A quelques jours de la réunion de l'Aiea, le dossier nucléaire iranien demeure ouvert et aucune solution ne semble en vue. Les réunions tenues la semaine dernière et ce samedi entre les délégations russes et iraniennes sur le dossier nucléaire de l'Iran n'ont pas abouti même si un accord préliminaire a été annoncé après la rencontre de leurs délégations dimanche à Téhéran. L'Iran pressé de toutes parts pour revenir sur sa position de principe, concernant son droit à l'enrichissement de l'uranium, tient bon et ne semble pas prêt à céder aux menaces, notamment américaines -des responsables américains évoquent de plus en plus, quoique à mots couverts, la possibilité de frappes contre l'Iran- acceptant toutefois de discuter avec la Russie du plan que propose Moscou : la possibilité d'effectuer les enrichissements en Russie. De fait, il s'agit pour la Russie, soutenue par les Européens, de prendre en charge l'enrichissement de l'uranium iranien et fournir par la même occasion à l'Iran le combustible nécessaire au fonctionnement de ses centrales nucléaires avec l'objectif avoué d'empêcher l'Iran de maîtriser, par ses propres moyens, le procédé qui peut mener à l'arme atomique. Aussi, toute la bataille menée depuis trois ans autour du nucléaire iranien consistait-elle uniquement à prévenir la possibilité pour ce pays d'accéder à la technologie, très sophistiquée, de la transformation et de l'enrichissement de l'uranium, procédé qui ouvre la voie au nucléaire militaire, d'où la crainte de l'Occident de voir l'Iran s'inviter au club nucléaire, très fermé, dont l'Inde et le Pakistan avaient forcé les portes en 1998. C'est cette inquiétude qu'exprimait la semaine dernière le secrétaire d'Etat adjoint américain, Joseph Robert, qui regrettait «L'Iran a des ressources énormes, des ressources financières énormes, et l'Iran a une communauté scientifique et technique très sophistiquée, très avancée» qui le rende «capable de développer une arme nucléaire par lui-même et les moyens de lancer ces armes» a-t-il affirmé, soulignant la nécessité, pour la communauté internationale, de freiner le régime iranien «par tous les moyens» y compris militaires, comme l'a laissé entendre récemment le secrétaire américain à la Défense, Donald Rumsfeld. De fait, l'agence de sécurité nucléaire de l'ONU, l'Aiea, avait saisi à la mi-février le Conseil de sécurité sur l'affaire du nucléaire iranien, saisine qui pourrait être confirmée le 6 mars prochain -lors de la réunion de l'Aiea consacrée à ce dossier- si, d'ici là, aucun accord n'est trouvé avec Téhéran. Aussi, c'est une course contre la montre qu'a engagée la Russie pour amener Téhéran à renoncer à sa décision d'enrichir son uranium en Iran. Quoique des progrès semblent avoir été réalisés lors de la rencontre en début de semaine à Téhéran, Moscou restait hier très prudent ne confirmant que partiellement l'optimisme affiché par Téhéran. Ainsi, selon le chargé du dossier nucléaire iranien, Gholamréza Aghazadeh, les deux parties seraient parvenues à un accord préliminaire indiquant, lors d'une conférence de presse avec le chef de l'Agence russe de l'énergie atomique, Sergueï Kirienko, «Nous sommes parvenus à un accord de principe sur la création d'une compagnie conjointe» pour enrichir l'uranium. M.Aghazedeh ajoute: «Nous avons discuté des éléments de la proposition russe et notre position commune à ce sujet est que nous avons fait des progrès» et le responsable de l'organisation iranienne de l'énergie atomique de souligner: «Nous pensons pouvoir obtenir un résultat satisfaisant pour la réunion du 6 mars». Pour sa part, quelque peu évasif, M.Kirienko s'est borné à déclarer que la proposition «d'enrichir l'uranium iranien restait sur la table». Ce qui indique quelque part que les choses restaient en l'état et que le dialogue devra se poursuivre, dans l'espoir d'arriver à un accord définitif avant le 6 mars date de la réunion de l'Aiea à Vienne. De fait, les choses sont loin d'être éclaircies, et les Russes semblaient plutôt sceptiques quant à l'acceptation par Téhéran d'un accord contraignant. Ainsi, selon un membre de la délégation russe qui se trouvait samedi et dimanche en Iran, cité par l'agence russe Interfax, c'est encore à Téhéran de prouver sa bonne foi, minimisant de fait la portée de l'enrichissement de l'uranium iranien en Russie en estimant que «l'entreprise conjointe n'est qu'une des mesures. Il faut que l'Iran revienne au moratoire». Cependant Téhéran ne semble pas prêt à céder aux injonctions comme l'indiquait Ali Hosseini-Tash, membre du Conseil suprême de la sécurité nationale, qui a conduit mercredi dernier la délégation iranienne à Moscou, qui a déclaré hier, cité par la télévision d'Etat, que «l'Iran a prévu et étudié les conséquences de toute décision possible du Conseil de sécurité des Nations unies. Il n'y a pas de raison de reculer pour l'Iran».