses, près de la frontière suisse... Il sera question de mettre fin à une colonisation féroce qui a duré plus de 130 ans. Krim est à la tête de la délégation qui va négocier l'indépendance de l'Algérie, secondé par des hommes qui feront briller de mille feux une diplomatie née dans les maquis. Les pourparlers peuvent commencer, mais sans témoin. Que veut-on cacher au monde? Cette plaie béante qui s´appelle Algérie, solidement accrochée et tatouée au fronton de la patrie des droits de l´homme? Ou bien, tout simplement, la détermination farouche d´indépendance d´une poignée de jeunes Algériens emmenés par celui que l´on surnomma «le Lion des djebels»? A ce moment-là, personne ne savait que le sort du mythe de l´Algérie française serait définitivement scellé le 18 mars 1962 à l'hôtel du Parc, à Evian-les-Bains (en Haute-Savoie, France). Sans concessions L´homme qui préside la délégation algérienne est entouré de compagnons de lutte, jeunes et brillants. Krim Belkacem et son équipe, composée de Mohamed Seddik Benyahia, Réda Malek, Tayeb Boulahrouf, Ahmed Boumendjel, Saâd Dahlab, Ahmed Francis, M'hamed Yazid...ne cèderont pas d´un pouce. Krim Belkacem annonce la couleur. Il sera sans concession. Comme à la première heure. Celle où il a décidé de se donner corps et âme pour l'indépendance de cette terre qui l'a vu naître. C'est autour de cet objectif atteint au prix de sacrifices et du don de soi que s'est forgée l'unité du pays. Un combat que devraient méditer ceux qui, allégrement et en toute inconscience, ont tendance à hypothéquer cette liberté arrachée par de jeunes Algériens sortis à peine de l'adolescence, qui n'ont pas hésité un seul instant à faire don de leur vie. C'est dans cette lignée que s'inscrit le parcours de Krim Belkacem. Celui d´un homme qui aura tenu le maquis près de 10 ans avant le déclenchement de la guerre de Libération nationale, le 1er Novembre 1954. Né à Draâ El Mizan un 14 décembre 1922, il fréquenta l'école Sarrouy à Alger où il décrocha son certificat d'études primaires. Une performance pour un musulman, à l'époque. Il est animé très tôt d'idées révolutionnaires. Dès 1945, il adhère au Parti du peuple algérien, le PPA. En 1947, il est convaincu que seule la révolution, la lutte armée peut mener à la liberté. Dès lors, il prendra le maquis où il organise et forme des groupes militaires. Il sera en avance de sept années sur le 1er Novembre 1954. Un chiffre prémonitoire: la guerre de Libération durera sept ans. Il dominera le FLN-ALN en 1958-1959 en tant que ministre des Forces armées. Une date et un homme Il sera à la tête du ministère des Affaires étrangères et de celui de l'Intérieur au sein du Gpra, le Gouvernement provisoire de la République algérienne, entre 1960 et 1961. Il aura incarné à lui seul toutes les fièvres et les soubresauts qui auront jalonné le Mouvement de Libération nationale, et particulièrement l´une de ses étapes les plus cruciales, la fin du PPA-Mtld et la chute de son chef historique, Messali Hadj. Héros de la guerre de Libération nationale. Krim Belkacem, symbolise à plus d'un titre, l´un des plus fabuleux combats menés par un révolutionnaire algérien contre le colonialisme français et l'impérialisme, pour la liberté des peuples à disposer d'eux-mêmes... La date du 19 Mars couronnera cet objectif et restera intimement liée au nom de Krim Belkacem pour l'éternité sans doute. Ce n'est que lui rendre justice et, à travers lui, à tous ceux qui se sont sacrifiés pour ce pays. Certains au péril de leur vie alors qu'ils auraient pu la croquer à pleines dents. Des jeunes femmes et des jeunes hommes tout juste sortis de l'adolescence pour bon nombre d'entre eux. D'autres se sont retirés sur la pointe des pieds pour que l'Algérie indépendante se construise... Les accords d'Evian ne peuvent être évoqués sans avoir une pensée particulière pour eux, pour celui dont ils portent l'empreinte. Celle de Krim Belkacem.