En France, la situation est devenue de plus en plus tendue après les échauffourées de jeudi qui ont fait plusieurs dizaines de blessés tant parmi les manifestants que les forces de l'ordre. La forte mobilisation contre le CPE (Contrat de Première Embauche) de Dominique de Villepin ne faiblit pas, au contraire. On attend pour aujourd'hui un rassemblement salariés-étudiants, à Paris, qui risque de sonner le glas du CPE et de peser lourd dans le destin de l'actuel gouvernement. En effet, si les actions estudiantines de jeudi ont drainé entre 250 et 500.000 personnes, dans la capitale et en province, la jonction des mécontentements risque, aujourd'hui, de se traduire par un record de mobilisation protestataire. A l'heure actuelle, on compte toujours 16 universités totalement bloquées et 35 autres perturbées, soit 51 établissements universitaires en courroux sur les 84 que totalise l'Hexagone. A cela s'ajoutent quelques lycées parisiens qui ont débrayé, annonçant un risque possible d'embrasement de la colère estudiantine. Soutenus par les dix partis de gauche, des socialistes aux trotskistes, pour une fois unanimes, les jeunes ont obtenu l'adhésion à leur mouvement de contestation des puissants syndicats que sont la Cfdt et la CGT. C'est ce qui permet à un observateur de considérer que la manifestation d'aujourd'hui pourrait rassembler plus d'un million de personnes. La situation devenant de plus en plus problématique, le président Jacques Chirac est sorti de son mutisme, appelant le gouvernement et les étudiants «au dialogue» et souhaitant que «les manifestations se déroulent dans le calme et le respect de tous». Il faut dire que les pouvoirs publics, du préfet de police parisien au ministre de l'Intérieur, ont mis en cause les auteurs des échauffourées, les accusant d'être des «casseurs de l'extrême droite et de l'extrême gauche» ainsi que des «voyous d'un certain nombre de quartiers». Plus de 180 jeunes manifestants ont été placés en garde à vue jeudi. Ces évenements sont une dure épreuve pour le Premier ministre Dominique de Villepin, dont la cote de popularité subit une érosion spectaculaire, surtout qu'il essuie des critiques acerbes dans sa propre majorité. Depuis son entrée en fonction, en juin 2005, il n'a pas affronté une grogne sociale aussi prononcée, les organisations estudiantines menaçant même, si elles ne sont pas entendues, de durcir le mouvement en prônant la grève générale. Pour Jacques Chirac, c'est là un signe de mauvais augure et c'est pourquoi il lance un appel «à la responsabilité de chacun», sachant qu'un échec de son Premier ministre serait un coup fatal à la candidature de Dominique de Villepin aux élections présidentielles de l'an prochain.