Pour Me Ksentini, «la peine capitale n'a jamais réduit les crimes». «L'abolition de la peine de mort en Algérie s'impose en urgence», affirme Me Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (Cncppdh). Intervenant sur les ondes de la Chaîne III, le président est largement revenu sur ce point en insistant toutefois sur la nécessité de supprimer, d'une manière officielle, la peine capitale. Ce dernier ne trouve aucune raison valable justifiant encore le maintien de cette sanction «cruelle». Pour Me Ksentini, la peine de mort est «totalement absurde» et n'a aucun aspect dissuasif sur le phénomène de la criminalité. «La peine capitale n'a jamais réduit les crimes», constate-t-il. Depuis 1993, appuie-t-il, aucune exécution de peine de mort n'a été appliquée en Algérie. D'autant plus, un projet de loi portant sur l'abrogation de la peine capitale est depuis plusieurs mois au niveau du département de la justice. Pourquoi le projet n'a pas encore vu la lumière jusqu'à ce jour? Maître Ksentini explique tout simplement ce retard par le fait qu'il y a des réticences exprimées par certaines parties qui sont à l'origine de ce blocage. Il faut reconnaître que le département de la justice a beaucoup traîné la patte sur ce projet qui n'est pas dans l'intérêt de notre pays. Interrogé justement sur cette question, le ministre de la Justice et garde des Sceaux, M.Tayeb Belaiz dira brièvement: «chaque chose en son temps». Or que le défenseur des droits de l'Homme pense qu'il est temps pour que le département de la justice passe sérieusement à la suppression définitive de la peine de mort du système judiciaire. «C'est une démarche essentielle à la constitution d'un Etat de droit et à la réalisation du processus de réforme de la justice», précise le président avec obstination. Ce dernier souhaite que l'Algérie soit le premier pays arabe qui procédera à l'abolition de la peine de mort. Il rappellera, en ce sens, que notre pays a ratifié plusieurs conventions internationales. Donc, la suppression de cette sanction s'avère, aux yeux de Ksentini, de plus en plus une exigence pour que l'Algérie puisse s'adapter aux standards du droit international et se libère de toutes les contraintes. Il évoquera, à cet effet, les conditions du Royaume-Uni pour l'extradition des 17 terroristes algériens. Très agacé par l'attitude de Londres, le président de la commission n'a pas mâché ses mots pour réagir à son tour, sur cette affaire. «Les conditions ne sont pas du tout acceptables», s'exclame-t-il. Certes, l'extradition ne se réalise pas lorsque le pays demandeur maintient la peine de mort, reconnaît maître Ksentini, mais il est hors de question de déléguer des juges pour contrôler le travail des juges algériens. Selon lui, c'est une pure ingérence dans les affaires internes du pays. Les réticences de la justice anglaise sont infondées puisque l'extradition, explique-t-il, intervient justement avec l'entrée en vigueur des textes de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. La Charte, précise-t-il, garantit bien au contraire l'extinction de toute poursuite judiciaire des repentis. Le président affirme que non seulement la peine de mort n'a jamais été appliquée depuis 1993, le président de la République a gracié 200 personnes condamnées à mort durant les dernières années. Maître ksentini exclut également que cette affaire soit liée au régime de répression. «Je n'ai jamais entendu dire qu'il y a des tortures à l'intérieur des prisons», assure le président en certifiant que la loi 04/15 du 10 novembre 2004 réprime très sévèrement la torture. Pour lui, l'attitude des Britanniques est certainement liée aux rapports des ONG. En matière de droits de l'Homme, le président estime que l'Algérie est pratiquement aux standards internationaux et qu'elle n'a pas de leçons à recevoir sur ce plan par Londres. Enfin, interrogé sur les 31 Algériens détenus à Guantanamo, M.Ksentini pense que la Constitution garantit la défense de ses citoyens à l'intérieur et à l'extérieur du pays. «Il faut que les autorités s'occupent des détenus et assurent le suivi de leur procès», a-t-il suggéré avant de conclure.