L'écrivain Mohand Ouramdane Larab est l'auteur de nombreux livres sur les grands poètes kabyles anciens. Parmi ses livres, on peut citer «Isefra n Si Mohand Ou Mhend», «Tadyant n Cheikh Mohand Oulhocine», et «Ammud isefra n Hocine n Aden» dont il nous en parle dans cette interview. L'Expression: Peut-on savoir comment est né votre intérêt pour la poésie kabyle ancienne, notamment celles de Si Mohand Ou Mhand, Ckeikh Mohand Ou Lhocine, El Hocine Adeni? Mohand Ouramdane Larab: L'intérêt que je porte à la poésie kabyle ancienne est dû à l'entourage familial qui est abreuvé de la source de la culture kabyle, notamment par l'intermédiaire de ma grand-mère maternelle et de ma mère qui est une descendante directe de la famille des At Hmadouche, famille du célèbre poète national Si Mohand Ou Mhend. Par la suite, à mon tour, j'ai commencé à versifier à partir de l'année 1977, au cours de laquelle j'ai écrit mes premiers poèmes «la cicatrice, poèmes de jeunesse», publié à Paris en 2011. Qu'en est-il de vos travaux de recherches sur la poésie kabyle? Durant le début des années quatre-vingt, j'ai entamé des travaux de recherches sur les diverses personnalités de la littérature orale kabyle. J'ai suivi en quelque sorte le chemin tracé par Dda Lmouloud Mammeri. dans ma trajectoire, j'ai choisi de suivre cette voie tracée par notre père spirituel qui est Dda Lmouloud. Et vous avez écrit vos trois livres sur Si Mohand, Cheikh Mohand et Hocine n Adeni... Oui, les livres sur Si Mohand Ou Mhend, Cheikh Mohand Oulhocine, et Hocine n Adeni comprennent des textes inédits. Ils ont été édités en mars 1997 aux éditions Impérial à Rabat au Maroc. A partir de là, j'ai entamé d'autres travaux de recherches pour contribuer à réhabiliter d'anciens poètes de la Kabylie. Vos premiers livres ont été édités au Maroc, racontez-nous cette expérience éditoriale? Cette expérience est très bénéfique pour moi, vu l'impasse où se trouvait le livre durant les années quatre-vingts- dix où il n'y avait que les maisons d'édition publiques et certaines privées, mais qui n'accueillaient pas le livre amazigh ou celui qui est du domaine culturel amazigh ou de la réhabilitation des amusnaw kabyles, j'ai été obligé de faire ce choix. Ceci m'avait conduit, durant une mission professionnelle au Royaume chérifien en 1997, de prendre attache avec M. Lahcene Zerouali, un Amazigh du Moyen Atlas. Ce dernier m'a ouvert les portes de l'édition Impérial pour me faire éditer trois ouvrages à la fois qui sont «Isefra n Si Mohand Ou Mhend», «Tadyant n Cheikh Mohand Oulhocine», et «Ammud isefra n Hocine n Adeni». Cette expérience est la deuxième pour un auteur algérien, après Mouloud Mammeri qui a publié chez les éditions Agdal en 1938. À cette occasion, je remercie au passage M. Lahcene Zerouali directeur des éditions Imperial et Mounir Kejji. J'ai récidivé en 2004, chez les éditions Phediprint en publiant un Lexique scolaire de 1995 pages (anglais-français-tamazight-arabe). Par la suite, vous avez édité des livres en Algérie, notamment aux éditions Le savoir dont un sur Cheikh Mohand réédité dans le même ouvrage avec celui de Hamid Mezaoui; comment est né ce projet de livre? Effectivement, avec la modeste expérience d'avoir publié quatre ouvrages à l'étranger, j'ai entamé une nouvelle tentative avec Hamid Mezaoui des éditions Le Savoir pour la réédition de «Isefra n Si Mohand ou Mhend» en 2006 et de «Ammud Isefra de Lhadj Arezki Haouache» en 2007 et un ouvrage collectif avec Hamid Mezaoui, intitulé «Les dires de Cheikh Mohand Oulhocine» en 2008, suivis par bien d'autres ouvrages chez l'Enag en 2014: Lexique scolaire (anglais-français-tamazight-arabe) et un Lexique économique (français -tamazight-arabe). Il y a eu aussi la réédition bilingue du recueil de poésies de Hocine n Adeni chez les éditions Identité en 2016. Votre livre sur Matoub Lounès est prêt depuis plusieurs années, mais il n'est pas encore sorti, pourquoi et pourquoi vous êtes-vous penché sur la poésie de Matoub? Un ouvrage en hommage au Rebelle n'est pas une mince affaire, il n'est pas facile de raconter toute une vie très riche en évènements et combats dans un ouvrage de 300 pages. Le combat de Lounès, on ne peut l'écrire dans un seul ouvrage. Ce livre date de plus de 22 ans, mais à chaque fois, il y a des entraves. Cette fois c'est O.K., il ne reste que la dernière retouche de l'éditeur et d'un petit sponsor pour prendre en charge les frais d'impression. Je souhaiterai entamer un second ouvrage sur Lounès, sur l'apport de sa poésie à la langue kabyle et à la culture amazighe, car on retrouve des «vieux» mots dans sa poésie, qui ont disparu de la majorité des régions de Kabylie, le Rebelle a participé à la sauvegarde de la langue par ses textes. La poésie de Lounès Matoub, est un chef- d'oeuvre impérissable et inestimable, toute la jeunesse kabyle (filles et garçons) a repris ses textes de porte-flambeau de la revendication amazighe, une partie de cette nouvelle génération est même née après la mort de Lounès. Ce ne sont pas uniquement les jeunes berbérophones qui ont repris le flambeau de Lounès, mais il y a aussi des amis africains qui chantent bien les chansons de Matoub. C'est le cas du Guinéen Gadry et des amis que j'ai vu au Sénégal et en Côte d'Ivoire chanter Matoub. Le combat du Rebelle est repris en Afrique du Nord et dans pas mal de pays d'Afrique de l'Ouest. Vous êtes aussi l'auteur d'un livre sur les arbitres algériens, parlez-nous de cet ouvrage qui sort de votre domaine d'intérêt habituel... Mon dernier ouvrage édité est le Dictionnaire des arbitres algériens de football, paru aux éditions «Graine fertile» en 2018. Le but de ce livre consiste à rendre hommage à mes collègues arbitres de football, car moi-même j'ai passé une période d'une vingtaine d'années de ma jeunesse dans cette activité sportive au service du football. Cet ouvrage est composé de 100 fiches techniques d'anciens arbitres internationaux qui ont honoré le corps arbitral durant les manifestations internationales comme Haimoudi, Lacarne, Hansal, Medjiba, Bergui, Chekaimi, Benganif, Benghezal, Mohandi... Et d'environ 400 autres fiches de différents paliers d'arbitres fédéraux et inter-ligues, sans omettre bien sûr les doyennes des femmes arbitres qui ont tracé la voie à la nouvelle génération et qui sont Mlle Fergani Soumiya de la ligue de Blida et Khefache Saliha de la ligue de Tizi Ouzou. Cet ouvrage se veut un hommage solennel aux collègues qui sont en vie et ceux qui sont décédés, qui ont rendu un énorme service au football, car sans arbitres il n'y a pas de pratique du football. Quels sont vos projets ou les prochaines publications? Mes prochaines publications seront une réédition bilingue de «Isefra n Si Mohand ou Mhend», et un autre ouvrage sous le titre le «Voyage de Si Mohand», et «Les poètes n At Yiraten» qui sont au nombre de 20. Sans oublier les travaux en cours pour rendre hommage aux militants berbéro-nationalistes, un ouvrage qui me tient à coeur depuis plus de 20 ans, en plus des poèmes de Si Youcef Oulefki et de Ahmed Lemsiyah.