Le 26 mai 1993, Tahar Djaout, l'un des plus jeunes et plus talentueux écrivains algériens d'expression française, mais aussi l'un des plus brillants journalistes de notre pays, a été victime d'un attentat terroriste. Ce jour-là, le monde médiatique et culturel algérien a été secoué par la tragique nouvelle qui allait terrasser toutes les personnes qui ont connu de près ou de loin Tahar Djaout. C'était le premier journaliste à être assassiné et le drame algérien ne faisait que commencer. Tahar Djaout n'est pas décédé sur place. L'espoir qu'il s'en sorte avait été entretenu tout au long de la semaine qui séparait la date de l'attentat et celle de son décès qui allait malheureusement survenir le 2 juin. Le poète, le romancier et le journaliste talentueux n'est plus. Il n'avait que 39 ans. Mais sa notoriété de romancier avait déjà franchi les frontières. En ces 27 ans qui nous séparent de la date de l'attentat ignoble, on se demande combien de romans Djaout aurait encore pu écrire, lui qui était bien parti pour être le digne héritier de Kateb Yacine, Mohammed Dib et Mouloud Feraoun. Mais la bêtise humaine en a décidé autrement. à 39 ans, Tahar Djaout a réussi à léguer à la littérature algérienne, maghrébine et francophone de manière générale, des oeuvres littéraires de haute facture et pérennes. De son petit village Oulkhou, près d'Azeffoun en passant par Alger, Tahar Djaout a réussi à franchir la porte de la très convoitée et prestigieuse maison d'édition française du Seuil. Cette dernière n'était accessible qu'à la crème des écrivains du monde ayant choisi la langue de Molière pour faire éclater leur talent. C'est aux éditions du Seuil que Tahar Djaout publie ses romans. Tahar Djaout a passé les premières années de sa vie à Oulkhou. On retrouvera ses souvenirs d'enfance fraîchement racontés dans son recueil de nouvelles magnifiquement écrit: «Les rets de l'oiseleur», mais aussi dans plusieurs romans. En 1964, sa famille s'installa à Alger où il poursuivit toute sa scolarité avant de s'engager à la fois dans le journalisme culturel et la littérature par la grande porte, faut-il le préciser. à l'instar de la majorité des romanciers du monde, le premier livre édité par Tahar Djaout est un recueil de poésie: «Solstice barbelé» sorti en 1973. C'est en 1981 que le premier roman de Tahar Djaout voit le jour à Alger: «L'exproprié». Son deuxième roman intitulé «Les chercheurs d'os» est publié aux éditions du Seuil» en 1984. Le succès est immédiat. La critique le salue à l'unanimité et les traductions dans plusieurs langues suivent. Trois années plus tard, Tahar Djaout publie un autre roman, un chef-d'oeuvre aussi «L'invention du désert», puis «Les Vigiles» en 1991. Ce roman a reçu le prestigieux prix Méditerranée de la meilleure fiction littéraire. Il a été traduit en plusieurs langues dont l'anglais, l'allemand et le portugais. Après son assassinat, un roman posthume et inachevé est publié par les éditions du Seuil. Il s'agit du «Dernier été de la raison». Un roman prémonitoire que Tahar Djaout n'a pas pu achever. La folie humaine en a décidé autrement. Mais Tahar Djaout reste éternel à travers son oeuvre littéraire.