«Cette menace résulte de plusieurs éléments conjugués, à savoir, en premier lieu: -la gestion de l'entité targuie dans la mesure où aucune étude dissolvante dans la masse populaire n'a été faite, - la situation socio-économique des populations du Sud en général, notamment en matière de chômage (40% à Ouargla, 70% à Béchar pour ne citer que ces capitales régionales aux sensibilités et spécificités particulières), -la distribution de logements au détriment des autochtones, -l'investiture par certains partis, sur des bases tribales, qui n'est pas de nature à rapprocher les habitants d'une même contrée dans une République censée les réunir et non les diviser comme au temps de la période coloniale.» Cette menace persiste et elle est toujours d'actualité. En deuxième lieu, dans l'interview accordée à L'Expression, (n°3600 du jeudi 30/08/2012), j'ai déclaré qu'il n'est pas dans l'intérêt de l'Algérie d'intervenir au Mali. J'ai précisé à cette occasion que toutes nos frontières sont menacées. En troisième lieu, dans un plateau de télévision consacré à la crise libyenne, j'ai renouvelé le rejet de voir l'armée algérienne pénétrer sur le sol libyen. Ceci dit, c'est pour insister sur la menace réelle qui persiste sur l'Algérie. Cette situation peut freiner ou annihiler tous les efforts de maintien de la paix dans les conflits qui peuvent naître à nos frontières nationales. La menace réelle quipersiste sur l'Algérie D'autre part, sur la question de l'intervention de notre armée en dehors de nos frontières, ma qualité d'ancien diplomate m'oblige par ce qui suit: -a) je ne peux m'abstenir d'ignorer la réalité évolutive irréversible des relations internationales dans un monde entré dans un processus accéléré de changement irrévocable. -b) je voudrais aussi emboîter le pas à mes trois collègues, pour étayer un point de vue complémentaire sur l'intervention de nos forces armées en dehors de nos frontières nationales au regard des points de vue exprimés dans deux quotidiens nationaux différents: Si Hocine Meghlaoui dans L'Expression du 14/06/2020: «Révision de la Constitution, Rupture avec une doctrine obsolète» et Si Mostefa Zeghlache dans Le Soir d'Algérie du 15/06/2020 Enfin, le compte rendu de Si Brahim Takheroubt dans L'Expression du 1207-2020 relatif aux principaux points évoqués par l'analyse de Si Abdelaziz Rahabi. -c) il m'apparaît cependant utile de rappeler les principes directeurs qui ont toujours guidé l'action diplomatique de l'Algérie à ce jour: 1) Le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale, 2) La non-ingérence dans les affaires intérieures, 3) Le droit à l'autodétermination des peuples colonisés, 4) L'intangibilité des frontières héritées du colonialisme. Deux de ces principes ont été ébranlés. Il s'agit du respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale et la non-ingérence dans les affaires intérieures: la Syrie, la Libye, le Soudan, le génocide au Burundi, l'Afghanistan etc. Un nouveau principe a fait son apparition. Il est basé sur la puissance de la force militaire et technologique. Il est venu encadrer des conflits en intervenant sur le terrain d'autrui. Il s'agit du droit d'ingérence en vertu du soi-disant: principe non défini, ni codifié de «l'assistance aux peuples en danger». À la lumière de ce qui précède disons qu'il est manifestement impossible que l'Algérie puisse rester inerte face à une mondialisation des rapports entre Etats, ce que Si Meghlaoui a défini comme «la rupture par notre pays avec une doctrine de non-intervention à l'extérieur des frontières nationales qui est obsolète, et même contraire à l'intérêt national». Puis, il pose déjà le socle juridique pendant que Si Zeghlache lui confère «une teinte à la fois politique et législative constituée par un vide caractérisé dans ces deux facettes quant à l'envoi de troupes algériennes à l'étranger». Pour ma part, dans cet ordre d'idées, il faut un cadre légal, clair et précis à la fois sur les plans, intérieur et extérieur et qui ne jouit d'aucune ambigüité et ne s'y prête à aucune équivoque. Ces contours juridiques ont été rigoureusement et clairement détaillés dans l'analyse de si Meghlaoui car l'Histoire est d'une sévérité implacable vis-à-vis de celui à qui on attribue constitutionnellement la prise de décision. Meghlaoui a détaillé les contours juridiques Quant à Si Zeghlache, il a traité du vide dans ses aspects, politique et législatif de la question, en précisant que «s'agissant donc de la possibilité d'envoi de militaires algériens à l'extérieur des frontières nationales, l'alinéa proposé est censé remplir un vide autant juridique que politique d'une situation dont les contours n'ont pas été précisés par le législateur ou le pouvoir politique». Il argumente sa position: «Certains analystes voient dans cette perspective la possibilité pour l'Algérie d'affirmer davantage son rôle d'acteur solidaire de la communauté internationale dans ses efforts de préservation et de maintien de la paix à l'échelle mondiale, conformément aux dispositions pertinentes de la Charte des Nations unies». Les deux points de vue se complètent ou se rejoignent quelque part car il y a l'empreinte professionnelle inévitable. Tous deux sont connus pour leurs analyses pertinentes avérées. Il est évident que l'apport de leurs interventions est venu à point nommé puisque le suivi et pratiquement la gestion sur le plan international incombent à la diplomatie sous l'oeil vigilant du président de la République. Quant aux questions pertinentes soulevées par mon ami et collègue, Si Rahabi, homme averti et judicieux, pour ma part, je partage ses réflexions à quelques nuances près: 1) le Conseil de la nation n'a plus sa raison d'être puisqu'il constitue une sorte de recasement pour des personnalités eu égard à leur poids historique ou de soutien lors d'une traversée politique difficile du pays. La nouvelle génération, qui est au seuil en attente de la relève n'a nullement besoin d'endosser ce burnous obsolète. Un pays africain a supprimé le Sénat et a construit un barrage avec le budget consacré à cette institution. Pas de place aux interprétations erronées 2) dénomination officielle du pays: La République algérienne démocratique et populaire répondait à un impératif international dans la mesure où cette dénomination faisait coïncider clairement la position de l'Algérie sur l'échiquier politique international par rapport aux deux blocs, son non-alignement et sur le plan de la politique intérieure son caractère social. 3) le mandat présidentiel: Il faut prévoir deux mandats pour permettre au président élu de réaliser le maximum des promesses électorales notamment lors d'une traversée politico-économique difficile et également en raison du poids financier que représente l'organisation de cette élection. 4) pour ce qui est de la participation des troupes militaires aux opérations humanitaires ou de maintien de la paix, les quatre points de vue se rejoignent à mon humble avis. En ce qui me concerne et quitte à me répéter, ma préoccupation majeure reste et demeure que l'Algérie s'inscrive totalement dans: «Je ne peux m'abstenir d'ignorer la réalité évolutive irréversible des relations internationales dans un monde entré dans un processus accéléré de changement irrévocable.» Mon seul souci réside dans les contours politico-juridiques qui doivent impérativement être explicites, ne laissant place à aucune interprétation erronée qui peut engendrer une déviation politique inattendue difficile à remettre sur les rails, surtout dans une situation tendue par ses complexités dans la confrontation d'intérêts irréconciliables et précisément dans un tel contexte qui mettrait en péril la vie de nos soldats. Peut-être faudra-t-il passer par un référendum populaire de sondage? *Moudjahid et filsde moudjahid,Ancien diplomate