272 arrestations ont été opérées par la police française dans différentes villes de l'Hexagone, notamment Paris et Rennes, lors des affrontements ayant opposé forces de l'ordre et manifestants. De Rennes à Marseille, de Bordeaux à Strasbourg, les manifestants ont exigé le retrait du contrat première embauche (CPE), accusé d'imposer la précarité aux jeunes et que rejettent aussi syndicats et partis de gauche. Ils étaient des centaines de milliers d'étudiants et de lycéens à manifester jeudi dans toute la France contre l'initiative du gouvernement de Dominique de Villepin. Ils exigeaient le retrait pur et simple du CPE, contrat réservé aux jeunes de moins de 26 ans et assorti d'une période d'essai de deux ans. La Direction générale de la police nationale (DGPN) a fait savoir que 247 500 personnes avaient participé à 196 cortèges dans toute la France à 18h, alors que les organisateurs avancent le chiffre de 500 000 personnes. Les affrontements ont donné lieu à 272 interpellations dont 187 à Paris et 19 à Rennes, selon le ministère de l'Intérieur. Au total, 51 policiers et gendarmes mobiles ont été blessés. Il a été également précisé qu'en province, et notamment à Rennes où des heurts violents ont opposé les forces de l'ordre à des casseurs, la police a procédé à l'interpellation de 85 manifestants, 3 d'entre eux ont été blessés lors d'incidents. Paris a connu les plus graves incidents après le rassemblement, entre plusieurs centaines de jeunes et les CRS, boulevard Raspail. Des bouteilles et de nombreux pavés ont été jetés sur un barrage de CRS, qui ont répondu par des tirs de grenades lacrymogènes. Un kiosque à journaux a été incendié et une cabine téléphonique détruite par des casseurs. Les violences ont ensuite eu lieu près de la Sorbonne. Les échauffourées qui ont éclaté ont fait 92 blessés parmi les forces de l'ordre, 18 du côté des manifestant. La situation a dégénéré pendant plus de deux heures en début de soirée. De violents affrontements ont opposé jeunes et policiers dans le Quartier latin, au cœur de Paris, près de la prestigieuse université la Sorbonne, symbole de la révolte étudiante de mai 1968. Des jeunes, visage masqué, ont incendié un kiosque à journaux et jeté des projectiles sur les forces de l'ordre, qui ont répliqué par des tirs de gaz lacrymogène, à Sèvres-Babylone. Plusieurs défilés se sont achevés par des violences, notamment à Rennes, où des policiers ont tiré des grenades lacrymogènes et où des dizaines de jeunes ont mis le feu à des poubelles et endommagé des véhicules, à Toulouse, Montpellier ou Chalon-sur-Saône. Le ministre de l'Intérieur français, Nicolas Sarkozy, a déclaré qu'au total, quelque 300 fauteurs de troubles présumés ont été interpellés. Les opposants au CPE espèrent que la mobilisation va culminer aujourd'hui, après deux mois de contestation politique, sociale et estudiantine. Les jeunes seront alors rejoints par leurs aînés, tous les grands syndicats et dix partis de gauche ayant appelé à descendre dans la rue. Sur le plan politique, le chef du Parti socialiste, François Hollande, a mis en garde le gouvernement contre le “pari risqué” d'un “pourrissement” du conflit. Julien Dray, porte-parole du PS, a appelé, hier, Jacques Chirac à “restaurer le calme” et à retirer le contrat première embauche (CPE) pour ne pas “prendre le risque d'un drame”. “Il appartient au président de la République de restaurer le calme”, a affirmé Dray, avant d'ajouter : “On sait, quand commence ce genre de manifestation, les dangers que cela représente.” Devant la tournure prise par les événements, le président français, Jacques Chirac, a réaffirmé que le gouvernement était “prêt au dialogue” sur le contrat première embauche (CPE) et il a souhaité que “celui-ci s'ouvre au plus vite”, à l'occasion d'une cérémonie de remise de décorations à l'Elysée. Il a lancé un appel à “la responsabilité de chacun”, à la veille de la manifestation d'aujourd'hui organisée par les syndicats de salariés et les organisations étudiantes et lycéennes. “L'actualité s'impose et avant de commencer cette cérémonie, et à la veille de la manifestation de demain, je veux appeler à la responsabilité de chacun”, a-t-il déclaré. Il a cependant, une nouvelle fois, défendu le CPE, qui est, selon lui, “un élément important de la politique de lutte contre le chômage”. Jacques Chirac a insisté sur le fait que ce contrat “va créer des emplois nouveaux pour les jeunes qui sont, aujourd'hui, largement les laissés pour compte du marché du travail”. “Il offre des opportunités et des garanties nouvelles pour les jeunes en difficulté”, a-t-il conclu. Une chose est sûre, la réponse des opposant au CPE interviendra aujourd'hui avec les manifestations qui risquent d'ébranler, une fois de plus, l'Elysée et Matignon. K. ABDELKAMEL/Agences